« Ici vous auriez pu voir Monstres »…
Le film « Monstres », présenté cette année dans la section Forum du Festival de Berlin et récompensé du Prix des lecteurs du quotidien Tagesspiegel, sort en salle en Roumanie à la fin du mois de septembre. Mais avant la rencontre avec le son public roumain, Transilvania Film, le distributeur, et Marius Olteanu, le réalisateur, veulent tirer la sonnette d’alarme sur le nombre de plus en plus réduit de salles obscures où l’on peut voir des films roumains. Ils se sont alors mis à marquer les espaces de Bucarest qui accueillaient tous les jours, jusqu’à il y a peu, des centaines de cinéphiles. « Ici vous auriez pu voir Monstres à partir du 27 septembre ». Des affiches énormes, qui s’adressent directement aux passants, couvrent les façades de deux cinémas bucarestois fermés récemment, Corso et Studio. C’est ainsi que le distributeur du seul film roumain présent cette année à la Berlinale entend sensibiliser le public et relancer le débat sur la situation dramatique des salles de cinéma en Roumanie, victimes d’abandon, de dégradation et poussées à la disparition.
Corina Sabău, 23.09.2019, 13:39
Le film « Monstres », présenté cette année dans la section Forum du Festival de Berlin et récompensé du Prix des lecteurs du quotidien Tagesspiegel, sort en salle en Roumanie à la fin du mois de septembre. Mais avant la rencontre avec le son public roumain, Transilvania Film, le distributeur, et Marius Olteanu, le réalisateur, veulent tirer la sonnette d’alarme sur le nombre de plus en plus réduit de salles obscures où l’on peut voir des films roumains. Ils se sont alors mis à marquer les espaces de Bucarest qui accueillaient tous les jours, jusqu’à il y a peu, des centaines de cinéphiles. « Ici vous auriez pu voir Monstres à partir du 27 septembre ». Des affiches énormes, qui s’adressent directement aux passants, couvrent les façades de deux cinémas bucarestois fermés récemment, Corso et Studio. C’est ainsi que le distributeur du seul film roumain présent cette année à la Berlinale entend sensibiliser le public et relancer le débat sur la situation dramatique des salles de cinéma en Roumanie, victimes d’abandon, de dégradation et poussées à la disparition.
Le réalisateur du film « Monstres », Marius Olteanu : « Le but de cette campagne était d’attirer l’attention sur le fait qu’on s’habitue au pire. Dans ce cas précis, le pire c’est l’absence de cinémas d’art et d’essai à Bucarest. Il semblerait qu’au début des années ’90, il y avait environ 70 cinémas dans la ville. Or, aujourd’hui, il n’en reste plus que cinq, y compris les deux salles de la Cinémathèque. Et malheureusement, je crois que cela affecte directement l’identité culturelle de la capitale. Il existe sûrement beaucoup de gens qui ne savent même pas que des cinémas fonctionnaient auparavant dans tous ces bâtiments. De même, beaucoup de monde ne se rend pas compte de l’impact culturel de cette absence de salles d’art et d’essai. J’espère que cette campagne nous apportera des réponses de la part des autorités sur le statut de ces lieux, pour décider de la marche à suivre pour chacun. »
Paradoxalement, malgré le nombre croissant de productions roumaines récompensées chaque année dans les grands festivals internationaux, le nombre de salles de cinéma continue à décroître en Roumanie. Dix villes couvrent à elles seules 70% du public roumain, alors que la plupart des communes ne comptent même pas un seul écran. Les chiffres le prouvent : nous sommes le pays européen avec le moins d’écrans de cinéma rapportés au nombre d’habitants. En 1990, le public roumain avait à disposition environ 450 salles d’art et essai. Seulement 90 cinémas fonctionnent encore aujourd’hui et la grande majorité est constituée des multiplexes des centres commerciaux.
Après le Prix des lecteurs du Tagesspiegel reçu à Berlin, « Monstres », long métrage de début de Marius Olteanu, a obtenu le Grand prix au Festival international du film de Sofia, en Bulgarie, et le trophée Golden Mimosa du meilleur scénario au Filmski Festival Herceg Novi au Monténégro. En Roumanie, il a été présenté en première au Festival international du film Transilvania de Cluj-Napoca, d’où il est reparti avec le prix des Journées du film roumain pour le meilleur Début.
Marius Olteanu : « La situation en Roumanie est très frustrante, surtout si je la compare avec les projections de Berlin, où plus de 3.000 personnes ont vu mon film. J’ai eu huit projections en tout, dans différentes salles, toutes dotées d’un équipement très performant. C’est alors une situation très frustrante, préparer la première à Bucarest d’un film récompensé d’un prix du public à Berlin, et savoir que les salles ne sont pas au point. Et on ne peut pas tenir le public pour responsable, dire que les gens ne viennent pas voir le film au cinéma. En fait, il n’y a pas de salle pour voir ce type de film. Pour moi, le cinéma commercial et les multiplexes ont leur place, ils sont très utiles pour ceux qui veulent se détendre après une journée stressante. Mais ce n’est pas la seule façon de faire ça. Je crois qu’il existe des films qui mélangent ces deux aspects, ils ont un côté divertissant, mais ils font aussi en sorte que les gens sortent de la salle de cinéma en étant plus intelligents. »
« Monstres » présente une journée, peut-être la dernière, de la vie d’un couple. Dana (Judith State) et Arthur (Cristian Popa) se trouvent devant la plus importante des décisions. Elle cherche de la validation. Il cherche de la compagnie. Ils partagent le même lit depuis des années, mais ça fait un moment qu’ils ne semblent plus aller dans la même direction. Quelles sont les chances de survie d’une relation marquée par des compromis et des pressions sociales ? Les problèmes de communication, ne pas assumer ses faits et ses gestes, tout ça peut miner un couple. Mais l’amour ne crée jamais des monstres. Le film, produit par Parada Film Roumanie et Wearebasca, est distribué en Roumanie par Transilvania Film. (Trad. Elena Diaconu)