La radio en situation d’urgence et de catastrophe
Malgré son âge vénérable, de plus de 100 ans, le poste de radio continue d’être un des vecteurs de l’information les plus populaires à l’échelle mondiale. La radio a non seulement un rôle éducatif, elle est aussi une plate-forme d’échange sur des thèmes d’intérêt général. En outre, elle peut sauver des vies en cas de désastres naturels ou de conflit armé. Depuis 2012, le 13 février marque la Journée mondiale de la radio. Le thème de cette année est « La radio en situation d’urgence et de catastrophe ».
Ștefan Baciu, 13.02.2016, 13:20
Malgré son âge vénérable, de plus de 100 ans, le poste de radio continue d’être un des vecteurs de l’information les plus populaires à l’échelle mondiale. La radio a non seulement un rôle éducatif, elle est aussi une plate-forme d’échange sur des thèmes d’intérêt général. En outre, elle peut sauver des vies en cas de désastres naturels ou de conflit armé. Depuis 2012, le 13 février marque la Journée mondiale de la radio. Le thème de cette année est « La radio en situation d’urgence et de catastrophe ».
Le site Internet de l’événement www.diamundialradio.org présente plusieurs exemples illustrant l’utilité de ce média dans les zones de conflit ou sinistrées. Il met en exergue aussi le rôle joué par la radio portable dans l’endiguement de l’épidémie d’Ebola qui a frappé l’Afrique ou celui des radios scolaires lors des violentes inondations survenues dans le nord du Chili. Un autre exemple s’inscrivant dans le thème de réflexion proposé cette année est celui de Radio Sarajevo. L’importance de ce média s’est avéré cruciale lors du siège la ville de Sarajevo, pendant la guerre dans l’ex-Yougoslavie, révèle le documentaire télévisé intitulé « Bonne nuit, Sarajevo ».
Pour sa part, Philippe Marsan de France, fidèle auditeur des émissions en français de Radio Roumanie Internationale, nous rappelle comment la radio a aidé les gens pendant les moments les plus difficiles du siècle dernier.
Philippe Marsan:
« Quelle belle invention que la Radio ! Tout commença avec la TSF, (Télégraphie Sans Fil). Après l’invention du télégraphe électrique de Morse dont les signaux étaient transmis par les câbles, on pouvait maintenant converser dans l’espace au-delà des mers et des continents. Pendant la première guerre mondiale les « tous nouveaux » appareils de TSF fonctionnaient dans les tranchées, sous le feu des tirs ennemis. Renseignements, secours, ordres de combats, informations, tel était l’utilité de cette nouvelle technique qui permettait de communiquer sans subir la coupure d’une liaison filaire. Très vite, vint la Radiodiffusion utilisant d’abord les ondes longues, puis moyennes ; on découvrit rapidement des ondes courtes qui pouvaient parcourir de longues distances.
La radio va conquérir les foules. Au début, c’était la chansonnette, puis on entendit des commentaires, des débats, des programmes variés. Alors que dans les années 30, à Paris, le célèbre animateur « Radiolo » indiquait l’heure exacte au coup de gong, des régimes totalitaires en Italie, Allemagne, Espagne diffusaient des programmes de propagande. La Radio devint un moyen d’espoir, de liberté, de résistance pour tous ceux qui se battaient contre la répression, la censure, la dictature, les tyrans. Ce fut le temps de la guerre des radios. Et puis, on se rendit compte que la Radio est utile au-delà des services du quotidien, notamment lors de catastrophes, d’organisation des secours.
Dans les années 50, le célèbre metteur en scène Christian Jacques nous présente le film « Si tous les gars du Monde ». En mer, un petit chalutier de Concarneau. A son bord des marins, vaillants, courageux pêcheurs frappés par la maladie suite à l’absorption d’un repas. La radio du bateau tombe en panne. Le capitaine utilise sa station « radio amateur ». Il faut faire très vite, et secourir l’équipage en mer. Grâce aux Radioamateurs présents un peu partout dans le monde, une chaîne humaine va se synchroniser pour permettre le parachutage aérien de l’antidote, au bout de bien des péripéties. Bravo à tous ces gars qui permirent de secourir l’équipage.
Il y eut aussi récemment la guerre de Bosnie, où beaucoup étaient privés des moyens de communications habituels comme Internet, le téléphone ; là aussi la Radio était présente pour informer, alerter, secourir. En France, la protection civile, et d’autres organismes voués à l’intervention des secours possèdent leurs réseaux de transmission « radio ». Et maintenant…. La radio est présente parmi nous, mais c’est de plus en plus sur Internet, les tablettes, les « I phones » qu’elle s’oriente. De nombreux émetteurs en ondes moyennes, ondes courtes deviennent définitivement « muets » ! Saurions nous protéger cet environnement de l’espace qui nous entoure, conserver ces ondes hertziennes qui peuvent dans ce cas précis nous être bénéfiques et positives ».
David Iurescia d’Argentine, qui écoute les émissions en espagnol de RRI, soulignait, lui: « La radio n’a rien perdu de sa vigueur. En ces temps où des pays tels la Syrie et l’Irak sont confrontés à des conflits militaires et où l’infrastructure a été sérieusement abîmée, la radio, notamment les émissions diffusées en ondes courtes, sont les seules sources d’information pour les habitants. »
La radio a sans doute été utile dans le passé, mais elle nous sert de nos jours encore. Rien qu’un exemple : depuis quelques semaines, l’épidémie de virus Zika menace de devenir un problème de santé mondialement redouté. Or, c’est toujours la radio qui constitue le meilleur moyen de toucher l’ensemble de la population, surtout les habitants des villages ou des recoins du monde, de les tenir informés des modalités de prévention et des symptômes provoqués par ce virus. La Radio a sauvé et continuera de sauver des milliers de vies, comme elle l’a fait depuis ce SOS lancé par le Titanic, le 15 avril 1912.
L’eurodéputé Victor Boştinaru a évoqué justement le rôle de la radio en cas d’urgence et de catastrophe : « La Radio a été peut-être toujours le lien le plus direct avec les zones de conflit, de désastre, de crise majeure. Et cela non seulement parce que c’est techniquement très facile, on n’a pas besoin d’une logistique sophistiquée, mais aussi parce que les reporters radio ont toujours été des personnes d’un grand courage et des professionnels qui ont consacré leur vie à leur métier, qui ont affronté de grands dangers pour informer leurs semblables en temps réel de ce qui se passe partout dans le monde. »
Dans ce contexte, l’auditeur Mikio Kohara, d’Osaka, au Japon, s’est rapporté à la réaction des autorités nipponnes après un événement très grave: « Il y a 21 ans, le matin du 17 janvier 1995, un tremblement de terre de magnitude 7,3 sur l’échelle ouverte de Richer s’est produit dans la province de Hyogo. La circulation, les réseaux téléphonique et d’électricité, l’alimentation en eau ont été coupés. Le séisme a fait 6.434 morts. Beaucoup de personnes ont été évacuées et accueillies dans des abris temporaires, aménagés dans des parcs et des écoles. Un mois après le désastre, la préfecture de Hyogo a eu l’idée d’ouvrir la radio « Disaster FM », qui diffusait des informations sur l’état des victimes et sur les personnes évacuées. Cette radio a émis pendant 45 jours, avec le concours de 67 bénévoles. Son utilité a été immense. Une radio similaire a été ouverte le 11 mars 2011, après le grand séisme qui a touché l’Est du Japon. Ainsi, la radio est proche des gens, elle est un moyen de communication accessible et vital en cas de désastre naturel. »
A part le rôle de la Radio en cas d’urgence et de catastrophe, l’eurodéputé Victor Boştinaru a également souligné la liberté d’expression des radios dont les émissions sont captées dans des zones de conflit : « Les médias en général et la radio en particulier sont des armes à double tranchant. Ils sont des instruments de communication, des instruments d’information correcte lorsque la liberté des journalistes est respectée, mais ils peuvent être aussi des instruments de manipulation, de propagande et même faire partie de la guerre hybride, comme cela se passe depuis quelque temps. C’est surtout le cas après la crise ukrainienne, étant donné que dans les Etats où la liberté des médias est restreinte, ceux-ci participent à la propagande officielle et à la guerre que le pouvoir mène soit contre ses propres citoyens, soit contre les cibles de leurs actions agressives. Malheureusement, en 2016, la liberté d’expression et le droit du journaliste de pratiquer son métier avec probité sont largement en doute par ces évolutions, par la propagande russe, extrêmement agressive, par la propagande de Daesh. On constate que les médias sont non seulement un instrument de communication et d’information, mais aussi un instrument de guerre. »
Auditeur des émissions RRI en anglais, Mahesh Jain, fait une remarque similaire : «Lorsque tout autre moyen cesse de fonctionner, la radio reste la seule voie de communication. Récemment, un tremblement de terre terrible a frappé le Népal, rendant les moyens de communication inutilisables. Ce sont les radio-amateurs, qui ont réussi à établir une voie de communication et de transmettre des messages importants. A mon avis, il existe un autre grand désastre, causé par l’homme, lorsque les nations bloquent le flux libre d’informations et limitent l’accès de la population à un autre point de vue. Les instruments modernes de communication, tels la télévision et Internet, sont cryptés et il est très facile pour les gouvernements de bloquer l’accès des citoyens à l’information. Lorsque cela se passe, c’est la radio, mais aussi et surtout les ondes courtes, qui nous aident à mieux comprendre le monde où nous vivons. La radio rapproche les gens et aide à rétablir l’harmonie et la solidarité dans le monde. Veillez à ce que la radio reste vivante ! ».
Notre ami de longue date, Paul Jamet de France, a répondu lui aussi à notre appel et a tenu à souligner l’importance de la radio en situation d’urgence, mais aussi de cette journée mondiale consacrée à la radio.
Paul Jamet:
« Depuis plus d’un siècle, la radio est devenue le média incontournable que nous pouvons utiliser partout très facilement pour nous distraire mais surtout pour nous informer sur l’actualité politique, économique, sportive, sans oublier la météo, les conditions de circulation et en situation d’urgence sur la conduite à tenir, sur les conditions sanitaires, etc. Dans leurs guides ou manuels pour les situations d’urgence, les organisations internationales (UNICEF, Fédération des Croix-rouge, …) conseillent toutes de faire appel aux stations de radio pour informer et conseiller les populations. La radio non seulement informe mais aussi éduque ou tout au moins conseille voire rassure face aux intempéries ou aux épidémies. Elle permet aux professionnels d’être plus efficaces, d’organiser les secours, de guider les populations. Le site web Online Live Disaster Utilities (OLDU) consacre plusieurs pages aux ressources à utiliser en matière de communication face aux situations d’urgences (OLDUCOM : Ressources Communication – Numéros Urgence – Fréquences Radio : oldu.fr/com). Il importe aujourd’hui de conserver des sites émetteurs permettant de s’adresser facilement à de vastes territoires sans dépendre des nombreux maillons de réseaux d’émetteurs ayant une portée limitée. Que cette journée mondiale de la Radio 2016 permette de mieux sensibiliser nos concitoyens au rôle que la Radio joue dans les situations d’urgence : la radio sauve des vies car la Radio c’est la vie … c’est le reflet de notre vie. »
Voyons pour terminer une récente statistique de l’Union Européenne de Radio, European Broadcasting Union. Selon cette enquête, un citoyen européen passe en moyenne 4 mois de sa vie sur Facebook, alors qu’il passe 9 ans de sa vie à écouter la radio. Chaque semaine, 2 millions et demi d’Européens sont présents dans les tribunes des matchs de foot de la première ligue du championnat interne, tandis que 420 millions d’entre eux écoutent la radio chaque semaine, dont les transmissions en direct des matchs de football. Enfin, selon l’Union européenne de radio, si 29% des habitants de l’UE font confiance au gouvernement national, le taux de ceux qui font confiance à la radio est presque double, à savoir 58%.
Vous l’avez dit dans vos messages, les spécialistes et les statistiques le confirment une fois de plus: la force de la radio est toujours incontestable. (trad. Mariana Tudose, Dominique, Valentina Beleavski)