Constantin Bălăceanu-Stolnici
Ana-Maria Cononovici, 13.04.2020, 12:59
Nous avons un invité spécial : Constantin
Bălăceanu-Stolnici, pionnier de la neurocybernétique, médecin neurologue,
professeur de neuropsychologie et d’anatomie du système nerveux, membre
honoraire de l’Académie roumaine, membre de l’Académie des Gens de Sciences de
Roumanie et de l’Académie des sciences médicales de Roumanie, pour ne citer que
quelques titres.
Constantin
Bălăceanu-Stolnici est né en 1923, à Bucarest. Deux décennies durant il a été médecin
gériatre praticien hospitalier et chef de clinique à l’Institut national de
Gérontologie, créé en 1952 par la fameuse docteure Ana Aslan. En 1964, l’Organisation
mondiale de la santé a proposé cet établissement de soins et de recherche comme
modèle d’institut gériatrique aux pays développés.
Pour
commencer, notre invité nous parle de son travail au sein de cet institut et de
sa collaboration avec Mme Aslan : «
Ce fut une collaboration très intéressante, fructueuse, bénéfique tant pour moi
que pour l’Institut. J’y ai passé 25 ans et j’ai même fini par le diriger.
Cette institution était intéressante du point de vue scientifique, grâce aux
recherches menées non seulement sur des questions liées à la pathologie, mais
aussi à la sociologie, à la biochimie, à la biologie du vieillissement. Elle
était importante aussi d’un point de vue pratique, puisqu’on y soignait des malades. Cet institut
a traité des milliers de malades âgés, alors que Mme Aslan a eu aussi une autre
contribution méconnue des autres : une partie de l’Institut a été
transformée en une sorte de refuge pour les pauvres, les sans-abris, chassés
des rangs de l’aristocratie roumaine. Ils n’ont pas été cachés, puisqu’il est
impossible de cacher des gens dans un hôpital public. Mais ils ont été inclus
dans une sorte de groupe de recherche. Et si on le lui reprochait, Mme Aslan
répondait tout simplement : « mais qu’est-ce que vous auriez préféré,
que je fasse des expérimentations sur la classe ouvrière ? ». »
Il
s’agit sans doute de la période communiste, lorsque les riches et les aristocrates
étaient chassés par le régime, alors que la classe ouvrière bénéficiait de plus
en plus de droits. Mais revenons à notre invité, Constantin Bălăceanu-Stolnici,
qui a signé plusieurs inventions. Parmi elles, le thermomètre électronique pour
mesurer la pression intraoculaire.
Constantin
Bălăceanu-Stolnici s’en souvient : « A
l’époque où j’étais assistant de clinique à la section de neurologie, l’on a
créé un institut très intéressant d’ophtalmologie et d’ORL et on m’a demandé de
diriger son laboratoire de médecine expérimentale. C’est là que j’ai pratiqué
la médecine expérimentale, en me penchant, avec mes collègues Brucker et
Willenz sur des questions liées à la pression intraoculaire. Nous avons voulu
clarifier certains aspects liés au glaucome. Nos ouvrages ont été publiés et
largement commentés à l’étranger. Personnellement, je n’ai pas pu voyager, car
la circulation des Roumains était limitée à l’époque, mais d’autres ont pu le
faire, comme le professeur Păcuraru de Cluj, qui a présenté nos
travaux à l’étranger. Puis, au moment où nous avons eu un peu de liberté de
nous déplacer, j’étais déjà connu à Paris, à la Société française
d’ophtalmologie ».
Il
faut dire aussi que notre invité, Constantin Bălăceanu-Stolnici est un pionnier
de la neurocybernétique et compte parmi les créateurs du modèle cybernétique du
neurone.
Constantin
Bălăceanu-Stolnici nous en parle : « C’était
une époque assez difficile. On l’a oublié, mais les débuts de la cybernétique
se sont heurtés à une forte opposition de Staline contre l’étude de ce domaine.
Je n’ai jamais compris pourquoi il avait horreur de la cybernétique et pourquoi
il l’avait définie comme une pseudoscience dangereuse, inventée par les
capitalistes pour détruire la classe ouvrière. Ce titre avait été spécialement
choisi pour donner un cadre pénal à cette science. Par conséquent, on ne
pouvait mener que des recherches clandestines à cette époque-là. Moi, j’ai
découvert la cybernétique en 1948, lorsque j’ai rencontré le professeur Matei
Balş, qui m’a donné le livre de Norbert Wiener. C’est ainsi que j’ai commencé à
travailler dans ce domaine. J’ai aussi rencontré Edmond Nicolau, qui était
ingénieur et mathématicien, et nous avons travaillé presque 25 ans ensemble
dans le domaine de la cybernétique. Le modèle cybernétique du neurone a été une
des premières choses que nous avons réalisées. »
Une
vie consacrée aux sciences médicales et à la recherche, Constantin
Bălăceanu-Stolnici est une figure de proue du monde scientifique roumain. (Trad. Valentina Beleavski)