Le serpent
Appelé « le gardien » ou « l’horloge de la maison », le serpent blanc des ballades populaires était aimé et respecté des membres de la famille, qui croyaient que ce reptile apprivoisé les veillait tout le long de leur vie, les aidant à surmonter les moments difficiles.
Monica Chiorpec, 02.10.2016, 13:15
Appelé « le gardien » ou « l’horloge de la maison », le serpent blanc des ballades populaires était aimé et respecté des membres de la famille, qui croyaient que ce reptile apprivoisé les veillait tout le long de leur vie, les aidant à surmonter les moments difficiles.
L’ethnologue Florin-Ionuţ Filip Neacşu nous parle de l’importance de cet animal dans l’espace roumain : «A la surprise quasi générale, dans la mythologie roumaine, le serpent a des propriétés apotropaïques. Son rôle est de protéger la maison et la ferme de toute influence maléfique. Même Jules Verne, dans son roman « Le château des Carpates », mentionne cette tradition roumaine ancienne, selon laquelle sous la maison des Roumains vit un serpent qui les protège de tous les maux. Le serpent est un symbole ancien dans la mythologie roumaine. Nombre d’historiens et ethnographes estiment que c’est un symbole hérité des Daces, surtout que sur l’étendard dace était un animal ayant une tête de loup et un corps de serpent. C’était un serpent orienté vers la lumière, le loup pouvant être associé aussi avec la lumière surnaturelle. Malheureusement, ont dit que si l’on trouve un serpent mort devant sa maison, son maître passera bientôt lui aussi dans l’au-delà. Plus encore, le serpent est présent dans de nombreuses sculptures de l’art traditionnel roumain, sur la céramique roumaine, notamment sur celle de Horezu, inscrite au patrimoine de l’UNESCO.»
Le serpent est aussi présent dans les moments de passage d’une étape de la vie à l’autre. La céramique traditionnelle de noces garde le symbole du serpent. On le retrouve également sculpté sur la croix des tombes. Par conséquent, le protecteur de la maison devient le guide de son maître dans l’au-delà.
L’ethnologue Florin-Ionuţ Filip Neacşu explique :« Le serpent est souvent associé avec le passage du temps. Dans la culture européenne, on retrouve souvent le serpent Uroborus qui mange sa propre queue, symbolisant le temps infini. Le serpent est donc un des animaux importants de la mythologie, un véritable totem du peuple roumain, aux côtés de l’ours et d’autres animaux, comme le « chien de la terre », une entité souterraine qui protège à son tour les fermes des Roumains. Après la fête de la Croix, célébrée le 14 septembre, les serpents entrent sous la terre et n’en sortent plus qu’en février. Si pendant l’entre-deux-guerres la mythologie était moins connue ou utilisée surtout pour la propagande, de nos jours, les jeunes commencent à redécouvrir les symboles du serpent du foyer qui protège les maisons et les fermes de Roumains partout dans le pays, mais aussi dans l’espace balkanique où habitent des Valaques, des Aroumains et d’autres communautés ethniques similaires ».
Précisons enfin que les enfants des familles traditionnelles étaient les seuls capables de voir et d’entrer en contact avec le serpent du foyer. Certaines attestations ethnographiques parlent même d’enfants qui boivent du lait de différents récipients en céramique aux côtés du serpent blanc. (Trad. Valentina Beleavski)