Michel Beine (Belgique) – Les églises de Roumanie
Plus de 2000 lieux de culte, orthodoxes seulement, ont été construits depuis 1990 en Roumanie.
România Internațional, 11.12.2015, 13:23
Le projet de budget de l’Etat 2016 a beaucoup fait parler de lui, notamment parce que le premier ministre Dacian Cioloş avait déclaré dans un premier temps qu’il comporterait 0 lei pour les églises. Une conduite radicalement différente par rapport aux cabinets antérieurs, qui lui avaient accordé des subventions particulièrement consistantes.
Pour mémoire, l’Eglise orthodoxe roumaine, qui est majoritaire avec environ 87% des fidèles, a récupéré beaucoup de ses anciennes propriétés, les traitements des prêtres sont assurés par l’Etat depuis le XIXe s. et elle ne paie pas d’impôts. En plus, une cathédrale gigantesque est en train d’être construite à Bucarest, jusqu’ici avec un cofinancement généreux de la part de l’Etat, ce qui mécontente une partie de la population. Suite à l’annonce que les subsides seraient coupés, la réaction du patriarche de l’Eglise orthodoxe roumaine n’a pas tardé ; il a déclaré que si toutes les propriétés de l’Eglise avaient été restituées, l’Eglise n’aurait plus besoin de faire la manche à l’Etat. Suite à la discussion entre ce dernier et le premier ministre, le budget 2016 prévoit de l’argent pour les travaux entamés. En fait, c’est le Parlement qui tranchera. Depuis, les journaux entretiennent le débat concernant le nombre d’églises, d’écoles et d’hôpitaux en Roumanie, avec éventuellement des comparaisons avec d’autres Etats de l’UE.
Quelle est la source du mécontentement ? Le nombre d’églises. Pourquoi ? parce que plus de 2000 églises ont été construites après 1989. Il est vrai que pratiquer la religion était très mal vu par les autorités communistes. Tant et si bien que tout de suite après 1989, tout se faisait dans l’autre extrême, en invitant le ou les prêtres. Des messes ont même été inventées pour bénir les autos, si le propriétaire le souhaitait. Tarifées, aussi ; le reçu, lui, était oublié. Mais au fond, combien la Roumanie compte-t-elle d’églises ? Selon une statistique valable pour 2013, 18.300 lieux de culte, tous cultes confondus. Les Roumains font la comparaison avec les chiffres des écoles générales – 4700 – et 425 hôpitaux. La publication en ligne stiripesurse.ro a calculé que le département de Sălaj (ouest), avec 460 églises, a un lieu de culte pour 475 habitants.
A l’autre extrême géographique et de dimensions, au comté de Tulcea, on compte une église pour 2760 habitants. Le département de Cluj du centre du pays dénombre pas moins de 833 églises, soit le chiffre record du pays. « En même temps, précise la publication citée, il y a des comtés avec un lit d’hôpital pour 300 personnes et une école pour 3000 habitants. » Dans le département de Constanţa, une centaine d’églises ont été construites après 1990. Par contre, seulement trois hôpitaux ont ouvert leurs portes dans ce même comté, et qui sont privés, d’ailleurs. A Bucarest, nous avons une église pour 3875 habitants, le chiffre le plus bas du pays. Par contre, Bucarest est en tête du classement en matière d’écoles, avec 349 unités. En même temps, le chiffre est le plus bas rapporté au nombre d’habitants (une école pour 5852 personnes). Le département de Sălaj est bien nanti aussi en matière d’écoles : un établissement d’enseignement pour 1928 habitants.
A compter de 1990, cinq églises ont été construites pour chaque nouvelle école. En fait, quand je dis églises, il faut savoir que près de 70% des lieux de culte de Roumanie appartiennent à l’Eglise orthodoxe. Après, ce sont les baptistes qui en ont le plus, 1275, les catholiques avec 1136, et les protestants avec 965. En tout, plus de 2000 lieux de culte, orthodoxes seulement, ont été construits depuis 1990 dans tout le pays, et seulement 385 nouvelles écoles.
Ce qui est intéressant, c’est de constater que les Roumains donnent de l’argent pour les lieux de culte et ne font pas de dons pour les établissements scolaires. Quelle serait la raison, se demande adevarul.ro. Alors qu’il est très simple de donner de l’argent pour la construction de lieux de culte, précise le sociologue Vintilă Mihăilescu, il est particulièrement compliqué de faire un don pour soutenir une entité scolaire d’Etat. Ce n’est pas que les Roumains n’aimeraient pas donner pour les établissements scolaires aussi. Il en existe 21.000 dans tout le pays. 371 nouvelles écoles ont été bâties après 1989, avec des fonds européens, et un millier ont été réhabilitées. Disons encore que 18 cultes religieux sont reconnus par l’Etat, en Roumanie.