Bernard Launay (France) – qu’en est-il du tennis chez les jeunes roumains?
Le phénomène Simona Halep a déclenché une vague de sympathie pour le sport blanc parmi les enfants de Roumanie, constatait récemment la presse roumaine.
Valentina Beleavski, 24.08.2018, 13:44
Selon Adevarul, à l’heure actuelle, la Roumanie s’enorgueillit d’une génération exceptionnelle dans le tennis féminin, avec à sa tête, évidemment, Simona Halep, n° 1 mondiale et meilleure joueuse de 2018 jusqu’ici. La Roumanie est d’ailleurs un des pays les mieux classés pour ce qui est du nombre de joueuses présentent dans le top 100, avec 6 sportives, soit le même nombre que les Etats-Unis et la Russie. Selon les sites spécialisés, les débuts officiels du tennis en Roumaine remontent à 1889, 1899. Mais sans doute ce jeu y était pratiqué bien avant. Selon l’Encyclopédie de l’éducation physique et du sport de Roumanie, parue en 2002, le premier club de tennis fut ouvert à Galati, ville port sur le Danube, dans l’est du pays. Il y en avait un autre à Bucarest. Les deux s’adressaient aux employés des sociétés commerciales étrangères installées dans ces villes, aux ressortissants étrangers, aux fonctionnaires et aux diplomates. Une dizaine d’années auparavant, d’autres clubs avaient vu le jour à Iasi, Braila, Ploiesti ou Sinaia, mais ils étaient beaucoup plus petits.
Puis, en 1906, à Bucarest, ouvrait ses portes le Doherty Club, d’après le nom de deux frères britanniques et joueurs de tennis remarquables. Quarante ans durant, ce club allait accueillir de grandes compétitions de tennis au cœur de la capitale. Ensuite, les clubs et les terrains de tennis se multiplient d’une année à l’autre à Bucarest. Les compétitions s’enchaînent aussi : en 1909 était créé le championnat appelé « La Coupe Cămărăşescu » où s’affrontaient les différents clubs, puis la première compétition qui s’adressait aux élèves, puis en 1911 – avait lieu le premier Championnat national réunissant une quinzaine de joueurs.
Sans doute, la première conflagration mondiale au eu des conséquences néfastes sur l’activité sportive, qui s’est complètement arrêtée pendant plusieurs années. Le premier règlement des tournois de tennis nationaux est rédigé en 1922, stipulant que ces compétitions étaient uniquement ouvertes aux joueurs de nationalité roumaine. Et c’est toujours en 1922 que la Roumanie est présente pour la première fois dans la compétition de Coupe Davis. Peu à peu, les joueurs roumains commencent à se faire remarquer à l’étranger. En 1926, Bucarest accueille pour la première fois une rencontre de Coupe Davis. C’est en 1929 et 1930 que voit le jour la structure la plus importante du tennis roumain : l’Union des sociétés roumaines de tennis, qui devient ensuite la Fédération internationale de lawn-tennis. Le tennis roumain fleurit à l’entre-deux-guerres. De nouveaux centres sont aménagés dans les plus grandes villes du pays, de plus en plus de joueurs s’affirment.
Cet essor est à nouveau interrompu par la Seconde guerre mondiale. Tout s’arrête jusqu’en 1948 lorsque la Roumanie participe à nouveau à la Coupe Davis. Le tennis roumain connaît quelques succès importants dans les années ’50. Mais ses véritables vedettes mondiales, dont Ilie Năstase et Ion Ţiriac, se font remarquer à partir des années 60. Dans les tournois de double, ces deux joueurs forment l’équipe la plus remarquable du tennis roumain au 20e siècle. Leurs résultats individuels sont tout aussi impressionnants. Ilie Năstase occupe la première place du tennis mondial en 1973, il est désigné meilleur joueur roumain à 4 reprises. Le tennis féminin fleurit aussi. Virgina Ruzici est la gagnante du tournoi de Roland Garros en 1978, alors que ses compatriotes Mariana Simionescu et Florenţa Mihai remportent à leur tour plusieurs compétitions internationales, avançant considérablement dans la hiérarchie mondiale.
Dans les années ’90 et 2000, arrive une génération de sportifs aux noms importants, mais qui ne pesaient plus autant à l’échelle internationale : Dinu Pescariu, Andrei Pavel (nr 21 mondial à l’époque), Victor Hănescu, Irina Spârlea, Ruxandra Dragomir et autres. Et puis, ces dernières années, le tennis roumain ne cesse de s’affirmer. Des joueurs tels Florin Mergea ou Horia Tecău ou des joueuses telles Monica Niculescu, Irina Begu ou encore Sorana Cîrstea, sont présents dans la plupart des compétitions internationales et leurs résultats sont notables.
De nos jours, le phénomène Simona Halep a déclenché une vague de sympathie pour le sport blanc parmi les enfants de Roumanie, écrivait récemment le quotidien Adevarul. Le même journal constatait pourtant qu’il n’est pas du tout facile de faire carrière dans ce domaine. Et l’effort physique n’est pas le plus grand problème. En fait, le tennis est un sport très couteux. Les parents doivent investir des milliers d’euros par mois pour que leur enfant puisse avancer sur les courts professionnels. Si au début l’effort, la persévérance, l’application et le talent comptent pour beaucoup, « au moment où il s’agit de passer à un niveau supérieur, ni le talent, ni l’entraînement, ni le désir de gagner ne font plus la différence. C’est l’argent. Le pouvoir financier de couvrir les coûts des tournois, des entraînements, des équipements. Tout se réduit à cela. Au moment où l’argent est fini, tout s’arrête », avoue le père d’une jeune fille, multiple championne nationale, interviewé par le site spécialisé treizecizero.ro
Combien ça coute de préparer un junior ? Quelque 2500 – 3000 euros par mois pour les entraînements, affirme un autre père interviewé par Adevarul. S’y ajoutent les déplacements aux tournois, qui coûtent entre 400 et 2000 euros par mois si on prend en compte les frais de l’entraîneur et de la personne qui accompagne le joueur. L’équipement peut atteindre les 3000 euros par an, les vêtements aussi, quelque 3000 euros par an. Sans doute, ceux qui feront carrière auront la chance de récupérer tous ces investissements, mais tout le monde n’y arrive pas. D’autre part, des jeunes brillants sont souvent forcés à abandonner leur parcours, car leurs familles n’ont pas les moyens de couvrir toutes ces dépenses.