Les problèmes soulevés par la présence de l’ours brun de Roumanie
Selon les données du ministère, 41 incidents et 4 décès ont été recensés à la suite des attaques d'ours en 2021
Eugen Coroianu, 28.04.2023, 11:57
En Roumanie, les nouvelles concernant la descente d’ours
dans les zones habitées sont devenues, ces dernières années, presque une
banalité. Et les fauves causent bien souvent des dégâts, sans parler des
attaques soldées parfois par des victimes humaines. Les autorités tentent forcément
d’endiguer le phénomène, soit en relocalisant les animaux intrusifs, soit, en
dernier recours, en permettant la chasse des exemplaires agressifs.
Récemment,
la question a été abordée publiquement par le ministre de l’Environnement, des
Eaux et des Forêts, Tanczos Barna :
« La
présence humaine dans l’habitat de l’ours et l’augmentation constante du nombre
d’individus qui se servent, en faisant pas mal de dégâts, dans les granges des
habitations et dans les cultures constituent les principaux incidents recensés en
2021 », avait souligné le ministre. Selon les données du ministère, 41
incidents et 4 décès ont été recensés à la suite des attaques d’ours en 2021, alors
qu’il n’y avait eu que 6 incidents signalés et un seul décès en 2020. En 2019 en
revanche, l’on avait déjà signalé 29 incidents, qui se sont en outre soldés par
8 victimes humaines. L’intervention du ministre a eu lieu à l’issue de la
conférence où son ministère avait présenté la mise en œuvre du « Plan national
d’action pour la conservation de la population de l’ours brun ».
Le
ministre de l’Environnement Barna Tanczos s’est félicité qu’à la suite des
mesures prises dans certaines régions touristiques, où la présence de l’ours brun
était devenue une constante, telle à proximité des villes de Sinaia ou de Tuşnad-les-Bains,
la relocation des familles d’ours a pu se faire sans trop d’encombre. Cependant,
le ministre a également mis l’accent sur l’importance de la prévention, seule
en mesure selon lui d’éviter à ce que des rencontres fortuites entre l’homme et
le fauve ne se soldent par des victimes. Et c’est précisément dans ce sens que
l’organisation environnementale le Fonds Mondial pour la Nature Roumanie a mis
en place une nouvelle initiative, au centre du pays, à Tușnad-les-Bains,
censé permettre la coexistence paisible entre l’homme et l’ours.
Cristian-Remus
Papp, coordinateur du département faune de l’organisation, explique :
« Ce concept repose, après tout, sur la
collaboration étroite entre tous les acteurs concernés : la mairie, les associations
locales, les Unités de Gestion des territoires de chasse, les acteurs du
secteur du tourisme, parce qu’ils contribuent tous dans une certaine mesure à
la gestion des exemplaires d’ours présents sur le territoire. C’est grâce à ce
partenariat, que nous essayons de développer une communauté Bear Smart, un
concept importé des Etats-Unis, où ce modèle a pris son essor justement dans les
régions affectées par la présence d’ours. Il s’agit notamment de mettre en
avant certains exemples de bonnes pratiques, certaines actions censées faciliter
la coexistence pacifique entre l’homme et l’ours. Il faut dire que la
communauté de Tușnad-les-Bains n’est pas hostile à la présence du fauve dans la
région, mais qu’elle tente de tenir les exemplaires d’ours à distance des zones
habitées et d’éviter les attaques pour que tout le monde, y compris les
touristes, soient et se sentent en sécurité. »
« La préservation de l’ours brun et la sécurité des
personnes constitue l’objectif recherché par ce genre d’initiatives, censées
proposer des solutions durables, fruit de l’étroite collaboration entre les
différents acteurs concernés. Car l’ours brun a depuis toujours été présent dans
la région. Il constitue un élément emblématique de ce territoire. Et la
solution que nous recherchons à travers ce genre d’initiatives vise à assurer
la sécurité des résidents et des touristes, tout en protégeant l’ours brun », a
expliqué à son tour Butyka Zsolt, le maire de Tușnad-les-Bains.
Cristian-Remus
Papp nous détaille les étapes de la mise en œuvre de l’initiative menée par le
Fonds Mondial pour la Nature Roumanie :
« Nous mettons l’accent et nous apportons des équipements
de protection supplémentaires, afin que les propriétés exposées soient
sécurisées. Il s’agit surtout de clôtures électriques, qui sont totalement
inoffensives pour l’ours, un système censé tenir l’ours à distance des
habitations, sans mettre en danger la vie de l’animal. Nous réfléchissons
également à la mise en place d’un système censé avertir les ours à l’approche des
voitures, car l’on a recensé des incidents où des exemplaires d’ours ont été heurtés
par des véhicules. Voyez-vous, nous parlons d’une région qui fait office de
corridor écologique pour l’ours, qui passe d’un côté à l’autre de la rivière
Olt. Et, bien sûr, certaines solutions peuvent être mises en œuvre dans l’immédiat,
d’autres au fil du temps, selon le budget disponibilisé à cette fin. Ce que
nous avons pu faire jusqu’à présent, c’est acheter du matériel pour l’équipe
d’intervention qui travaille déjà sur le terrain. Nous voulons également
proposer une étude, censée documenter l’interaction entre l’homme et l’ours,
pour voir les conditions dans lesquelles les exemplaires d’ours s’établissent
et séjournent dans la zone, ce qui les attire, et là on va pouvoir comprendre s’il
s’agisse d’une mauvaise gestion des déchets ou de l’alimentation complémentaire
qui est pratiquée dans les forêts autour de la ville. Pour cela, nous
utiliserons également des colliers dotés de transmetteurs GPS, pour surveiller
les déplacements de certains exemplaires d’ours. Nous envisageons acquérir également
deux colliers dotés de caméras, afin de suivre le quotidien des ours, leurs interactions
avec d’autres exemplaires de la même espèce, mais aussi leurs interactions avec
d’autres espèces, y compris avec les humains. »
La Roumanie accueille en effet la plus grande population
d’ours brun d’Europe, population estimée à environ 8.000 exemplaires, selon les
données issues par la première étude de ce type déroulée au cours des huit
dernières années.(Trad. Ionut Jugureanu)