Les premiers rideaux forestiers
România Internațional, 28.11.2014, 14:11
Les domaines agricoles de la région de Ialomiţa allaient être dotés eux aussi de rideaux d’acacias servant à protéger contre l’enneigement et à apaiser les vents. Les plantations autour des manoirs et de leurs annexes ont joué un rôle important. En 1884, on a procédé à la fixation des sables de la contrée d’Olténie. C’est là qu’entre 1890-1895 on a planté les premiers rideaux forestiers d’acacias. Ils étaient destinés à fixer une superficie de 3000 hectares de sables mobiles ou semi mobiles, la Roumanie comptant parmi les premiers pays au monde à avoir adopté cette solution. Il y a quelques siècles, la plupart des sables d’Olténie étaient stabilisés et protégés grâce au tapis vert des forêts et des pâturages naturels.
Malheureusement, avec le temps, l’agriculture intensive et les déboisements ont favorisé l’apparition des tempêtes de sable. Les désastres causés par les sécheresses qui ont sévi en 1929 et 1935 ont largement contribué à faire naître un courant d’opinion favorable aux rideaux forestiers. Sporadiques, au tout début, ces plantations d’arbres n’étaient pas liées entre elles. On les retrouvait surtout sur les champs et les pâturages. A compter de 1950 on met en place de véritables réseaux de rideaux forestiers à l’intérieur de plusieurs centres d’expérimentations agricoles.
Après la réforme de l’agriculture de 1945, près d’un millier d’hectares de rideaux forestiers sont venus s’ajouter à ceux déjà existants, surtout dans les comtés de Ialomiţa, Buzău et Brăila. Pourtant, en 1958, en raison de la politique d’élargissement des superficies agricoles, ces travaux commencent à être vus d’un mauvais œil. Pire encore, on va procéder au défrichement de plusieurs milliers d’hectares de forêts censés protéger les champs, les routes nationales et les voies ferrées. Les rideaux forestiers des stations d’expérimentations agricoles n’y ont pas échappé non plus. Voici les explications de Adam Crăciunescu, directeur général de la Régie autonome des forêts Romsilva:“Au fil du temps, on a constaté, surtout dans la plaine du Bărăgan, mais aussi dans l’ouest et l’est de la Roumanie, que ces infrastructures périclitent sous l’effet des neiges et des vents soufflant de l’est. Ceci étant, il serait bon de mettre en place des rideaux forestiers le long des voies de communication. Ces forêts protégeaient autrefois non seulement les chemins de fer, les routes nationales et les autoroutes, mais aussi les terrains agricoles. De 1906 jusqu’à l’entre-deux-guerres, la Roumanie a eu un programme ambitieux de création de rideaux forestiers. Dans la plaine du Bărăgan, seule la Dobroudja du Sud, surnommée le Quadrilatère, est toujours couverte de telles forêts à rôle de protection, que nous devons au travail des ingénieurs forestiers et des sylviculteurs roumains”.
Cet automne, la Régie Nationale des Forêts Romsilva a démarré l’aménagement, dans le sud du pays, du premier rideau forestier de protection planté depuis 25 ans en Roumanie. Le rideau s’étendra sur 11 km le long de l’autoroute A2, qui traverse la comté de Ialomiţa, et il couvrira 24 hectares. Selon les responsables de Romsilva, des études de faisabilité ont été réalisées pour 600 kilomètres de rideaux forestiers sur l’ensemble du pays, mais leur aménagement dépend des propriétaires des terrains respectifs, qui doivent donner leur accord.
Les propriétaires des terrains situés au bord des routes nationales sont encouragés à participer à ce programme et permettre l’aménagement des rideaux forestiers sur leurs terrains, en échange d’une rente. Si les propriétaires refusent, Romsilva procédera à des expropriations pour cause d’utilité publique. Adam Crăciunescu: «Des rétrocessions ont été approuvées sans tenir compte de ces superficies et on s’est rendu compte, après ’90, qu’elles nous étaient nécessaires. Le Parlement de Bucarest a approuvé une loi sur les rideaux forestiers, pourtant cela ne suffit pas, car actuellement les terrains visés ne se trouvent pas à la disposition de l’Etat. Ici, à Feteţi, nous avons réussi à obtenir 24 hectares de terrain gérés par l’Administration des domaines de l’Etat, que nous avons fait passer, par une décision gouvernementale, sous l’administration de la Régie nationale des forêts. C’est de cette façon que nous avons pu commencer à planter le premier rideau forestier le long de l’autoroute A2. »
Il suffira d’un programme cohérent s’étendant sur une période de 10 ans pour aménager les rideaux forestiers dont la Roumanie a besoin — affirmait le directeur général de Romsilva. L’idée n’est pas nouvelle, pourtant, c’est la première fois depuis l’adoption, en 2002, de la loi 289 sur les rideaux forestiers de protection, qu’un budget a été alloué à cette fin. Cette année le budget se monte à 30 millions de lei et, de l’avis des responsables de Romsilva, cette somme devrait être doublée à partir de 2015. « Quelque 1.700 km de rideaux forestiers sont nécessaires pour protéger les routes, à quoi s’ajoutent les rideaux destinés à la protection des champs. Une partie de l’étude de faisabilité a été réalisée dans le cadre de ce projet, nous savons à présent où les rideaux doivent être plantés, le problème c’est que les propriétaires n’acceptent pas de mettre ces terrains à la disposition de Romsilva. Une fois les propriétaires consultés, s’ils refusent, on procédera à des expropriations pour que ces rideaux puissent être aménagés — avant tout dans le sud et l’est de la Roumanie, les plus exposés aux tempêtes de neige qui risquent de perturber en hiver le trafic routier. »
En Roumanie, les rideaux forestiers de protection couvrent à présent 2 mille hectares, ce qui représente environ 10% de la superficie nécessaire.
(trad. Mariana Tudose, Dominique)