Les loups des Carpates
România Internațional, 29.01.2016, 14:10
La
Roumanie compte une des plus grandes populations de loups d’Europe, mais même
ainsi, l’espèce est menacée à cause du morcellement de l’habitat, du
braconnage, des conflits avec les chasseurs ou de l’absence d’une gestion de la
situation par les autorités. Le manque d’un plan de management au niveau
national et l’absence d’informations concrètes sur la structure et la dynamique
de la population de loups peuvent conduire à la mise en place de mesures de
gestion erronées qui affectent l’existence de cette espèce sur le long terme.
Afin de maintenir une population viable et saine de loups dans les Carpates,
sur le long terme, l’Agence pour la protection de l’environnement du comté de
Vrancea (est), en collaboration avec les agences de ceux de Harghita et Covasna
(centre) et avec une ONG locale, mènent le projet européen WolfLife. Il s’étale
sur 4 ans, jusqu’en 2018, dans la partie centrale et méridionale des Carpates
orientales, sur l’étendue de six départements. Bien qu’au niveau national et
international, les loups soient protégés par toute une série de lois et
conventions, telles que la Convention de Berne, la Convention Cites, la
Directive européenne ou la Loi de la chasse, cette espèce continue d’être
menacée, et le projet WolfLife pourrait améliorer leur situation. Une année
après le lancement du projet, quelques données importantes ont été collectées
sur la vie des loups des Carpates.
Silviu Chiriac,
chef de projet et expert en conservation des grands carnassiers à l’Agence de
protection de l’environnement de Vrancea : « Nous avons identifié,
tout d’abord, la présence de chiens errants dans les habitats peuplés par le
loup comme étant une menace sérieuse en raison des maladies et de la
concurrence de ces chiens errants. Nous avons également considéré que le grand
nombre de dégâts produits par le loup aux fermiers pouvait mener à une escalade
des conflits entre les fermiers et cette espèce, ce qui pouvait se solder par
une mortalité élevée parmi les loups. Nous avons pensé aussi que l’image
négative du loup parmi la population rurale et urbaine de la Roumanie pouvait
intensifier les conflits à l’avenir aussi. En partant de ces menaces, nous nous
sommes proposé d’appliquer sur le terrain, dans l’espace des 6 comtés concernés
(Vrancea, Bacău,
Mureş, Covasna, Harghita şi Neamţ), des actions concrètes
de préservation et de protection de cette espèce. »
Parmi les actions menées
dans le cadre du projet, un inventaire des meutes présentes sur le terrain a
été dressé, et aussi de leur mortalité. Les habitudes des loups ont été
étudiées, en matière d’établissement des territoires et de leur superficie, de
déplacement des meutes, leur taille ou encore la diète de ces animaux.
Silviu
Chiriac: « En ce qui concerne la grandeur des territoires
et des meutes ainsi que le nombre d’individus dans chacune, nous avons appris
que les meutes des Carpates de Courbure ne sont pas si fortes point de vue
nombre que celles d’Amérique du Nord. Ici, la grandeur moyenne d’une meute
pendant l’hiver les de 3-4-5 individus, alors qu’en Amérique du Nord, les
meutes de loups peuvent atteindre même 24 individus. La taille des meutes est
directement proportionnelle à la quantité de nourriture disponible, car même si
nous avons des populations viables d’espèces de proies (chevreuil, cerf,
sanglier), elles ne sont pas pour autant si importantes que l’affirment les administrateurs des fonds cynégétiques. Nous avons appris
que les chiens errants représentent 20% des proies des loups. D’où la
conclusion que soit les chiens errants vivant dans les forêts sont très
nombreux, ce qui confirme la menace que nous avons identifiée, soit que la
nourriture traditionnelle des loups, à savoir les espèces d’ongulés, n’est pas
suffisante. »
Les informations recueillies grâce au projet
WolfLife montrent que les chiens errants et les chiens de bergers non
surveillés ont un impact significatif sur les espèces faunistiques sauvages.
Pour résoudre ces problèmes, les éleveurs de bétail sont conseillés de renoncer
aux chiens métissés en faveur des traditionnels chiens de bergers.
Explications avec Silviu Chiriac: « A compter de mars, le
ministère roumain de l’Environnement sera l’unique institution européenne du
domaine à disposer d’un chenil destiné à l’élevage des chiens de berger roumain
des Carpates. Les exemplaires de cette race homologuée en Roumanie ont fait la
preuve de leur efficacité en tant que gardiens de troupeaux. C’est un chien
docile, qui ne s’attaque pas aux hommes et ne s’éloigne pas trop du périmètre
de la bergerie pour chasser les bêtes fauves. Avec l’aide de cette race, nous
essayons d’aider les bergers à mieux protéger les enclos. Nous souhaitons
mettre en place un réseau de propriétaires de chiens de berger. Dans une
première étape, nous allons leur donner, gratuitement, un mâle et une femelle
de cette race. Ensuite, les bergers s’engageront, sur la base d’un contrat, à
prendre soin de cette famille canine et à offrir, à leur tour, des chiots à
d’autres éleveurs d’animaux. Nous espérons que ce réseau s’élargira et qu’il
sera vraiment utile aux bergers. »
Le projet
WolfLife vise aussi à une meilleure cohabitation entre les loups et les
habitants, précise Silviu Chiriac: « Dans les 6 comtés concernés par le
projet, nous avons créé une aire de démonstration, pour montrer aux bergers
comment réduire les dégâts causés aux bergeries par les loups, les ours et les
lynx. 6 fermiers de ces 6 départements ont reçu à titre gracieux des barbelés
électrifiés et toute sorte de systèmes acoustiques et olfactifs qui aident à diminuer les dégâts produits
par les loups. A partir de l’été prochain, nous y emmènerons des fermiers de
certaines autres contrées pour de courtes visites leur permettant de voir sur
place comment ça fonctionne. »
Les loups jouent un rôle
essentiel dans le maintien de la viabilité de la faune sauvage et dans
l’existence d’écosystèmes naturels sains et précieux d’un point de vue
écologique, scientifique et touristique. Les Carpates roumaines abritent plus
de 2700 exemplaires de loup. (Trad. Ligia Mihaiescu)