La protection des oiseaux en Roumanie
La Roumanie recense plus de 400 espèces d’oiseaux. Certains d’entre eux sont sédentaires, d’autres viennent y nicher ou hiverner, enfin il y en a qui transitent seulement par la Roumanie pendant les migrations d’automne ou de printemps. Plus de 80% de ces oiseaux vivent dans le Delta du Danube et sont migrateurs dans leur majeure partie. Pourtant, au fil du temps, certaines espèces ont disparu de l’avifaune de Roumanie. Tel est le cas du gypaète barbu, jadis roi des Carpates ou encore de la grande outarde, la plus grande ailée du monde. Cette dernière vivait par le passé dans la Plaine du Baragan ou dans les steppes de la Dobroudja, mais la cupidité des chasseurs a fait qu’elle n’existe plus que dans les livres spécialisés.
România Internațional, 24.04.2015, 14:44
La Roumanie recense plus de 400 espèces d’oiseaux. Certains d’entre eux sont sédentaires, d’autres viennent y nicher ou hiverner, enfin il y en a qui transitent seulement par la Roumanie pendant les migrations d’automne ou de printemps. Plus de 80% de ces oiseaux vivent dans le Delta du Danube et sont migrateurs dans leur majeure partie. Pourtant, au fil du temps, certaines espèces ont disparu de l’avifaune de Roumanie. Tel est le cas du gypaète barbu, jadis roi des Carpates ou encore de la grande outarde, la plus grande ailée du monde. Cette dernière vivait par le passé dans la Plaine du Baragan ou dans les steppes de la Dobroudja, mais la cupidité des chasseurs a fait qu’elle n’existe plus que dans les livres spécialisés.
Même dans ces conditions, l’avifaune de Roumanie continue d’être assez riche, affirme Ovidiu Bufnilă, responsable de la communication au sein de la société ornithologique roumaine: « A la différence d’autres pays, la situation de notre avifaune est assez bonne. Une des espèces d’oiseaux connues dans le monde entier est la grue cendrée. Si les grues ont contourné la Roumanie, un certain temps, cette année elles ont recommencé à transiter notre pays. On en a recensé 73, un nombre important maintenant, mais qui passait pour normal auparavant. Dans cette période de l’année, on peut observer bien des groupes de grues. Elles se reposent au bord des lacs et s’y nourrissent, avant de prendre leur envol vers la Suède. En Roumanie il existe toujours des oiseaux qui disparaissent peu à peu des pays d’Europe Occidentale, dont le moineau domestique. Par exemple, on ne peut plus voir cet oiselet que dans trois endroits de Londres. On y organise même des visites guidées pour les observer. En matière d’oiseaux emblématiques pour la Roumanie, il convient de mentionner l’aigle royal, qui figure d’ailleurs sur les armoiries du pays. C’est le plus agressif des rapaces diurnes d’Europe. Il peut chasser même des chevreuils ou des chamois. Puisque le printemps est là, nous allons nous réjouir de l’arrivée des guêpiers, ces oiseaux au plumage joliment coloré en vert, rouge, jaune ou bleu. »
La disparition des habitats ou leur dégradation représentent une menace à la préservation des oiseaux sauvages partout dans le monde. Si elle ne respecte pas certaines règles, la chasse peut, elle aussi, entraîner la disparition de différentes espèces. Il y a deux mois, la Chambre des députés de Bucarest a adopté un texte relatif à la modification de la loi sur la chasse. Ces modifications ont pourtant suscité le mécontentement des ornithologues, car elles autorisent la chasse sur les propriétés privées sans la permission du propriétaire. En plus, la saison de chasse de certains gibiers à plumes a été prolongée d’une période allant jusqu’à trois mois. Ovidiu Bufnilă: « Commençons d’abord par les espèces chassables. Et ce que nous avons contesté dans la loi de la chasse c’est qu’elle propose d’élargir la période de chasse pour cinq espèces, parmi lesquelles l’oie sauvage qui arrive en Roumanie pendant l’hiver. L’UE impose une certaine période de chasse. Si cette période est dépassée, nous entrons déjà dans la période de migration prénuptiale. C’est une période durant laquelle les couples d’oies commencent à se former, et la chasse de ces oiseaux est interdite au niveau européen. Or si on donne le feu vert à la chasse, nous risquons une autre procédure d’infraction à la législation communautaire de la part de la Commission européenne, comme ce fut le cas en 2010, lorsque les parlementaires n’ont plus approuvé la loi permettant d’élargir la saison de chasse. »
Les ornithologues contestent également les quotas élevés établis par la nouvelle loi de la chasse qui dépassent les effectifs d’oiseaux dont dispose la Roumanie. Ecoutons à nouveau Ovidiu Bufnilă, responsable de la communication de la Société ornithologique roumaine : « Rien qu’un exemple : l’oie des moissons. En Roumanie sa population ne compte qu’entre 10 et 100 exemplaires. En échange, le quota de chasse pour cet oiseau et de 27 mille exemplaires. Cela veut dire que cette espèce est utilisée en tant que parapluie. Au moment où s’achève la saison de chasse à l’oie cendrée ou à d’autres espèces d’oie, la saison de chasse à l’oie des moissons commence. Donc les chasseurs peuvent chasser toute sorte d’oies et affirmer qu’ils ont chassé des oies des moissons. Ce subterfuge nous concerne, puisque nous risquons de nous retrouver sans cette espèce. Si les effectifs arrivent à une centaine d’exemplaires, vous vous rendez compte ce qui se passera si la saison de chasse se prolonge. Cette espèce disparaîtra tout simplement. »
Le printemps, la Roumanie est une destination pour les oiseaux chanteurs. La grive litorne arrive en Roumanie au début mars et elle chante notamment au coucher du soleil. Le rossignol vient du sud de l’Afrique pour nidifier dans des lisières et des forêts. L’alouette est le plus petit oiseau qui intéresse les chasseurs de Roumanie. Elle chante à l’aube dans les champs. Les oiseaux chanteurs sont touchés par la nouvelle législation vu que la chasse aux alouettes est permise. La Roumanie est d’ailleurs un des quelques Etats membres de l’UE qui permettent cette chasse, affirme Ovidiu Bufnila : « Le tourisme cynégétique s’accentue malheureusement ces derniers temps en Roumanie. Il existe des société qui promettent aux chasseurs de pouvoir tout mettre à leur disposition. Côté oiseaux, il existe deux types de chasse que les touristes italiens et libanais pratiquent en Roumanie. La chasse à l’oie et au canard dans les étangs et le long du Danube en hiver et la chasse à l’alouette vers l’automne. Les Roumains, eux ils ne chassent pas trop les alouettes, mais pour les Italiens cela est une véritable délicatesse. Ca nous fait mal de voir nos oiseaux chanteurs tomber sous les rafales des chasseurs étrangers. Les chasseurs italiens font un véritable carnage puisqu’ils tuent tous les oiseaux chanteurs. Il ne visent pas uniquement les alouettes et ne cherchent pas à éviter les autres oiseaux. Non ! Ils ne chassent pas un seule et unique espèce d’alouette, ils les tuent toutes, y compris la mésange charbonnière, ainsi que des oiseaux pour lesquels la chasse est interdite. Donc on parle d’un véritable massacre dans l’avifaune roumaine puisque tous nos oiseaux chanteurs risquent d’être tués. »
La loi de la chasse et de la protection du fonds cynégétique a été renvoyée au Parlement de Bucarest par le président roumain Klaus Iohannis qui avait reçu une lettre ouverte signée par 16 ONGs, parmi lesquelles la Société Ornithologique roumaine qui, arguments à l’appui, lui demandaient de ne pas promulguer un tel texte législatif. (trad.: Mariana Tudose, Alex Diaconescu)