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Quelle sécurité routière et quelles autoroutes en Roumanie?

Tout Roumain qui voyage en voiture à travers le pays, pour des raisons professionnelles ou personnelles, en tant que touriste, ne peut ignorer la précarité de l’infrastructure routière nationale. C’est une réalité archiconnue dans la société roumaine. En fait, en Roumanie, de nombreuses routes nationales et départementales traversent le centre même de villages et communes alors que l’état de la chaussée est parfois pitoyable, avec des nids-de-poule et des glissières de sécurité endommagées ou tout simplement inexistantes. Le résultat ? En 2019, plus de 1 800 personnes, dont 729 piétons, sont décédés dans quelque 32 000 accidents de la route. Et les chiffres n’arrivent pas à illustrer les tragédies provoquées au sein des milliers de familles de ceux ayant perdu des membres dans des accidents ou dont les membres se sont retrouvés infirmes à cause d’accidents graves. Ce sont justement ces personnes que Oana Baciu représente. Elle est la présidente de l’Association nationale d’appui aux victimes et de prévention des accidents de la route.

Quelle sécurité routière et quelles autoroutes en Roumanie?
Quelle sécurité routière et quelles autoroutes en Roumanie?

, 21.10.2020, 12:19

Tout Roumain qui voyage en voiture à travers le pays, pour des raisons professionnelles ou personnelles, en tant que touriste, ne peut ignorer la précarité de l’infrastructure routière nationale. C’est une réalité archiconnue dans la société roumaine. En fait, en Roumanie, de nombreuses routes nationales et départementales traversent le centre même de villages et communes alors que l’état de la chaussée est parfois pitoyable, avec des nids-de-poule et des glissières de sécurité endommagées ou tout simplement inexistantes. Le résultat ? En 2019, plus de 1 800 personnes, dont 729 piétons, sont décédés dans quelque 32 000 accidents de la route. Et les chiffres n’arrivent pas à illustrer les tragédies provoquées au sein des milliers de familles de ceux ayant perdu des membres dans des accidents ou dont les membres se sont retrouvés infirmes à cause d’accidents graves. Ce sont justement ces personnes que Oana Baciu représente. Elle est la présidente de l’Association nationale d’appui aux victimes et de prévention des accidents de la route.

Oana Baciu : « Ces dix dernières années, on a constaté une certaine baisse du nombre d’accidents de la route, suite aussi à des campagnes de prévention menées par la police. L’idée, c’est que par rapport à 2008, année marquée par un record désastreux de plus de 3 000 morts dans des accidents de la route, la moyenne est aujourd’hui de 1 800 personnes décédées chaque année au niveau national. Donc le nombre des victimes a baissé, mais depuis quelques années, nous ne réussissons pas à améliorer la situation. Malheureusement, notre bilan demeure triste : la première place en Europe pour ce qui est des personnes décédées et blessées. »

Mais une route mauvaise, mal entretenue, étroite ou mal placée peut-elle mettre notre vie en danger ? Inévitablement oui, répond Oana Baciu : « En raison de contraintes professionnelles, il faut souvent arriver à destination avant une certaine heure. Toutefois, nous aussi, autres membres du public, on veut parfois tout simplement parcourir un trajet dans un laps de temps décent. Si on circule sur une route étroite, il est impossible ou difficile de doubler en toute sécurité ; nous sommes donc contraints de faire différentes manœuvres. Ainsi, on ne fait que s’exposer aux dangers et on est entièrement responsable si on provoque un accident avec ou sans victimes. Mais on peut également être responsable d’un accident de la route quand on évite un nid-de-poule par exemple. Il est difficile de démontrer que la responsabilité appartient uniquement à l’institution qui aurait dû mieux gérer tel ou tel segment de route. C’est pourquoi, depuis des années, nous nous efforçons de faire comprendre aux Roumains que l’infrastructure ne nous aide pas du tout et qu’ils devraient apprendre à se protéger eux-mêmes contre les accidents de la route. Pour les chauffeurs, à cause des routes mauvaises et mal éclairées, éviter tout obstacle peut s’avérer souvent une mission impossible. »

Au cours des années, peu de Roumains ont attaqué en justice des institutions de l’Etat, dont la mauvaise gestion des routes a mené à des accidents graves. Mais la vaste majorité des victimes ne connaît même pas ses droits et n’a pas les moyens pour envisager d’ouvrir un procès.

Oana Baciu, présidente de l’Association nationale d’appui aux victimes et de prévention des accidents de la route : «Le problème le plus important auquel nous nous confrontons dans notre combat pour faire justice, c’est tout simplement la crainte des gens. Ils ont peur de lutter pour leur propre justice, ils ont toujours l’impression que cet effort est vain. Un tel processus est très difficile à comprendre par les gens, et pour l’initier il faut disposer de moyens financiers substantiels pour assurer l’assistance juridique de chacun. Et ceux qui ne se permettent pas d’entamer un tel parcours commencent un chemin long et difficile et à ce que je sache, il n’y a pas beaucoup de procès au niveau national à l’issue desquels les autorités soient rendues responsables pour les accidents provoqués par l’état précaire des routes.»

Les autoroutes seraient des voies routières plus sûres, puisqu’elles évitent les localités et aident à fluidifier le trafic. Mais la Roumanie est connue et reconnue aussi parce qu’elle ne dispose pas d’un véritable réseau autoroutier. Fin 2019, seules 4,8% des routes nationales étaient des autoroutes et elles comptaient 866 kilomètres, alors que la Roumanie est le 9e État le plus étendu de l’UE, avec quelque 238 397 km carrés. Et dans ces conditions, que peut faire Monsieur tout-le-monde ? Il peut essayer par exemple de construire sa propre autoroute, comme ce fut le cas de l’entrepreneur Stefan Mandachi en 2019. A l’époque, le 15 mars, il a initié une grève inhabituelle : il a invité les Roumains à faire une pause de 15 minutes à 15 heures. Nombre d’activités, dont notamment celles qui impliquent des voyages en voiture, ont été interrompues par des gens qui ont protesté contre l’absence totale d’autoroutes dans des régions entières, telle la Moldavie par exemple, dans l’est du pays, mais aussi contre l’état précaire des routes nationales en général. Originaire de Suceava, dans le nord-est de la Roumanie, Stefan Mandachi a fait bâtir dans le cadre d’une action à haute valeur symbolique un mètre d’autoroute dans la commune de Cumpărătura de sa Moldavie natale, région entièrement dépourvue d’autoroute. Malgré l’énorme succès de sa démarche qui visait à souligner encore une fois l’importance des autoroutes, de nos jours, plus d’une année après l’inauguration du premier mètre d’autoroute en Moldavie, il n’y a même pas un seul projet sérieux de construction d’autoroutes dans cette région historique.

N’empêche, Stefan Mandachi a continué son action civique dans un film documentaire intitulé « 30 ans et 15 minutes » : « Ce film est une protestation. Je proteste pour déplorer l’absence d’autoroutes en Moldavie. La ville de Suceava est entièrement coupée de la ville transylvaine la plus importante, Cluj, et de la Capitale de la Roumanie, Bucarest. Afin de pouvoir me déplacer de Suceava à Cluj, de Suceava à Bucarest ou bien de Suceava à Timişoara pour mes affaires, je suis arrivé à utiliser un avion léger afin de faire une heure et demie jusqu’à Cluj au lieu de sept heures en voiture – et même huit si je dois me déplacer à Bucarest. Nous, les hommes d’affaires, nous sommes obligés par les circonstances à chercher de nouveaux moyens de transport parce que pour nous le temps est très précieux. En plus, en Roumanie, les voies routières sont beaucoup plus dangereuses que les voies aériennes. »

Le documentaire « 30 ans et 15 minutes » repose sur les drames de plusieurs familles marquées par des accidents, comme ce fut d’ailleurs le cas aussi de la famille de Stefan Mandachi : « J’ai failli mourir à plusieurs reprises lorsque je voyageais en voiture sur nos routes. Et d’ailleurs, ma famille a été impliquée dans des accidents de la route. Ce fut le cas de ma mère et de mon frère. Toutes les personnes de mon entourage sont entrées en contact d’une manière ou d’une autre avec des victimes d’accidents de la route ou avec des personnes qui ont souffert à cause de l’absence de routes modernes en Roumanie. J’aimerais vivre dans une Roumanie avec une infrastructure normale. Ce que nous voulons avoir, ce ne sont pas des OVNIs, on ne demande pas de rouler sur des autoroutes suspendues ; nous voulons des routes décentes, qui ne nous mettent pas la vie en danger jour après jour. J’ai fait de nombreux voyages, dès un âge très jeune, aux côtés de mes parents. Le voyage jusqu’à la mer Noire, de Suceava à Constanta, je l’ai fait à plusieurs reprises et j’ai été le témoin de nombreux accidents. Et j’ai voulu introduire mon histoire dans ce film pour qu’elle s’ajoute à celle des victimes, de leurs familles, des parents qui ont perdu leurs enfants. On les a mis ensemble et on a imaginé une histoire à part. »

Selon Oana Baciu – présente elle aussi dans le film réalisé par Stefan Mandachi – il s’agit d’une histoire qui devrait être répétée sans cesse afin de sensibiliser les autorités, mais aussi pour prouver aux gens que leur voix a une puissance à part lorsqu’il s’agit de lutter pour défendre leurs droits. (Trad. Alex Diaconescu)

sursă foto: eesc.europa.eu
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