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Quelle attitude envers le harcèlement et l’abus sexuels en Roumanie ?

Quelle attitude envers le harcèlement et l’abus sexuels en Roumanie ?
Quelle attitude envers le harcèlement et l’abus sexuels en Roumanie ?

, 26.10.2022, 12:45

Cela fait bien longtemps que l’on parle, en Roumanie
comme en Europe, de harcèlement et d’abus sexuels, physiques ou sur internet.
La législation tente de suivre le rythme de toutes ces nouvelles formes d’abus
récemment observées. Il existe toutefois encore une certaine confusion au sein
de l’opinion publique et dans les règles qui devraient sanctionner ce type de
comportements. Par exemple, un récent sondage effectué par la Fondation World
Vision Roumanie montre que 26 % des adolescents et des collégiens reconnaissent
avoir reçu ou envoyé des photos de « nudes ». L’enquête révèle aussi
que 22 % des élèves interrogés estiment que proposer ou obliger un mineur à
regarder des images pornographiques ne constitue pas complètement ou pas du
tout une forme d’abus sexuel. L’étude s’inscrit dans un projet plus vaste
intitulé « JUSTinAct », qui propose de sensibiliser aussi bien les
professeurs que les parents et les enfants sur les différentes formes d’abus
sexuels, afin de faire évoluer les mentalités qui font qu’aujourd’hui seul le
viol soit reconnu comme un véritable abus sexuel.






Demander à quelqu’un d’envoyer une photo de lui nu, est
aussi une forme d’abus, ce que beaucoup semblent encore ignorer, déplore
Andreea Bujor, directrice
de plaidoyer au sein de la Fondation World Vision Romania : « Plus
de 700 personnes ont répondu à ce sondage. Plus d’un quart reconnaît avoir reçu
des demandes d’envoi de photo de nudes. C’est donc bien que cela existe et
qu’il faut en parler. Nos enfants ont accès à internet, ils sont extrêmement
bien informés et nous continuons d’ignorer ce problème au point d’en faire un
tabou. Cela ne devrait pas être le cas. Nous encourageons tous les parents et
professeurs à rester vigilants et aborder ces sujets avec les enfants. »






Une discussion sincère permettrait d’éliminer le
sentiment de gêne éprouvé par les adolescents dans certaines situations, comme
le révèle le sondage effectué par la Fondation World Vision Roumanie.
Un adolescent sur trois – victime d’abus sexuel – éprouve de la gêne d’en
discuter avec ses parents, par honte, comme nous l’explique Andreea Bujor : « On n’aborde pas
du tout ces sujets à l’école, ils sont considérés comme tabou. La victime
éprouve de la honte et reste persuadée que personne ne va la croire, qu’elle va
être critiquée par sa communauté. Il est primordial d’éduquer et de discuter
avec les enfants. Par exemple, en parler en heure de vie de classe, leur
expliquer ce qu’est un abus sexuel, et qu’il est possible de le dénoncer auprès
de la protection de l’enfance ou de la police. Ce genre d’échanges permet aux
enfants de sentir qu’il existe un lieu sûr où ils peuvent partager leur
vécu. »








L’école doit être
impliquée dans ces discussions, car, malheureusement, c’est aussi à l’intérieur
des établissements scolaires que se produisent de nombreuses formes d’abus.
Andreea Bujor nous explique : « Plus de 17 % des adolescents disent qu’ils
ont été touchés d’une manière qui les a mis mal à l’aise lorsqu’ils étaient à
l’école. Dans la plupart de ces cas, ils ont été touchés par leurs collègues. Par
contre, plus nombreux sont ceux qui avouent avoir été touchés d’une manière inadéquate
dans d’autres contextes, sans que leurs collègues soient impliqués. 51,5 % disent
avoir senti des regards insistants sur leurs corps. En ce qui concerne les
plaintes, plus de 30 % d’enseignants ne dénonceraient pas d’abus sexuels sur un
mineur, faute de preuves. Sur ce point je voudrais faire une précision très importante,
à mon avis : ni les parents, ni les enseignants ne sont des tribunaux.
C’est, donc, la responsabilité du tribunal de décider si un abus est réel ou
pas. La responsabilité d’un parent ou d’un enseignant est de le dénoncer. Après
la dénonce, on mènera des enquêtes et on prouvera ce qui doit être prouvé ».






Quant au milieu
universitaire, une autre recherche indique qu’ici la situation n’est pas
meilleure non plus. Cristina Praz, membre de l’association féministe appelée Le
Centre FILIA, explique : « Au cours de 5 années universitaires, dans 52
universités on a enregistré seulement 15 cas de harcèlement sexuel. Ce n’est
pas forcément un aspect positif, car cela ne veut pas dire que le harcèlement est
rare. Par contre, c’est une preuve qu’on a des difficultés à accéder à ces
mécanismes de dénonces, à communiquer avec les étudiants et avec les étudiantes
et à créer pour eux et pour elles un milieu sûr où ils se sentent à l’aise pour
partager leurs expériences de ce genre et puissent de demander de l’aide. Malheureusement,
dans la plupart des cas, la résolution donnée à une dénonce est la recommandation
d’une médiation ou le classement du cas, par manque de preuves. Une seule fois
l’enseignant a été destitué, cependant pas par la décision de la Commission
d’éthique de l’université, mais plutôt par une décision subséquente, car
pendant la première étape de l’enquête on n’a rien fait ».









Ces informations sont incluses
dans un ample rapport sur le harcèlement sexuel dans le milieu universitaire,
rapport préparé par le Centre FILIA après une étude exploratoire. Cristina Praz
nous offre des détails : « J’ai parlé d’un côté avec les étudiantes et
les étudiants et de l’autre côté avec les enseignants, afin de comprendre
comment ils avaient perçu ce phénomène. Plus de 30 % des répondants ont dit
qu’ils avaient eu des expériences de harcèlement et presque 40 % d’entre eux
ont déclaré avoir assisté à un acte de harcèlement. Cependant, ces données ne
sont pas représentatives, car elles n’ont pas visé toutes les universités. Ce sont
des données de début, exploratoires, précisément pour avoir un niveau minimum
d’informations sur ce phénomène. Selon la même étude, une des causes principales
du harcèlement sexuel est le manque de réglementations et de mécanismes de punition ».








Le Centre FILIA a
analysé précisément la manière dont le harcèlement sexuel et défini et géré par
les codes éthiques et les règlements intérieurs de plusieurs universités.
Cristina Praz nous en explique les conclusions : « Dans notre étude
récente nous venons d’apprendre que, parmi les 85 codes analysés, seulement 38
font des précisions minimales en ce qui concerne le harcèlement. Cela ne veut
pas dire non plus qu’on offre une définition du terme. Plus d’une moitié de
codes n’en donnent aucune référence. C’est là le problème. En l’absence d’un règlement
éthique explicite qui définit le harcèlement sexuel, qui précise les formes de
ce phénomène, ni les étudiants, ni les étudiantes, ni les enseignants ne
peuvent avoir ces informations et ne peuvent savoir si et comment une telle
conduite peut être punie ».









D’ailleurs, quand on
aborde le sujet du harcèlement sexuel, on met l’accent exclusivement sur les
punitions, sans s’occuper de la sensibilisation du public par la communication,
afin de prévenir ce phénomène. (Charlotte Fromenteaud, Andra Juganaru)

(sursa foto pixabay@Vertax)
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