On en a marre que nos enfants respirent de l’air pollué
5,6% des décès de nourrissons sont causés par la pollution aux particules fines PM 10. Ces données ont été centralisées par l’ONG Ecopolis qui vient ainsi en support aux groupes civiques et aux communautés locales qui se mobilisent contre la pollution.
Christine Leșcu, 19.03.2024, 11:51
Des donénes inquiétante sur la pollutiojn de l’air
Alors que la qualité de l’air ne cesse de se dégrader dans les grandes villes de Roumanie, de plus en plus de rapports médicaux établissent un lien entre pollution et dégradation de la santé. Par exemple, en 2021, plus de 2800 décès étaient directement liés à l’exposition aux particules en suspension à Bucarest. De même, 5.6% des décès de bébé sont causés par la pollution aux particules fines PM 10. Ces données ont été centralisées par l’ONG Ecopolis qui vient ainsi en support aux groupes civiques et aux communautés locales qui se mobilisent contre la pollution. L’association Les parents des cerisiers fait parti de ces groupes, elle réunit des parents et principalement des mères préoccupées par la santé de leurs enfants, les aires de jeu et la sécurité dans les rues. Elena Lucaci est la représentante de l’association, elle raconte comment tout a commencé.
« Nous avons formé ce groupe civique autour d’un objectif commun, la base sportive des Cerisiers qui est restée fermée pendant 15 ans. C’était frustrant en tant que parents de se promener autour de ce parc avec les enfants sans pouvoir en profiter. Mais en fait, ça n’a pas commencé là, mais dans une aire de jeu située dans le parc Textila dans laquelle il a un bac à sable pour les enfants. Tous les parents disaient aux enfants de ne pas y aller parce qu’il était rempli d’excréments. Nous avons demandé à maintes reprises aux autorités de venir enlever le sable qui représentait un danger pour la santé publique. Rien n’a été fait alors j’ai acheté 22 gros sacs de chantier, j’ai pris ma pelle et j’ai nettoyé le bac à sable. J’ai laissé les sacs sur place, à côté de l’aire de jeu. J’ai appelé la mairie et je leur ai dit : « Venez prendre les sacs ! ». C’est de là que tout est parti. Au début nous étions peut-être une vingtaine de mères puis le groupe a grandit et maintenant nous sommes environ 350. »
Des solutions accessibles pour inverser la tendances
Avoir des aires de jeu et des espaces verts propres est une priorité pour ces mères. Mais elles souhaitent aussi que leur enfant respire un air sain. Elles se sont ainsi mobilisées contre l’élagage inutile qui abîme des arbres sains. Mais leur projet le plus efficace est probablement : « Arrête ton moteur ! », une initiative simple qui vise à ce que les parents éteignent leur moteur quand ils stationnent devant les écoles et les crèches. L’initiative a donné lieu à un projet de loi actuellement devant le parlement. Elena Lucaci.
« Cette initiative est partie de notre quartier, toujours des mères. Ici, nous sommes entourés de rues très passantes, ce qui fait que la pollution est très importante dans notre quartier. Il y a beaucoup de gens qui se déplacent en voiture et qui stationnent avec le moteur allumé en face des écoles. Il pouvait y avoir jusqu’à 5 ou 6 voitures arrêtées en même temps devant l’école, moteur allumé, les parents descendaient et amenaient les enfants jusqu’à la porte, le moteur toujours allumé. C’était une situation vraiment frustrante mais j’ai été très heureuse quand je me suis rendue compte que nous n’étions pas les seules qui étaient affectées. Moi j’ai de l’asthme et il m’est arrivé d’avoir une crise d’asthme juste en face de la maternelle de mon enfant. Nous nous sommes mobilisées dans le groupe, nous avons fait une quête et imprimé 50 affichettes plastifiées que nous avons accrochées dans le quartier, à proximité des écoles. Puis nous avons pensé qu’il faudrait organiser un atelier sur l’environnement avec les enfants, parce qu’ils exercent une grande influence sur leurs parents. Nous le savons de nos expériences personnelles. Nous avons mis en place cet atelier puis Ecopolis a lancé un concours de projets. Nous avons présenté le projet « Arrête ton moteur » et nous avons été parmi les trois vainqueurs du concours. Nous avons étendu le projet à 23 écoles, soit plus de 1200 enfants et nous avons commencé à voir les résultats. Les enfants parlent de ce problème avec leurs parents. Ça arrive désormais plus souvent qu’un parent me dise : « Mon enfant m’a convaincu d’éteindre mon moteur et d’aller à l’école à vélo ». Donc ça fonctionne. »
Une proposition de loi en cours de discussion
Le Sénat devrait étudier prochainement la proposition de loi visant à modifier le code de la route afin d’interdire tout stationnement de plus de 5 minutes avec moteur allumé dans les villes et villages. Mais Les parents des cerisiers n’entendent pas s’arrêter là, elles souhaitent que la vitesse soit limitée à 30km/h autour des écoles. Elena Lucaci explique pourquoi.
« Donc il y a ces grandes artères tout autour et les voitures inondent aussi les petites rues, dans ma rue par exemple, certaines roulent à 80km/h. C’est pourquoi nous voulons faire des études à petite échelle. Nous voudrions contrôler la qualité de l’air sur le chemin entre la maison et l’école puis entre l’école et la maison en équipant les enfants de capteurs mobiles. Ce serait intéressant pour eux aussi de s’impliquer dans cette démarche. C’est notre priorité. Et nous voulons aussi que les ados s’investissent. On veut qu’ils lâchent un peu Tiktok et qu’ils viennent aux réunions communautaires, pour se rencontrer les uns les autres. Il y a deux jours, il y a eu un évènement dans le quartier, en lien avec la sécurité routière. J’ai vu beaucoup de jeunes qui ne sont pas du tout conscient de se qui se passe autour d’eux. Ils marchent dans la rue avec leurs écouteurs. La police municipale du secteur 4 était présente à l’évènement mais aussi un professeur de kung-fu qui a donné des techniques d’autodéfense. C’était très intéressant mais ça reste difficile de faire venir des ados aux évènements de ce genre. »
Tout comme il est parfois difficile de mobiliser les adultes, de ne pas se laisser gagner par le pessimisme et surtout de résister face aux détracteurs qui voient leur petit confort dérangé par ces initiatives. Malgré quelques moments de découragement et de fatigue, Elena Lucaci reprend toujours le combat grâce à la force du collectif des parents des Cerisiers. (Trad : Clémence Lheureux)