L’histoire du communisme dans les écoles
La décision était prise suite à une recommandation du rapport final de la Commission présidentielle d’analyse de la dictature communiste en Roumanie. L’élaboration du programme scolaire a été suivi par la parution d’un manuel d’histoire du communisme destiné aux élèves des deux dernières années d’étude de lycée; il a été rédigé sous l’égide de l’Institut d’Investigation des crimes du communisme en Roumanie et la mémoire de l’exil roumain dont l’ancien président exécutif Adrian Muraru nous en dit davantage: « Nous essayons d’entrer dans les détails de ce régime qui a couvert la période 1947-1989 : vie quotidienne, économie, vie culturelle, minorités, régime politique, répression etc. Certes, concentrer tous ces thèmes s’est avéré une tâche ardue. Toutefois, on a essayé de privilégier les textes courts et de nombreuses sources historiques: documents d’archives et d’histoire orale. Le manuel est accompagné d’un DVD contenant des images d’archives de la chaîne publique de télévision, datant de 1988. A notre avis, c’est un instrument très bien réalisé qui donne la possibilité aux élèves de se renseigner tous seuls. On n’a pas voulu faire de la propagande ou encore imposer une certaine vision de l’histoire du communisme en Roumanie. D’où le titre du manuel «Une histoire du communisme» car il se peut qu’il y en aient plusieurs, compte tenu de la personne qui l’étudie ou encore de l’aspect examiné».
Christine Leșcu, 05.03.2014, 13:10
La décision était prise suite à une recommandation du rapport final de la Commission présidentielle d’analyse de la dictature communiste en Roumanie. L’élaboration du programme scolaire a été suivi par la parution d’un manuel d’histoire du communisme destiné aux élèves des deux dernières années d’étude de lycée; il a été rédigé sous l’égide de l’Institut d’Investigation des crimes du communisme en Roumanie et la mémoire de l’exil roumain dont l’ancien président exécutif Adrian Muraru nous en dit davantage: « Nous essayons d’entrer dans les détails de ce régime qui a couvert la période 1947-1989 : vie quotidienne, économie, vie culturelle, minorités, régime politique, répression etc. Certes, concentrer tous ces thèmes s’est avéré une tâche ardue. Toutefois, on a essayé de privilégier les textes courts et de nombreuses sources historiques: documents d’archives et d’histoire orale. Le manuel est accompagné d’un DVD contenant des images d’archives de la chaîne publique de télévision, datant de 1988. A notre avis, c’est un instrument très bien réalisé qui donne la possibilité aux élèves de se renseigner tous seuls. On n’a pas voulu faire de la propagande ou encore imposer une certaine vision de l’histoire du communisme en Roumanie. D’où le titre du manuel «Une histoire du communisme» car il se peut qu’il y en aient plusieurs, compte tenu de la personne qui l’étudie ou encore de l’aspect examiné».
A présent, le cours facultatif d’histoire du communisme est enseigné dans 146 établissements scolaires du pays. Selon les estimations, il est choisi en option par près de 3000 élèves chaque année. De même, l’Institut d’investigation des crimes du communisme en Roumanie et la mémoire de l’exile roumain met en place des stages de formation pour les professeurs d’histoire, car enseigner cette discipline exige des connaissances et des méthodes un peu différentes de celles utilisées dans l’enseignement de l’histoire générale. Le besoin d’informations est important, comme en attestent les sondages d’opinion sur la période communiste.
Une étude commandée en 2010 par l’Institut susmentionné faisait état d’une position ambivalente des Roumains sur la période communiste et ses significations. 47% des sondés considéraient le communisme comme une bonne idée, mal appliquée alors qu’un peu moins de 30% affirmaient que le communisme avait été une idée erronée. Trois ans plus tard, en décembre 2013, dans un autre sondage d’opinion 47,5% des Roumains considéraient Nicolae Ceausescu comme un personnage politique ayant joué un rôle positif dans l’histoire de la Roumanie, contre 46,9% qui le qualifiait de personnage négatif. Des pourcentages similaires sont à retrouver aussi dans le cas de Gheorghe Ghoerghiu – Dej, le prédécesseur de Nicolae Ceausescu à la tête du Parti communiste roumain.
Ceci étant, les opinions exprimées par les élèves avant une classe d’histoire du communisme ne sauraient surprendre personne. Mihai Stamatescu enseigne l’histoire dans une école de la ville d’Orsova; il est aussi un des auteurs du manuel d’histoire du communisme: « En général, l’élève recueille ses informations notamment au sein de la famille, ou encore auprès des voisins, de la communauté élargie, et moins dans les médias. Ces informations sont pour la plupart celles véhiculées dans l’espace public ; elles sont du type: « C’était bien à l’époque de Ceausescu car j’avais un emploi ou j’avais un logement ». Les enfants viennent à l’école avec toutes ces informations et, du coup, ils se rendent compte que ce qu’ils savaient ne correspond plus à la réalité. Car les explications délivrées pendant cette classe ou celle d’histoire récente nous dévoilent la réalité sous une autre lumière. Les élèves constatent tous seuls que les nostalgies des parents ne sont pas portent pas sur le régime communiste mais plutôt sur leur propre jeunesse. Certes, si on leur fournit des arguments, des preuves, si on leur lance le défi d’aller aux sources historiques, si on leur explique ce que la manipulation, la propagande veulent dire, ils comprendront sans aucun doute ce que leurs parents ont vécu. Et ils sont prêts à réfléchir et à critiquer tout ce qui est arrivé à cette époque-là. »
Au fur et à mesure que les élèves suivent ce cours, ils commencent à mieux comprendre les différents aspects de leur vie quotidienne et ils sont de plus en plus intéressés par ce sujet. D’ailleurs, c’est toujours par une approche étroitement liée aux problématiques actuelles que l’on se propose d’enseigner l’histoire du communisme aux élèves plus jeunes. Mihai Stamatescu explique: « Nous avons rédigé un document intitulé «Les droits de l’homme dans l’histoire récente de la Roumanie», constatant qu’il était possible de discuter du communisme avant l’âge de la majorité. Ce document s’adresse aux élèves de collège, mais les enseignants du primaire peuvent eux aussi s’en servir. Du moment où les enfants étudient la discipline appelée «Culture civique», nous estimons que la meilleure approche pour leur fournir des informations sur le régime communiste est celle des droits de l’homme. Il y a beaucoup de professeurs de collège qui utilisent notre dossier. Il n’a pas de programme scolaire attaché, et ne s’adresse pas uniquement au profs d’histoire, mais à tous ceux qui enseignent des disciplines appartenant aux sciences humaines et sociales. »
Certes, un seul cours optionnel pendant les deux dernières années de lycée ne pourra pas changer la vision de toute la société. A part les activités scolaires, il faudrait avoir aussi d’autres initiatives qui parlent du communisme au large public.
Andrei Muraru, président exécutif de l’Institut d’investigation des crimes du communisme en Roumanie et de la mémoire de l’exil roumain, nous parle de l’impact de ce cours: « Ça dépend aussi de nos actions en tant que société. L’Institut de la mémoire nationale de Pologne, notre homologue, compte plus de 2000 employés, alors que nous n’avons que 36. Nos collègues polonais disposent d’un budget de 60 millions d’euros, alors que nous ne bénéficions que d’un million. L’institut polonais existe depuis 1999 et son travail commence à peine à porter ses fruits, après 10-15 ans d’investissements massifs dans l’éducation. Des investissements qui ne se sont pas limités aux cours, mais qui ont également visé jeux pour enfants et adolescents, programmes scolaires, films, conférences, livres. Moins nous investissons, plus les sondages d’opinion transmettront des messages de nostalgie pour la période communiste, une nostalgie mélangée à la révolte à l’égard du pouvoir actuel. Tout dépend des ressources que la société investit dans ce domaine. »
L’histoire du communisme est un des nombreux cours optionnels disponibles dans les lycées d’enseignement général et technologiques de Roumanie. Elle ne figure pas sur la liste des cours proposés par les lycées professionnels. (trad. : Alexandra Pop, Valentina Beleavski)