Les aînés valent leur pesant d’or
Certains clichés dangereux ont vu le jour dans la société roumaine. Parmi eux, l’idée qu’il est presque impossible de retrouver du travail après 45 ans. Par conséquent, nombreux sont ceux qui, malgré leur mal-être au travail, ne se pressent pas pour trouver un autre emploi, partant du principe que personne ne voudra d’eux. D’autres, sans emploi, et qui ont déjà essuyé plusieurs refus à l’embauche, ont perdu confiance en eux et n’ont plus la motivation de continuer à chercher du travail. Existe-t-il vraiment une malédiction des plus de 45 ans ? Est-ce notre réalité désormais ? Ils ne peuvent pas trouver de travail après cet âge, dans une société qui évolue, il est vrai, à une vitesse vertigineuse ? Quelles qualités et compétences doit présenter un candidat de plus de 45 ans pour espérer se faire embaucher ? Et qu’est-ce qui l’empêche d’avancer ? Raluca Dumitra, Directrice Marketing du groupe eJobs, explique :
Luiza Moldovan, 13.10.2021, 08:15
Certains clichés dangereux ont vu le jour dans la société roumaine. Parmi eux, l’idée qu’il est presque impossible de retrouver du travail après 45 ans. Par conséquent, nombreux sont ceux qui, malgré leur mal-être au travail, ne se pressent pas pour trouver un autre emploi, partant du principe que personne ne voudra d’eux. D’autres, sans emploi, et qui ont déjà essuyé plusieurs refus à l’embauche, ont perdu confiance en eux et n’ont plus la motivation de continuer à chercher du travail. Existe-t-il vraiment une malédiction des plus de 45 ans ? Est-ce notre réalité désormais ? Ils ne peuvent pas trouver de travail après cet âge, dans une société qui évolue, il est vrai, à une vitesse vertigineuse ? Quelles qualités et compétences doit présenter un candidat de plus de 45 ans pour espérer se faire embaucher ? Et qu’est-ce qui l’empêche d’avancer ? Raluca Dumitra, Directrice Marketing du groupe eJobs, explique :
« Il est vrai que les candidats de plus de 45 ans sont ceux qui ont le plus de défis à relever sur le marché de l’emploi. L’une des raisons principales, c’est leur manque d’aisance avec les outils numériques, à la différence des nouvelles générations. Les questions de la flexibilité et de la volonté de sortir de sa zone de confort, de découvrir autre chose, sont aussi moindres chez les candidats de cette tranche d’âge. A l’inverse, il ne faut pas oublier qu’ils présentent aussi de nombreux atouts. Par exemple, leur grande expérience, qu’ils peuvent partager ensuite avec les plus jeunes de leur équipe. Ils ont aussi beaucoup d’endurance et sont très ponctuels. »
Autrefois, on parlait d’apprentissage sur le tas, littéralement de « voler le métier », en roumain, donc de l’apprendre en regardant quelqu’un qui le pratique. Aujourd’hui on parle d’observation (shadowing, en anglais). C’est du pareil au même : le plus âgé transmet son savoir au plus jeune, et il est d’ailleurs très possible que l’inverse soit vrai aussi. En somme, un employé de plus de 45 ans a plus de chances de conserver son poste (ou d’en trouver un nouveau) s’il est disposé à partager son expérience avec les autres. Après tout, il a lui aussi sûrement « volé » le travail de quelqu’un d’autre pour commencer. Ou plutôt, il a sûrement fait de l’observation. Raluca Dumitra raconte :
« Il est évident qu’il existe une grande différence en termes de connaissances et d’expérience, et c’est tout naturel, entre les candidats âgés de plus de 45 ans et les plus jeunes. Mais il est possible d’en faire un atout. Il faudrait créer des programmes dans lesquels les plus jeunes feraient de l’observation, pour profiter de l’expérience des plus âgés. Tout le monde pourrait en profiter, les plus jeunes, comme ceux âgés de plus de 45 ans, qui pourraient partager leurs connaissances et ainsi se sentir valorisés au sein de l’entreprise. Et bien sûr, cela représenterait aussi un avantage pour l’employeur. »
Les candidats de plus de 45 ans présentent aussi des inconvénients. Ils sont souvent plus rigides et certains ne sont pas disposés à revoir leur salaire à la baisse pour un nouvel emploi. Mais voyons ensemble, avec Raluca Dumitra, quels sont les avantages :
« Les employeurs préfèrent le plus souvent faire appel à des plus jeunes sans expérience, et ce pour des raisons très simples. D’abord, parce qu’ils peuvent les former selon leurs critères, ce qui, pour être honnête, est beaucoup difficile avec les candidats de plus de 45 ans. En effet, plus nous vieillissons, plus il est difficile de faire preuve de flexibilité et de se plier aux attentes des employeurs. D’autre part, il est évident que la question financière entre aussi en compte. Les candidats de plus de 45 ans ont, pour la plupart, des prétentions salariales qu’ils ne veulent pas revoir à la baisse. Il est donc souvent plus rentable pour l’employeur d’embaucher un candidat sur un poste junior avec un salaire moindre, qui sera formé et modelé pour correspondre aux besoins de l’employeur. Bien évidemment, embaucher et former un jeune ne veut pas dire qu’il fera toute sa carrière dans la même entreprise. C’est un risque que l’employeur est prêt à prendre. A l’inverse, on sait que cela représente un risque moindre chez les candidats de plus de 45 ans, car ils sont beaucoup plus stables dans leur choix de carrière. »
La dernière étude réalisée par eJobs a mis en évidence certains aspects positifs pour la génération des plus de 45 ans. Les voici :
« Je ne crois pas que 45 ans rime forcément avec difficultés. Il est vrai que ces candidats rencontrent des difficultés lorsqu’il s’agit pour eux de s’intégrer dans une équipe plus jeune. Ils le reconnaissent eux-mêmes. Il est donc évident qu’il existe un conflit générationnel en ce sens, une différence de mentalité qui engendre des problèmes de communication. Dans le cadre de notre étude la plus récente, 42 % d’entre eux ont reconnu ne pas avoir de sujet de conversation en commun avec leurs collègues plus jeunes, et avoir l’impression que c’est à cause de la différence d’âge. C’est encourageant de voir que ces candidats de plus de 45 ans sont prêts à faire ces concessions pour obtenir un meilleur emploi. Près de 45 % d’entre eux affirment être prêts à effectuer une reconversion professionnelle si cela s’avère nécessaire pour l’obtention d’un poste plus intéressant. 16,5 % seraient même prêts à revoir à la baisse leur salaire pour un poste qu’ils considèrent plus prometteur. 8,4 % seraient prêts à partir travailler à l’étranger, et 7 % dans une autre ville de Roumanie. 7 % ont répondu être disposés à apprendre à se servir d’un ordinateur pour travailler. Mais il ne faut pas négliger qu’environ 16 % d’entre eux refuseraient tout compromis, même pour un meilleur poste. »
L’une des meilleures solutions pour les candidats de plus de 45 ans qui cherchent un travail reste la reconversion professionnelle. Raluca Dumitra ajoute que les Roumains acquièrent ainsi de nouvelles compétences, découvrent un nouvel environnement de travail et gagnent en confiance :
« Dans l’idéal, il faudrait que de nombreuses entreprises emploient des candidats de plus de 45 ans qui partageraient leur savoir, leurs compétences et leur expérience professionnelle avec les plus jeunes. Tout le monde sortirait gagnant de ce genre de programme. Par ailleurs, j’espère voir de plus en plus de candidats entamer la reconversion professionnelle que 45 % d’entre eux affirment vouloir effectuer. Ils doivent aussi être conscients que leurs compétences sont aussi utiles dans d’autres domaines que le leur. Et surtout, il faut qu’ils comprennent qu’en 2021, le numérique n’est plus un effet de mode, mais bien une condition sine qua non à l’embauche. Ceux qui n’ont pas les compétences numériques nécessaires ont moins de chances que les autres d’être recrutés. Et c’est valable pour toutes les catégories d’âge, pas seulement les plus de 45 ans », a conclu notre interlocutrice, Raluca Dumitra.
(Trad.: Charlotte Fromenteaud)