Le bénévolat, une passion
Associé dans un premier temps avec les prestations de travail dites patriotiques imposées par le régime communiste, le bénévolat a eu du mal à se frayer un chemin au sein de la société démocratique roumaine. Il a fallu attendre plus d’une bonne dizaine d’années après la chute du communisme pour que la Roumanie oublie son passé et se dise prête à contribuer gratuitement à l’amélioration de la qualité de la vie de son peuple. Une nouvelle génération insuffisamment marquée par le régime de Ceausescu, parallèlement à des programmes européens censés encourager l’engagement social – voilà la recette à succès du bénévolat en Roumanie, en plein essor depuis 2014, année où il s’est vu, enfin, consacrer une première loi censée le défendre et l’encourager.
Christine Leșcu, 04.10.2017, 13:11
Concrètement, cela fait trois ans déjà que les activités bénévoles sont reconnues officiellement comme expérience professionnelle même si elles ne sont pas prises en compte au moment de la retraite. Du coup, elles permettent aux jeunes en quête d’emploi d’ajouter un grand bonus dans leur CV, en mobilisant les communautés à canaliser leurs énergies et leurs ressources pour s’entraider toutes seules au lieu d’attendre le soutien de l’État.
Un exemple en ce sens nous est offert par l’association ArtTour Roumanie. Epaulée par le Centre national pour la promotion touristique de Predeal et le Centre de secours en montagne de la station homonyme, cette ONG a procédé au rebalisage de 19 trajets dans les massifs montagneux de Baiului, Piatra Mare, Postavaru et Bucegi. Un projet qui se nourrit aussi bien de l’amour et du respect pour la nature que du souhait d’encourager la communauté locale à privilégier les randonnées pédestres en haute montagne, comme nous le dit Octavian Bodron, adjoint du président de ArtTour.
Octavian Bodron: « Personnellement, je suis un passionné de la montagne. Dès que j’ai un peu de temps pour moi, j’en profite pour m’y rendre. Du coup, j’aimerais bien que les gens soient mieux informés sur les dangers que cache la montagne afin qu’une fois sur place, ils courent moins de risques et profitent au maximum de l’air frais, des trajets sûrs, en évitant les possibles menaces.».
L’enthousiasme contagieux d’Octavian Bodron a fait que d’autres jeunes le rejoignent dans ses actions censées protéger la montagne et les montagnards.
C’est le cas, par exemple, de Ionela: «Je ne suis pas adhérente à ArtTour, mais seulement une copine d’une des adhérentes. Mais, j’aime bien cette ONG, j’apprécie son travail et ses projets et dès que le temps me le permet, j’en profite pour leur donner un coup de main. Je fais partie de cette catégorie de montagnards apprentis qui a besoin de savoir à tout moment le trajet à suivre. Je trouve essentiel que les parcours soient proprement balisés pour limiter les risques de se perdre ou de tomber sur un ours. A part ça, je suis préoccupée aussi par l’écologie. A voir autant de déchets jetés à droite et à gauche, cela me met hors de moi. Après, j’essaie de me calmer en me disant qu’au lieu d’exprimer ma colère, mieux vaut ramasser les déchets. Finalement, ce n’est pas si difficile que ça. Plus dur est d’éduquer tous ces usagers de la montagne et de les déterminer à protéger la nature. Je ne sais pas comment on devrait agir pour faire bouger les choses.»
Le ramassage des déchets et le balisage des sentiers ne sont pas les seules missions bénévoles que Ionela fait en dehors de ses heures de travail : « J’ai un job et une vie qui n’ont aucun rapport avec le bénévolat. Mais j’ai choisi de lui consacrer une bonne partie de mon temps libre. Je confectionne des produits faits main, je soutiens une ONG qui travaille avec les enfants placés. Pour moi, ce qui compte dans la vie, c’est de pouvoir faire mon choix. Au moment où je décide de faire telle ou telle chose, c’est parce que je peux et je veux la faire. Le bénévolat est un choix et je me réjouis de voir de plus en plus de personnes le privilégier en fonction de leurs passions et de leurs préoccupations. Après, il est important d’essayer de coopter aussi nos amis pour être plus nombreux et pour aider les autres, en nous aidant nous-mêmes».
A l’heure où l’on parle, de plus en plus de montagnards passionnés réclament des parcours balisés afin d’encourager les randonnées en haute montagne qui, disent-ils, perdent de leur popularité face à d’autres loisirs. Une réalité qui pousse beaucoup de jeunes à se réunir au sein des associations censées protéger la montagne et la nature.
A 21 ans, Florin fait partie du GEST, le groupe éducationnel pour la jeunesse de Predeal qui se donne pour mission la création des trajets balisés et la collecte des déchets : «Ma première randonnée en montagne, je l’ai faite en compagnie de mon père. Je n’avais que 3 ou 4 ans et on s’est mis à escalader le sommet de Piatra Mare à la recherche de rhododendrons. Ce fut le début. Par la suite, j’ai commencé à faire des trajets avec Predeal comme point de départ avant de m’aventurer dans les monts Bucegi. J’ai fini par m’inscrire dans l’Association GEST, ce qui m’a permis de mieux découvrir la montagne avec ses pour et ses contre. Ils sont peu nombreux les pays qui peuvent s’enorgueillir d’avoir des montagnes aussi belles que les nôtres, des paysages magnifiques et des parcours si intéressants. Je voudrais convaincre le plus de monde possible d’aller à la montagne, pas forcément pour faire le balisage des trajets ou pour ramasser les déchets. Mais juste pour se donner la chance de découvrir à quel point il est fantastique de pouvoir marcher dix heures à travers les forêts, en escaladant les rochers avant de s’installer sous une tente, faire le feu et s’évader tout simplement du quotidien».
Aux dires d’Octavian Bodron, l’optimisation des trajets dans la région de Predeal sera suivie par d’autres actions similaires menées dans d’autres régions du pays. Tout cela dans le cadre d’un projet unique intitulé ReMarking Romania – ReBaliser la Roumanie. Tous les bénévoles sont les bienvenus. (Trad. Ioana Stancescu)