La santé au féminin
Il suffit de regarder les statistiques concernant le tabagisme et la consommation d’alcool: 73,4% des femmes ne fument ni ne boivent, tandis que du côté des hommes le pourcentage dépasse à peine les 36%. En revanche, les hommes font plus d’attention au sport et à l’alimentation:16% d’entre eux affirment pratiquer une activité physique et consommer régulièrement des fruits et légumes, un style de vie adopté par seulement 7,4% des femmes. Ce sont là quelques-unes des conclusions concernant la santé du dernier rapport de l’Institut européen pour l’égalité de genre basé à Vilnius.
Christine Leșcu, 01.11.2017, 17:02
Il suffit de regarder les statistiques concernant le tabagisme et la consommation d’alcool: 73,4% des femmes ne fument ni ne boivent, tandis que du côté des hommes le pourcentage dépasse à peine les 36%. En revanche, les hommes font plus d’attention au sport et à l’alimentation:16% d’entre eux affirment pratiquer une activité physique et consommer régulièrement des fruits et légumes, un style de vie adopté par seulement 7,4% des femmes. Ce sont là quelques-unes des conclusions concernant la santé du dernier rapport de l’Institut européen pour l’égalité de genre basé à Vilnius.
Fondé sur les priorités politiques de l’UE, l’indice examine la situation dans tous les 28 pays membres dans six domaines principaux (travail, argent, savoir, temps, pouvoir et santé) et donne un aperçu dans deux autres domaines (violence contre les femmes et inégalités croisées). Chaque pays pris en compte par le baromètre se voit attribuer un score sur une échelle de 0 à 100, le maximum correspondant à une égalité totale de genre. Quand on parle santé, les chiffres que l’on vient de présenter mettent en lumière des différences de genre par rapport à son propre bien-être. Il suffit de penser aux garçons qui se voient souvent encouragés à boire et à fumer pour correspondre à une image de la masculinité, telle que créée par la société.
Du coup, une discussion sur la santé entraînera une autre sur les rôles que jouent les femmes et les hommes au sein de la même communauté. Zuzana Madarova de l’Institut européen pour l’égalité de genre:« Pour les femmes, les normes sociales de genre afférentes à leur santé diffèrent de celles des hommes. Il suffit de penser, par exemple, à l’image de la femme moderne qui met beaucoup de pression sur les épaules des Européennes. De nos jours, la plupart des femmes travaillent, tout en restant les principales responsables du foyer. C’est ça la réalité pour nombre d’entre elles. On ne saurait être surpris de constater que, par rapport aux hommes, les femmes ont moins de temps pour des activités sociales, pour les loisirs, le sport ou encore les activités culturelles. C’est la raison pour laquelle les politiques publiques de santé doivent tenir compte du genre.».
Bien qu’elle vivent 5 ans de plus que les hommes, les femmes n’ont pas toujours une très bonne santé. Un des aspect qui joue beaucoup dans les statistiques européennes est certainement lié à l’accès aux soins médicaux, affirme Zuzana Madarova : «A regarder de près les différents groupes sociaux, on se rendra vite compte que ce sont les personnes présentant une déficience qui se heurtent au plus grand nombre d’obstacles, quand il s’agit de l’accès aux soins de santé. Vient ensuite le groupe des parents célibataires. On pourrait affirmer que les mères seules ont plus de mal à accéder aux services médicaux. Or, à l’heure où l’on parle, l’UE recense plus de 9 millions de parents célibataires, dont 85% sont des mères.
Sur l’ensemble des femmes de l’UE, celles de Roumanie se trouvent en queue de peloton quant il s’agit de leur santé. Notre pays s’est vu accorder seulement 70,4 points pour le critère «santé», un score bien en dessous d’une moyenne européenne de 87,4 points. On ne saurait donc nous déclarer surpris de constater que la Roumanie occupe la première place pour ce qui est de la mortalité due au cancer du col de l’utérus. Elle occupe aussi une des premières places du classement en matière de mortalité maternelle ou de décès dus au cancer du sein. Une situation bien dramatique et surtout très triste vu que, de nos jours, il existe des moyens de prévention. Un vaccin pourrait diminuer considérablement le risque de cancer du col de l’utérus, tandis qu’une mammographie faite régulièrement serait capable de dépister à temps les tumeurs du sein.
Ana Măiță, cordinatrice de l’ONG «Les mères pour les mères», milite en faveur d’une campagne de vaccination des jeunes filles contre le papillomavirus, responsable du cancer du col de l’utérus- et d’une autre, de dépistage du cancer du sein. A la tête également de l’Association SAMAS, Ana Maita affirme avoir enregistré un succès qu’elle voudrait partager avec nous: «Grâce à l’implication de plusieurs sociétés médicales et associations non gouvernementales, on est arrivé à convaincre le Conseil national de l’audiovisuel d’inclure parmi les annonces qui passent à la radio et à la télé un message sur l’importance de l’allaitement exclusif des bébés pendant leurs 6 premiers mois de vie. C’est essentiel pour leur évolution. Et puis, il est prouvé que l’allaitement a des bénéfices pour la santé de la mère aussi. Les études démontrent que les femmes qui allaitent leurs bébés pendant un an tout au moins voient diminuer de 30% le risque de faire un cancer du sein».
Afin de dépister à temps ce type de cancer, il est conseillée aux femmes de plus de 40 ans de passer régulièrement une mammographie, opine Ana Maita: «Bien que le Ministère de la Santé ait mis en place un programme de dépistage, nombre de femmes n’y ont pas accès. Soit parce qu’elles ignorent complètement l’existence de cette opportunité, soit parce qu’elles n’en saisissent pas les bénéfices. Généralement, les politiques publiques devraient s’orienter plus efficacement afin d’assurer une bonne santé des femmes. Du coup, il serait essentiel qu’elles mettent l’accent sur la prévention, la vaccination, l’éducation pour la santé dans les écoles et au sein des communautés, surtout sur l’éducation sexuelle depuis l’adolescence. Chaque année, 20% des femmes roumaines qui s’apprêtent à mettre un enfant au monde ont leur premier rendez-vous chez le gynéco au moment de l’accouchement. Pas de consultation prénatale dans les conditions où en Roumanie, ces contrôles sont généralement pris en charge par la Sécu».
L’absence d’éducation sanitaire et l’accès plutôt limité aux soins médicaux mis à part, c’est plutôt le rôle social qui de la femme roumaine qui explique sa santé souvent fragilisée, affirme Ana Maita: «En Roumanie, ce sont surtout les femmes qui portent le fardeau des tâches domestiques. C’est d’ailleurs la principale raison pour laquelle elles n’ont pas le temps de prendre soin d’elles. Les statistiques nous apprennent que la plupart des femmes souffrant d’un cancer se sont fait diagnostiquer à un stade plutôt avancé. Elles décident de voir un médecin au dernier moment quand parfois, il est déjà trop tard pour se faire sauver la vie».