La rentrée universitaire face au marché immobilier
Christine Leșcu, 10.10.2018, 12:53
Chaque début doctobre marque, tradition oblige, la rentrée universitaire. Alors que les statistiques européennes relèguent la Roumanie sur la dernière marche du classement en termes de nombre de diplômés de lenseignement supérieur, soit 25,6% de la tranche dâge 30-34 ans, les dernières années lon arrive à faire encore moins bien. Si en 2009, les universités roumaines dénombraient plus de 870.000 étudiants roumains, lannée universitaire 2016-2017 nen comptait plus que 383.000. En guise de consolation, la Roumanie se hisse sur la 5e place européenne en termes de nombre détudiants inscrits dans des universités à létranger.
Pour ce qui est de ceux qui choisissent de poursuivre leurs études en Roumanie, ils nont que lembarras du choix entre les grands centres universitaires des villes importantes, tels ceux de Bucarest, Cluj, Iași ou Timișoara. Vu que cest là que se ruent des étudiants venus de quatre coins du pays, quen est-il des places dans les campus et des loyers des studios dans ces villes ? Pour mieux comprendre de quoi il retourne nous sommes allés à la rencontre dAlina Simion, la présidente de lAssociation des étudiants de lUniversité de Bucarest, lune des plus recherchées du pays. Alina Simion :« LUniversité de Bucarest compte près de 5.300 places dans le campus même. Les places sont attribuées entre les différentes facultés, compte tenu du nombre dinscriptions. Notre université compte plus de 30.000 étudiants, donc les places du campus ne peuvent pas suffire. Il a fallu trouver un système de sélection, et ce dernier est fondé principalement sur les moyennes des étudiants, en secondaire sur des critères sociaux et médicaux. Evidemment, il faut monter un dossier. »
Et bien que ces dix dernières années, de nouvelles places ont été construites dans le campus, leur nombre demeure toujours en-deçà des besoins. Le campus principal se trouve à Grozăvești, et il est lun des plus connus du pays. Il compte 33 bâtiments, dont 26 appartiennent à lUniversité polytechnique, alors que les 7 restants appartiennent à lUniversité de médecine. Dautres campus sont éparpillés à travers la ville, soit près de facs, soit en banlieue. A part les campus, lautre solution pour trouver un logement est évidemment de louer, voire dacheter en ville, sur le marché libre, des studios, sinon de vrais appartements. Quoi quil en soit, à lapproche de la rentrée universitaire, la demande explose. Nous abordons le sujet avec lexpert immobilier Radu Zilișteanu:« Il sagit dun phénomène bien connu, commun à toutes les grandes villes universitaires: à lapproche de la rentrée, lon constate une hausse de la demande et, avec, des prix. Il sagit dun phénomène présent depuis belle lurette, mais cette année, le marché a été influencé par un autre facteur, de nature exceptionnelle, laugmentation du taux des prêts immobiliers. Avec cela, laccès au crédit a diminué, et la demande pour les immeubles en location sest accrue, un phénomène exceptionnel à rajouter au phénomène saisonnier de la rentrée universitaire. Alors, face à cette hausse des prix, les étudiants font de plus en plus appel aux colocations, et sorientent vers la location dappartements de 3 à 4 pièces, dont le prix, proportionnellement, est moindre que sils louaient chacun un studio. »
Les estimations des experts tablent sur une hausse de 20% du loyer des studios, à périodes comparables. Il ne reste pas moins que ce genre de solution nest accessible que pour une certaine frange des étudiants, qui disposent des ressources en conséquence. Il faudrait débourser de 75 à 200 € pour louer un studio sur le marché, alors que les prix de location dans les campus de lUniversité polytechnique peuvent varier de 24 à 35 €, en fonction de la saison, charges comprises, pour les étudiants boursiers, et de 49 à 64 € pour les autres. Les loyers dans le campus de lUniversité de Bucarest sont encore plus modiques. Les prix pratiqués sur le marché et loffre relativement limitée constituent des obstacle à un accès aisé des étudiants aux studios ou aux apparts dans la ville. Voilà ce que nous dit à ce sujet Alina Simion:« Il y en a qui se le permettent, mais cela demeure marginal. La plupart de mes amis logent dans les campus. Les prix sont bons, surtout pour ceux qui se font aider par leurs parents. Et même les étudiants qui travaillent ont du mal à pouvoir payer 150 € de loyer par mois. Pour un étudiant, cest cher. Moi, je loge dans le campus depuis quatre ans. Je ne pourrais pas assumer un loyer en ville. Je me demande même ce que je vais faire, comment jarriverai à joindre les deux bouts cette année, une fois que jaurai fini ma maîtrise. Cest plutôt dur, il faut sentretenir seul, puis aller aux cours et étudier. Tôt ou tard, gérer les deux, cest limite. »
Sils avaient le choix, les étudiants jetteraient leur dévolu sur les locations en ville, parce que, dans les campus, les conditions ne sélèvent pas toujours à la hauteur de leurs attentes. Lhygiène, la présence parfois de petits rongeurs, les salles deau partagées constituent autant dinconvénients et auxquels, malheureusement, ils se retrouvent confrontés année après année. Alina Simion:« Les conditions précaires dans les campus ne sont pas un secret. Au fil des ans, divers projets ont été lancés pour remettre en état et moderniser ces bâtiments. Mais la bureaucratie omniprésente au niveau universitaire a été le plus souvent un frein pour mener à bien ces initiatives. Le mobilier est neuf, les matelas aussi. Pour rafraîchir la peinture, ce nest pas la fin du monde, les étudiants savent très bien le faire eux-mêmes. Dans le campus de Grozavesti, les salles de bains ont aussi été remises à neuf. Mais le fait quelles soient partagées, cela crée de linconfort, cest certain. »
Une solution de dernière heure semble se frayer un chemin. Il sagit des campus privés. Là, les prix et les conditions de vie font le juste milieu entre les vieux campus publics et les logements mis en location dans la ville. Comme quoi, il ne faut jamais désespérer.
(Trad : Ionut Jugureanu)