La génération invisible
NEET : ni étudiant, ni employé, ni stagiaire. Ce concept, apparu dans lUE il y a plusieurs années et désignant une catégorie de personnes inactives sur le marché de lemploi, qui ne suit aucune forme déducation et ne participe à aucun cours de formation professionnelle, a été adopté aussi par la législation roumaine. Pourtant, malheureusement, ceux quil désigne ignorent le plus souvent les solutions offertes par lEtat pour redresser leur situation. En outre, cette catégorie de personnes échappe aux statistiques, aussi les représentants de la société civile ont-ils appelée ces jeunes « la génération invisible ».
Christine Leșcu, 27.07.2016, 14:33
NEET : ni étudiant, ni employé, ni stagiaire. Ce concept, apparu dans lUE il y a plusieurs années et désignant une catégorie de personnes inactives sur le marché de lemploi, qui ne suit aucune forme déducation et ne participe à aucun cours de formation professionnelle, a été adopté aussi par la législation roumaine. Pourtant, malheureusement, ceux quil désigne ignorent le plus souvent les solutions offertes par lEtat pour redresser leur situation. En outre, cette catégorie de personnes échappe aux statistiques, aussi les représentants de la société civile ont-ils appelée ces jeunes « la génération invisible ».
En 2013, lInstitut national de la statistique estimait à 440 mille le nombre des jeunes de moins de 25 ans qui se trouveraient dans cette situation – soit 17% des jeunes de cette tranche dâge, contre une moyenne de 12,5% sur lensemble de lUE. Sur ce nombre de jeunes inactifs, 80 mille seulement figuraient sur les listes de lAgence nationale pour lEmploi. En Roumanie, le taux de chômage des jeunes entre 25 à 29 ans a progressé ces dernières années, se chiffrant à 24,6% en 2014, contre 17,6% en 2007.
Ces jeunes proviennent de milieux sociaux différents et ont leurs problèmes spécifiques. Carolina, par exemple, a 15 ans, elle a abandonné lécole en 8e – soit avant la fin du secondaire – , et depuis, elle travaille à la ferme de ses parents dans la zone rurale du comté de Galaţi. Elle explique : « Ma mère ne peut plus travailler et je dois laider constamment. Jai des sœurs et des frères partis à létranger, mais ils ont leurs propres problèmes, alors nous ne faisons pas appel à eux. »
Ayant interrompu ses études avant la fin de la scolarité obligatoire, Carolina na aucune qualification et pas encore lâge qui lui permettrait de se faire embaucher: « Jai essayé de trouver quelque chose dans les environs. Jai aidé une femme qui ne pouvait plus travailler, mais au bout de deux mois jai renoncé pour ne pas laisser ma mère seule à la maison. Je tente de trouver un emploi, je cherche partout, mais pour linstant je nai rien trouvé, car je nai pas encore 18 ans. Jai une sœur à Tecuci, dans lEst du pays. Elle travaille dans un bistrot et il est possible que jy aille, si elle a besoin de moi. »
Cătălin se trouve dans une situation similaire. Il a abandonné le lycée à 17 ans. A présent il a 19 ans et il travaille à la ferme de ses parents, toujours dans un village du comté de Galaţi. Il a trois sœurs cadettes. Comment passe-t-il dhabitude ses journées? « Je me lève le matin à 7:00 – 7:30 et je commence par donner à manger et à boire au bétail et aux volailles. Je coupe du bois et je fais tout ce qui est nécessaire. Et ça se répète tout le temps, il ny a pas de jour où je sois libre. Je me suis inscrit à lAgence départementale pour lemploi, pourtant je nai encore aucune réponse. Je me suis inscrit, cest tout. Je nai suivi aucun cours de qualification, je nai rien fait dautre… Il ne se passe rien chez nous et dans la zone. Pour linstant je nai aucun revenu, uniquement ce que je gagne en faisant des travaux quand cela se présente. »
Il a dû abandonner lécole care le transport et les fournitures scolaires étaient trop chers pour ses parents. Pourtant, Cătălin souhaiterait retourner, à un moment ou donné, à lécole, obtenir une qualification et un emploi: « Ce que je souhaite le plus, cest davoir un emploi. Je ferais nimporte quel travail, pourvu que je sois embauché quelque part et gagner largent dont jai besoin. Quel que soit lemploi, jessaierai de faire le travail. »
Tous les jeunes NEET ne sont pourtant pas dans la même situation que nos deux interlocuteurs. Leur diversité est mise en évidence par une récente étude réalisée par la Coalition dONGs pour les droits des jeunes. Veronica Ştefan, représentante de la Coalition, nous fournit quelques exemples : « Il y a ceux qui abandonnent précocement lécole, ceux qui ont terminé le lycée mais nont pas passé le bac et il y a ceux qui ont terminé leurs études supérieures, ont un diplôme ou ont même fait un mastère, mais nont pas trouvé demploi. Il y a donc des sous-catégories et les problèmes qui se posent à chacune ne sont pas les mêmes. Les problèmes auxquels est confronté un jeune de 22 ans qui sort de luniversité sont différents de ceux que doit affronter un jeune de 15 ans qui a abandonné lécole avant davoir terminé sa scolarité obligatoire. Les filles constituent une de ces sous-catégories. 18% des jeunes filles de moins de 25 ans se trouvent dans cette situation vulnérable, taux supérieur à celui des jeunes NEET, filles et garçons confondus. Chez les personnes de sexe féminin entre 25 et 29 ans, le taux atteint 30%. »
Aux catégories des personnes de sexe féminin et des jeunes du milieu rural que la famille nencourage pas à continuer leurs études sajoute celle des jeunes ayant terminé des études universitaires. Veronica Ştefan: « Ceux qui ont fait des études supérieures choisissent de rester à la maison, pour attendre de meilleures opportunités ou un emploi qui corresponde à leurs études. Durant cette période dattente ils sont entretenus par leur famille. Il y a aussi les étudiants qui ont abandonné leurs études justement parce quils devaient sentretenir, sacheter un logement, avoir soin de leur famille. Enfin, il y a la catégorie des jeunes mères, qui restent à la maison élever leurs enfants. Or, le système de soutien aux jeunes mères laisse à désirer, surtout pour ce qui est de leur réintégration sur le marché de lemploi. »
Afin de venir en aide à toutes ces catégories et sous-catégories, lUE a adopté en 2013 le dispositif « Garantie pour la jeunesse ». Lacte réglementaire par lequel ce dispositif est adapté à la situation de Roumanie et en vertu duquel des fonds communautaires auraient dû être versés à Bucarest est en vigueur depuis deux ans. Malheureusement, il na pas encore été appliqué et la plupart des jeunes concernés nen ont pas entendu parler.
Comment « La Garantie pour la jeunesse » aurait-elle dû fonctionner en Roumanie ? Veronica Ştefan explique : « Au bout de 4 mois dinactivité, un jeune devrait se faire enregistrer à lAgence départementale pour lemploi afin de recevoir une opportunité : une formation professionnelle, la réintégration au système denseignement ou un emploi. Pourtant, pour linstant, ce système ne fonctionne pas, il na pas encore été mis en œuvre en Roumanie. Il est resté sur le papier et il est appliqué uniquement dans le cadre de certains projets pilote. »
A part lapplication de la législation concernant la « Garantie pour la jeunesse » et le déblocage du financement européen accordé aux NEET, les ONGs recommandent une approche adaptée à chaque sous-catégorie, pour mieux répondre à ses besoins spécifiques. (Trad. : Dominique)