Galeries marchandes et consommation.
Sept Roumains sur dix se rendent dans les galeries
marchandes au moins une fois par semaine, et sur les sept, trois sont des
femmes et quatre des hommes. Qui plus est, « si les messieurs se rendent
plus souvent dans des galeries marchandes, les dames y passent plus de temps.
Côté habitudes d’achat, les hommes dépensent 10 % plus que les femmes (soit 302
lei, environ 60 euros, contre 275 lei, soit 55 euros) ». Ce sont les
résultats d’une étude réalisée par Reveal Marketing Research. L’explication de
ce comportement réside dans le fait que les hommes achètent surtout de la
technologie, qui, on le sait tous, est plus chère. Mais les données figurant
dans cette recherche sont encore plus surprenantes. Par exemple, conformément
aux clichés, on pourrait s’attendre à ce que le nombre de femmes soit plus
élevé que celui des hommes parmi les visiteurs des galeries marchandes. Puis,
le rapport de 7 sur 10 semble assez élevé, à le comparer au pouvoir d’achat des
Roumains.
Christine Leșcu, 06.09.2023, 01:23
Sept Roumains sur dix se rendent dans les galeries
marchandes au moins une fois par semaine, et sur les sept, trois sont des
femmes et quatre des hommes. Qui plus est, « si les messieurs se rendent
plus souvent dans des galeries marchandes, les dames y passent plus de temps.
Côté habitudes d’achat, les hommes dépensent 10 % plus que les femmes (soit 302
lei, environ 60 euros, contre 275 lei, soit 55 euros) ». Ce sont les
résultats d’une étude réalisée par Reveal Marketing Research. L’explication de
ce comportement réside dans le fait que les hommes achètent surtout de la
technologie, qui, on le sait tous, est plus chère. Mais les données figurant
dans cette recherche sont encore plus surprenantes. Par exemple, conformément
aux clichés, on pourrait s’attendre à ce que le nombre de femmes soit plus
élevé que celui des hommes parmi les visiteurs des galeries marchandes. Puis,
le rapport de 7 sur 10 semble assez élevé, à le comparer au pouvoir d’achat des
Roumains.
Mais en approfondissant l’analyse pour y ajouter aussi d’autres
facteurs tels la proximité, les explications commencent à refaire surface et
c’est le sociologue Dan Petre qui nous les présente :
« D’abord, dans le cas de la
Roumanie et principalement concernant Bucarest, à l’opposé des autres capitales
européennes, les galeries marchandes sont plus souvent situées à l’intérieur de
la ville. Dans d’autres capitales européennes, les centres commerciaux sont situés
à la périphérie des villes, et la proximité joue un rôle très, très important.
Deuxième raison : à ce que je me rappelle, nous sommes tête du classement
de la superficie de centre commercial par personne en Europe (en mètres carrés).
Donc les centres commerciaux s’étendent sur une superficie beaucoup plus
importante. Et un troisième point, c’est l’aspect culturel. Le centre commercial
offre des expériences, voire des opportunités multiples d’expériences.
C’est-à-dire que les clients s’y rendent pour couvrir un besoin utilitaire ou
pour faire des achats pour la famille, mais ils arrivent aussi à faire des achats
personnels, principalement des vêtements. J’ai vu dans cette étude que les
vêtements sont les plus recherchés. Mais les clients souhaitent socialiser
autour d’un café ou d’un repas. Le centre commercial est actuellement un lieu
qui réunit toute une série d’expériences différentes. »
Et pourtant, aller au mall n’est pas seulement une
expérience fonctionnelle ou pragmatique, mais une expérience émotionnelle. Même
si les raisons immédiates sont pratiques – telles les courses – il y a aussi
des raisons purement subjectives, telles faire une petite randonnée ou bien
socialiser dans un café ou un restaurant. Puis, la récente enquête identifie
aussi plusieurs caractéristiques générationnelles. Selon l’étude, le montant
moyen que les Roumains dépensent lors d’une visite dans une galerie marchande
tourne autour des 70 euros. Les personnes qui dépensent le plus sont celles
âgées de 36 à 45 ans, soit les Milléniaux, avec quelque 74 euros, suivis de
près par ceux de la génération X, soit des personnes âgées de plus de 45 ans,
qui déboursent quelque 66 euros durant une visite au centre commercial. Ceux
qui dépensent le moins dans le cadre d’une session d’achats sont les membres de
la génération Z, constituée par les jeunes de 14 au 25 ans, soit quelque 50
euros seulement.
Le sociologue Dan Petre explique cette situation par le besoin
des jeunes de socialiser, mais aussi par les revenus de chaque génération.
« On peut
observer clairement à partir des sommes d’argent dépensées quel est le niveau
des revenus de chaque génération à part. La génération des milléniaux qui est
actuellement celle qui a atteint son niveau potentiel maximum – emploi, accès
aux ressources, accès au pouvoir social – dépense le plus. Suit la génération X
qui a eu le temps d’accumuler des ressources. Et puis il y a la génération Z,
qui ne dispose pas encore de suffisamment de ressources, mais qui est en plein
essor. En revanche, cette dernière génération a plus de temps libre, ce qui
vient compenser en quelque sorte le manque d’argent. Elle passe le plus de
temps au mall, mais elle dépense le moins. On balance toujours entre le temps
et les ressources. »
Pour ce qui est du temps passé dans les galeries
marchandes, en Roumanie, 73 % des hommes s’y rendent plusieurs fois par
semaine, 23 % – 3 fois tout au plus par mois, et 4 % ont affirmé y aller moins
d’une fois tous les trois mois. En revanche, 67% des femmes visitent souvent
les galeries marchandes, 29 % – y vont environ 3 fois par mois et seulement 4 %
des Roumaines s’y rendent moins d’une fois par saison. En général, une visite
dans une galerie marchande dure 130 minutes environ.
Mises en corrélation avec les baromètres de la
consommation culturelle, ces données complètent le tableau des habitudes des
Roumains en matière de loisirs. La dernière étude à ce sujet remonte à 2019,
soit l’année d’avant la pandémie. A ce moment-là, 5 % des Roumains questionnés
avaient affirmé avoir vu un spectacle de théâtre, 5 % toujours avaient visité
des musées, 9 % s’étaient rendus au cinéma et 8 % avaient opté pour les
spectacles de divertissement. Evidemment, il faut aussi prendre en compte les
différentes catégories d’âge ou d’études, le milieu urbain ou rural, leur
situation économique et autres aspects. Par exemple, l’étude a révélé que de
nombreuses villes roumaines ne disposaient pas d’une salle de théâtre, ni de
cinéma, ni d’un musée, ni même d’une librairie. Il en va de même pour le temps
passé dans une galerie marchande: tout dépend des alternatives dont la personne
dispose.
Dan Petre explique:
« Il y a un éventail d’opportunités auxquelles
les gens ont accès et en fonction desquelles ils distribuent leur temps libre.
Plus on a d’opportunités, plus les gens en profitent. Rien qu’un exemple : les
festivals urbains, comme ceux de Bucarest. Ici, les principaux boulevards (comme
Calea Victoriei ou le boulevard Kiseleff) sont parfois fermés aux voitures et
deviennent des rues piétonnes qui proposent de nombreuses expériences à
l’intérieur de la ville. Par conséquent, de nombreux Bucarestois y vont pour le
street-food, pour les concerts, pour se balader tout simplement. Ils sont
vraiment nombreux à en profiter. Cela prouve qu’au moment où l’on a plusieurs
choix, nos besoins sont distribués. Et il y a évidemment des aspects
étroitement liés à la saison. De même, la structure de l’économie roumaine est
fortement axée sur les services, donc sur l’économie tertiaire, qui mène à la
consommation. Or, l’endroit optimal pour cette consommation c’est justement la
grande galerie marchande, qui est en fait une sorte de machine d’expériences de
consommation. Le tout, dans une économie qui est déjà ciblée sur la
consommation. Par conséquent, c’était tout à fait normal que les endroits
propices à la consommation intense se développent, aussi pour venir en aide aux
marques et aux producteurs ».
Tant que cette situation se maintient, force est de
tirer la même conclusion que les auteurs de cette étude : « les galeries
marchandes jouent un rôle important dans le style de vie des consommateurs et
leur succès sur le marché roumain est incontestable ». (Trad. Alex Diaconescu,
Valentina Beleavski )