Fêtes de fin d’année : bonheur ou dépression ?
Les fêtes de fin dannée constituent un moment particulier pour notre vie mentale, au cours duquel même les plus solides dentre nous peuvent connaître un effondrement mental provoqué par la pression sociale.
Luiza Moldovan, 13.12.2023, 14:26
5% de la population mondiale est en dépression, et il est fort probable que ce chiffre soit très en dessous de la réalité, toutes les personnes concernées n’étant pas officiellement diagnostiquées, note cette année la revue de business américaine Forbes dans un dossier sur cette maladie mentale silencieuse et extrêmement dangereuse. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, dans le monde, 280 millions de personnes sont dépressives. Or selon Forbes, il semble que la dépression ne touche pas tout le monde dans les mêmes proportions, par exemple les femmes et les communautés racisées, notamment noires et latino-américaines aux Etats-Unis, sont plus sujettes à la dépression que d’autres catégories de populations. Les femmes adultes en général sont plus susceptibles de faire face à une dépression que les hommes. Ce sont en effet elles qui portent la famille et font face aux difficultés, elles élèvent les enfants, prennent soin des personnes âgées, accomplissent les tâches quotidiennes, et en même temps doivent mener leur carrière professionnelle. Tout ceci ne leur permet pas de prendre soin d’elles-mêmes. Il semblerait également que la dépression puisse être héréditaire. Il ressort en effet d’une étude réalisée par l’Université Stanford que les personnes ayant des proches touchés par la dépression présentent un risque deux à trois fois plus élevé de développer eux-mêmes une dépression. Et il est très inquiétant de constater que l’âge des premiers épisodes dépressifs est tombé à douze ans.
Forbes note aussi que les fêtes de fin d’année constituent un moment particulier pour notre vie mentale, au cours duquel même les plus solides d’entre nous peuvent connaître un effondrement mental provoqué par la pression sociale.
Nous nous sommes entretenus avec la psychothérapeute Adina China-Birta qui nous a appris comment identifier la dépression saisonnière et comment en contrecarrer les symptômes : La dépression des fêtes, dit le « holiday blues », est un problème courant auquel n’importe qui peut être confronté à un moment ou à un autre et qui se manifeste par un inconfort émotionnel ou un état de tristesse qui apparaît au moment des fêtes, par exemple à Noël, à la saint Sylvestre ou juste après. Les symptômes peuvent être un état de tristesse, d’anxiété, de stress ou d’isolement social. Cette dépression peut être causée par différents facteurs comme le stress lié à la préparation des fêtes, la pression sociale, la solitude ou des souvenirs tristes liés à cette période. Que peut-on faire pour prévenir cette dépression des fêtes ? On pourrait commencer par se fixer des attentes réalistes. Ce serait très bien d’essayer de ne pas se laisser envahir par l’idée que les fêtes doivent être parfaites ou que nous devons être heureux de manière constante. Les films de Noël donnent à voir une réalité difficilement transposable dans notre vie quotidienne. On peut aussi planifier ce qu’on a à faire. Si on sait que tel ou tel aspect des fêtes nous affecte tout particulièrement, comme par exemple les courses de Noël, on peut les planifier attentivement et se poser des limites, c’est-à-dire définir un budget et une période dédiée aux achats et rester dans les limites qu’on s’était fixées. On peut aussi faire du bénévolat. Ça peut apporter un sentiment de satisfaction et nous aider à trouver un sens plus profond aux fêtes. Une autre chose qui peut aider à se remonter le moral c’est de faire du sport, et de prendre soin de soi. Une activité physique régulière peut améliorer l’état d’esprit par la libération d’endorphine. Il faut prendre soin de soi, se reposer et se nourrir correctement.
Mais pourquoi certains d’entre nous sombrent pendant cette période qui devrait être justement marquée par la joie et la détente ? Et comment distinguer un épisode de dépression classique d’une dépression saisonnière ? Adina China-Birta nous aide à y voir plus clair : La dépression des fêtes et la dépression proprement dite sont deux concepts distincts. La dépression proprement dite, également appelée dépression majeure, est une affection mentale plus grave, caractérisée par la persistance de symptômes significatifs, comme un état de tristesse de longue durée, la perte d’intérêt pour les activités habituelles, des variations de poids, des troubles du sommeil, une fatigue excessive, des difficultés à se concentrer et même des pensées suicidaires. Elle est très peu influencée par le facteur saisonnier ou par des évènements spécifiques, elle peut toucher un individu à n’importe quel moment de l’année. Si vous observez ces symptômes chez vous-même ou chez un proche pendant les fêtes, il est important de les prendre au sérieux et de chercher de l’aide. La consultation d’un professionnel de la santé mentale comme un psychologue ou un psychiatre peut être cruciale pour recevoir du soutien et un traitement adapté. Ainsi, oui, il est tout à fait possible qu’une personne qui ne souffre pas de dépression soit néanmoins confrontée à des symptômes dépressifs pendant la période des fêtes. Cette période peut véhiculer un stress supplémentaire, une pression sociale, des pensées tristes, de la solitude, ce qui peut déclencher ou aggraver des symptômes dépressifs chez certaines personnes. Il faut être conscient du fait que la dépression des fêtes peut toucher n’importe qui, même des personnes qui ne souffrent pas de dépression majeure. Il est essentiel de distinguer un état temporaire d’inconfort, associé à la période des fêtes et une dépression majeure qui nécessite souvent l’intervention d’un professionnel pour être prise en charge et traitée.
Voyons ce que nous pouvons mettre en place pour améliorer notre état d’esprit et peut-être même, sait-on jamais, apprendre à nous réjouir des fêtes de fin d’année.
Adina China-Birta: Voici quelques conseils pour vous si vous souffrez de dépression saisonnière. Commencez par respecter vos besoins émotionnels. Ecoutez votre corps et votre esprit. Si vous ressentez un besoin de repos ou de temps pour vous, offrez-vous ces moments sans vous sentir coupable. Il est important de reconnaître et d’accepter vos sentiments. Ce n’est pas anormal de ne pas se sentir heureux en permanence. Comprendre et accepter ses émotions peuvent être le premier pas vers la guérison. Ensuite, prévoyez des activités en plein air. Même quand il fait froid, ou plutôt surtout s’il fait froid, le temps passé dehors peut entraîner des bénéfices fantastiques pour l’état d’esprit. Essayez de profiter au maximum de la lumière naturelle. Maintenez une routine régulière qui laisse la place au sommeil, à une alimentation saine et à de l’exercice physique. Consommez des aliments riches en nutriments comme des fruits, des légumes, des protéines maigres et des céréales complètes. Une activité physique régulière libère des endorphines, ce qui contribue au bien-être mental. Il est également primordial de communiquer. Parlez à vos amis et à votre famille de ce que vous ressentez. Parfois, partager ses pensées peut amener réconfort et soutien. Socialisez avec des personnes que vous appréciez, même si c’est en ligne. Dressez une liste d’activités qui vous font plaisir et essayer de les intégrer à votre vie quotidienne. Qu’il s’agisse de lire, d’écouter de la musique, de cuisiner ou de danser, accordez du temps aux activités qui vous plaisent. Enfin, quand des pensées négatives vous envahissent, vous pouvez recourir aux techniques de pensée positive ou de pleine conscience pour vous aider à les gérer et à les dépasser. Si les symptômes persistent ou s’aggravent, il faut consulter un professionnel de la santé mentale, un psychologue ou un psychiatre, qui vous aidera à gérer cette dépression saisonnière.