Défis de la nouvelle année universitaire roumaine
Cette année, le premier octobre nest pas seulement le jour habituel de louverture de lannée universitaire – il est aussi, un moment de bilan et de mise en perspective pour lavenir. Cest également loccasion de fêter le 150 anniversaire de lUniversité de Bucarest, une des meilleures institutions denseignement de Roumanie. Dailleurs, le système public déducation universitaire a été unique, sinon dominant, durant une bonne partie du 20e siècle. Comment universités publiques et privées – ces dernières réapparues après 1990 – ont-elles évolué? Ont-elles le même niveau qualitatif?
Christine Leșcu, 01.10.2014, 14:12
Cette année, le premier octobre nest pas seulement le jour habituel de louverture de lannée universitaire – il est aussi, un moment de bilan et de mise en perspective pour lavenir. Cest également loccasion de fêter le 150 anniversaire de lUniversité de Bucarest, une des meilleures institutions denseignement de Roumanie. Dailleurs, le système public déducation universitaire a été unique, sinon dominant, durant une bonne partie du 20e siècle. Comment universités publiques et privées – ces dernières réapparues après 1990 – ont-elles évolué? Ont-elles le même niveau qualitatif?
Marian Staş, expert en éducation et professeur aux universités Harvard et de Bucarest, précise: « La réponse courte à cette dernière question est négative, pour au moins deux raisons importantes. Une pratique de 150 ans denseignement supérieur – comme cest le cas de lUniversité de Bucarest – est différente par rapport à celle des institutions créées il y a une quinzaine ou une vingtaine dannées. Par ailleurs, il sagit du débat public déjà engagé depuis un certain temps en Roumanie à légard de lactivité des universités privées, qui semblent être des usines à diplômes plutôt que de véritables écoles. Les étudiants des universités privées ont la possibilité dacheter leurs examens et leurs diplômes. Il nest pas moins vrai que cela se passe aussi dans certaines universités publiques, dune manière plus ou moins ouverte. Toutefois, jai rencontré aussi dexcellents professeurs et des étudiants passionnés dans lenseignement privé aussi. Et là il faut apporter une précision quantitative. Lenseignement privé de Roumanie pèse de 3 à 5% dans le système déducation roumain, une part très faible, donc ».
Quant aux nouveautés concernant les étudiants de cette année, elles figurent dans un décret d’urgence par lequel le gouvernement a modifié certaines réglementations prévues par la Loi de l’Education nationale. Si jusqu’à présent, il n’y avait que les universités à temps plein qui pouvaient organiser des programmes de doctorat, à partir de cette année, cette facilité est offerte aussi par le système d’enseignement universitaire à temps réduit. Un autre changement concerne la création par les universités de collèges tertiaires censés assurer la préparation du baccalauréat dans le cas des élèves ayant raté cet examen. Concrètement, les élèves admis dans des classes d’école post-lycéale créées au sein des facultés peuvent décrocher leur diplôme d’études supérieures à condition de réussir leur bac à un moment donné. Une prévision qui repose sur une situation des plus tristes à laquelle le pays est confronté depuis trois ans déjà : depuis 2011, seulement 40 à 50% des jeunes lycéens roumains ont réussi leur bac, pouvant s’inscrire à l’examen d’admission aux études universitaires.
Marian Stas : « Depuis 2011, moins de 50% des élèves de lycée décrochent leur diplôme de baccalauréat, ce qui permet à de moins en moins de jeunes de passer leur examen d’admission à l’université. Bien que prêts à accueillir un nombre croissant d’étudiants, ces dernières années, les professeurs ont assisté impuissants à la diminution de ce nombre. A cela s’ajoute un autre aspect, plus perfide encore : la baisse du niveau de tous ces élèves. Les jeunes bacheliers sont plutôt ignorants et ils ont du mal à répondre correctement aux standards imposés par les facultés. Il y a certains niveaux de compétences que les enfants ne maîtrisent pas. A la fin du collège, les élèves n’arrivent pas à satisfaire aux exigences imposées par le lycée, tout comme les bacheliers ne détiennent pas les compétences exigées par les universités ».
La question qui se pose est de savoir si la création de ces écoles post-lycéales est vraiment une solution au problème de la réussite au bac et de l’éligibilité pour des cours universitaires. Marian Staş: « A la rigueur, ce n’est pas une mauvaise idée celle que des enseignants universitaires mettent leur expertise professionnelle au service de la formation de tels jeunes. Pourtant, ce n’est pas là la vocation première des universités. Elles sont orientées vers la conceptualisation et les constructions intellectuelles plutôt que sur les exercices et les habiletés pratiques. Ces formations ciblées sont du ressort des écoles post-lycéales. Je suis curieux de voir comment ces jeunes formés dans des collèges tertiaires, non-universitaires accèderont à l’enseignement universitaire. Là, je tire la sonnette d’alarme, car, insuffisamment mis au point, les détails du cadre méthodologique prêtent à des interprétations arbitraires. Ainsi risque-t-on d’induire des comportements incorrects, en facilitant l’accès de ces jeunes à l’enseignement supérieur, alors que tous les critères de réussite scolaire au lycée ne sont pas remplis ».
Ceux qui souhaitent s’inscrire à ces collèges peuvent le faire dès cette année, vu que le gouvernement a demandé aux universités de dresser jusqu’au 20 octobre les listes des spécialisations et d’élaborer les programmes d’études. Plusieurs université se disent prêtes à créer des collèges de ce type. Parmi elles on retrouve des établissements d’enseignement supérieur renommés, tels l’Université de Bucarest, Babeş-Bolyai de Cluj, Alexandru Ioan Cuza de Iaşi ou l’Université Polytechnique de Bucarest. (trad.: Ioana Stancescu, Mariana Tudose, Andrei Popov)