Comment lutter contre le harcèlement scolaire ?
Christine Leșcu, 06.07.2022, 12:31
Après de nombreuses années de
débats entres les représentants des autorités, les ONG et les parents, le
gouvernement roumain adoptait, en 2019, une loi pour lutter contre le
harcèlement et la violence à l’école. Mais il a fallu attendre mai 2020 pour
que ses méthodes d’application soient à leur tour publiées, au début de la
pandémie, ce qui a rendu les choses encore plus difficiles. Ainsi, élèves et
personnels éducatifs ont continué à chercher des moyens de lutter contre le
fléau du harcèlement à l’école. L’un des projets les plus récents a été proposé
dans le cadre du Forum des enfants, organisé par l’association Salvaţi Copiii
(Sauvez les enfants) depuis déjà plus de 20 ans. Le projet offre un cadre
permettant aux enfants d’exprimer leur point de vue sur les causes du
harcèlement qu’ils ont identifiées dans leur école respective. L’aspect inédit
de ce projet réside dans le fait que les avis et recommandations des enfants
sont ensuite présentés aux autorités en mesure de les appuyer. En 2022, le
Forum des enfants s’est réuni à l’occasion de la Journée internationale de
l’enfant.
Mariana Moraru, l’une des coordinatrices du projet, nous raconte :
« Le
Forum s’est déroulé à Bucarest. Nous avons réuni 100 enfants venus de 14
départements différents, dont celui de Bucarest, pour parler du harcèlement en
milieu scolaire. Il existe aujourd’hui une loi garantissant aux enfants de
pouvoir se rendre à l’école sans avoir à subir de harcèlement ou de pouvoir
avoir des recours afin d’y faire face le cas échéant. Malheureusement, force
est de constater que malgré cela, le harcèlement existe toujours. A l’occasion
de la Journée internationale de l’enfant, le 1er juin, l’association
Salvaţi Copiii a publié une étude révélant qu’en Roumanie, un enfant sur deux
est exposé à une forme de violence physique, psychologique, voire sexuelle.
L’étude révèle non seulement que le problème persiste, mais que le nombre de
victimes de violences verbales ou sociales est stable, sinon même en augmentation. Une
étude similaire portant sur le harcèlement a été menée en 2017 sur environ 1
300 000 enfants. Si l’on en croit les résultats, 400 000 étaient impliqués dans
des situations de harcèlement ou de cyber-harcèlement, et 200 000 étaient
victimes de violences physiques. Malheureusement, le harcèlement sous toutes
ses formes est plus que jamais présent, et il est certain que la pandémie n’est
pas étrangère au nombre croissant de victimes. »
Les chiffres sont donc alarmants.
Le nombre croissant de cas signalés est aussi dû à l’existence de cette loi
contre le harcèlement, mais aussi au courage des parents, des élèves et du
personnel éducatif qui, de plus en plus souvent, dénoncent ces situations.
Mariana Moraru, représentante de l’association Salvați Copiii :
« En
réalité, la loi joue un rôle important dans cette augmentation du nombre de
victimes de harcèlement. C’est une bonne chose que ces cas soient dénoncés.
Malheureusement, l’histoire a démontré que c’est loin d’être suffisant. Une loi
n’a jamais suffi à améliorer le système. Il faut aussi mettre en place le
soutien nécessaire pour que les mesures prévues par la loi soient appliquées.
Par exemple, en travaillant au cours de cette année scolaire avec différents
établissements, j’ai constaté que le personnel éducatif, comme les parents et
les élèves, avait lui aussi besoin d’être informé sur le sujet. Une formation
sur les causes et les conséquences du harcèlement, les moyens de le détecter et
les façons d’intervenir directement. Beaucoup trop souvent, les élèves
craignent l’intervention des adultes et les conséquences engendrées par une
situation de harcèlement dans laquelle ils seraient impliqués. »
Quelles ont été les propositions
des élèves réunis au Forum des enfants afin de lutter contre le
harcèlement ? Mariana Moraru nous donne les détails :
« Les
élèves ont considéré qu’il était avant tout nécessaire d’améliorer le climat
scolaire. Ils ont aussi trouvé des idées encourageant la coopération entre le
gouvernement, les ministères et les organisations afin de rendre plus sûre la
communauté éducative. Les propositions des enfants se fondaient sur les besoins
des adultes, mais aussi sur celui des enfants de jouir d’un soutien
socio-émotionnel. C’est surtout sur ce dernier point que se sont concentrées
les discussions : le besoin de soutien émotionnel. Les enfants se sont
interrogés pour tenter de déterminer comment les différentes autorités
étatiques pouvaient apporter un tel soutien. Les enfants ont été entendus et,
aidés par les modérateurs qui leur ont présenté les représentants de autorités,
ils ont souligné qu’il s’agissait également d’un évènement visant à encourager
la participation des enfants afin qu’ils puissent exprimer leurs besoins. Les
autorités se sont montrées à l’écoute, mais cela devient toujours plus
compliqué lorsqu’il s’agit de mettre les propositions en pratique. »
Voilà une belle occasion pour les
enfants d’exprimer leur point de vue et leurs besoins, et d’être entendus par
les ministres et les inspecteurs. Mais il est certain que les propositions
formulées auront besoin de temps avant de se concrétiser. (Trad : Charlotte Fromenteaud)