Châteaux inconnus de Roumanie
Il existe en Roumanie une multitude d’anciennes résidences extra-urbaines des élites locales, près d’un millier, érigées entre le XVIe siècle et la première moitié du XXe. Certaines ont été restaurées, d’autres sont dégradées et une troisième partie font l’objet de procès entre leurs héritiers. Il y a des châteaux dans les villes aussi, où ils abritent des musées ou accueillent des événements culturels.
Daniel Onea, 30.03.2017, 14:31
Il existe en Roumanie une multitude d’anciennes résidences extra-urbaines des élites locales, près d’un millier, érigées entre le XVIe siècle et la première moitié du XXe. Certaines ont été restaurées, d’autres sont dégradées et une troisième partie font l’objet de procès entre leurs héritiers. Il y a des châteaux dans les villes aussi, où ils abritent des musées ou accueillent des événements culturels.
Irina Leca, historienne de l’art, membre fondatrice et vice-présidente de l’Association ARCHÉ, fait partie de l’équipe d’une vaste plate-forme de recherche, monumenteuitate.org, qui vise aussi à mieux faire connaître les plus belles résidences nobiliaires extra-urbaines du pays.
Nous avons demandé à Irina Leca de nous proposer un top 3 des châteaux de Roumanie, en excluant pourtant les plus connus, à savoir: Bran, Peleş, Pelişor et le Château des Corvin : « C’est un véritable défi. J’essaierai de proposer des monuments représentatifs pour les grandes régions historiques. Dans le sud du pays, à une soixantaine de km de la capitale, il y a le Palais de Floreşti, situé à proximité de Ploieşti. Il a été construit par Grégoire Cantacuzène, surnommé « le Nabab », d’après les plans d’Ion Berindei. C’est un beau monument d’architecture datant du début du XXe siècle. Malgré son état de dégradation, c’est un site très pittoresque. Ses propriétaires actuels tâchent de lui insuffler une nouvelle vie en y organisant de nombreux événements culturels, le plus important étant le concours hippique Karpatia Horse Show, qui se tient en septembre. »
Irina Leca nous dirige ensuite vers l’ancienne principauté roumaine de Moldavie, dans l’est du pays, pour nous présenter le château du prince régnant Alexandru Ioan Cuza de Ruginoasa : « C’est un très bel exemple d’architecture néogothique, situé dans un splendide parc forestier. Récemment rénové, ce château abrite le Musée Cuza. Les visiteurs peuvent y apprendre davantage sur le prince élu simultanément en Moldavie et en Valachie, pour réaliser l’union des deux principautés roumaines, et sur son épouse, Elena Cuza. En faisant un petit saut en Transylvanie, nous nous arrêtons à une trentaine de km de Sighişoara, où se trouve le château de Criş. Son histoire commence au XVe siècle, selon les archéologues. C’est un magnifique monument d’architecture de la Renaissance et un des plus authentiques pittoresques à retrouver sur le territoire de la Transylvanie. Bien que peu connu du public, il est ouvert aux touristes depuis longtemps et il est en train d’être restauré. Il est géré par une fondation qui offre des tours guidés, pour faire découvrir aux touristes non seulement l’histoire du château, mais aussi le village saxon où il se trouve. Il avait appartenu à une famille nobiliaire magyare, bien que niché dans une zone essentiellement saxonne. Ensuite, dans le nord-ouest de la Roumanie, se trouve le château Károlyi de Carei, une sorte de « Peleş de la Transylvanie ». Récemment restauré grâce à des fonds européens et rouvert aux touristes en 2013, il a été transformé en musée. Il présente non seulement l’histoire de la région et de la famille Károlyi, mais aussi une vue d’ensemble des somptueuses résidences nobiliaires extra-urbaines des élites de l’Empire austro-hongrois. »
Irina Leca, historienne de l’art, membre fondatrice et vice-présidente de l’Association ARCHÉ, dit que la Roumanie peut entrer en compétition avec le marché extérieur avec une offre touristique pour visiter les châteaux. Il y a quelques dizaines de châteaux représentatifs : « La liste est assez grande, et un circuit de ces châteaux, qui sont même des monuments historiques, serait tout à fait faisable et très attractif pour le public étranger. Ce qui est aussi très intéressant, c’est que à l’instar des Français qui ont la Vallée de la Loire, nous avons aussi deux cours d’eau avec une multitude de châteaux sur leurs rives. Sur la vallée de la rivière Mureş, de Topliţa jusqu’à la sortie du pays, il existe des dizaines de châteaux ; certains peuvent être visités et sont très beaux, d’autres sont dans un état moins bon. Si on traverse les Carpates, il y a la Vallée de la rivière Trotuş. A Dărmăneşti, Dofteana, Comăneşti, il y a d’anciennes résidences nobiliaires particulièrement pleines de charme et très intéressantes. »
Sebastian Marcoci est l’administrateur du château Sturdza de Miclăuşeni, un bijou d’architecture dans l’est de la Roumanie, vieux de 600 ans et avec une riche histoire : « Il s’agit de la famille princière Sturdza, une famille très riche de Moldavie. Là, vous avez une belle histoire. George Sturdza et Maria Ghica construisent un château sur la structure de l’ancien manoir, en style néogothique. C’est quelque chose de spécial pour notre région. La construction a duré environ 24 ans. A l’intérieur, il est peint en style Art nouveau. Maria Ghica est née à Istanbul. C’est là qu’elle apprend à peindre des miniatures. C’est toujours là qu’elle a appris l’anglais et s’est mariée avec George Sturdza. C’était en 1869. Après la célébration de leur mariage, les deux font un voyage en Occident, en Allemagne, en France et en Autriche. A leur retour, ils décident de transformer leur manoir en le château de Miclăuşeni. »
Le domaine de la famille Sturdza a trois composantes essentielles : un parc forestier de 30 ha, le monastère et le château — soit les composantes spirituelle, culturelle et naturelle : « Le château peut être visité chaque fin de semaine, de 12h00 à 18h00. Des événements sont prévus tout au long de l’année, mais chaque année, début septembre, nous organisons un événement qui nous tient à cœur. C’est un festival qui s’appelle « Voyage dans les années 1900 ». Nous revenons dans le temps et créons une atmosphère d’époque au château et autour de lui. D’habitude, cela a lieu le premier ou le deuxième week-end de septembre. L’idée a appartenu aux touristes qui ont exprimé leur souhait de se costumer comme autrefois et de revivre la période des années 1900. Nous avons pensé à cette possibilité et avons proposé des costumes à louer ; en plus, les plats préparés à cette occasion respectent la gastronomie des années 1900. Il y a des véhicules d’époque, et des voitures tirées par les chevaux sont disponibles pour la promenade. Et nous organisons beaucoup d’ateliers thématiques. Il y a des spectacles avec des mélodies anciennes ou des chansons de l’entre-deux-guerres. »
La Roumanie accueille aussi une Foire internationale des châteaux, qui arrive à sa 3e édition en 2017. Elle aura lieu les 27 et 28 mai, au Château des Corvin de Hunedoara. (trad. : Dominique, Ligia Mihaiescu)