RRI Live!

Écoutez Radio Roumanie Internationale en direct

Mircea Eliade

Mircea Eliade a été, sans l’ombre d’un doute, une des grandes personnalités de la culture roumaine du vingtième siècle. L’éclectisme de ses passions, depuis l’histoire des religions et jusqu’à son engouement pour la littérature de fiction, ont fait de lui un auteur complexe, dont les thèses faisaient autorité à l’Université de Chicago, où il a été le titulaire de la chaire de l’Histoire des religions, de 1956 et jusqu’à sa mort, survenue en 1986.

Mircea Eliade
Mircea Eliade

, 03.08.2020, 00:23

Né le 9 mars 1907, à Bucarest, dans une famille aux origines moldaves, de la ville de Tecuci, Mircea Eliade se distingue déjà parmi ses camarades de classe. Il suit ses humanités au lycée « Spiru Haret », creuset de bon nombre de personnalités culturelle roumaines de l’entre-deux-guerres, parmi lesquelles mentionnons l’écrivain et journaliste Arșavir Acterian, l’écrivain et le poète Haig Acterian, le philosophe Constantin Noica ou encore le critique d’art Barbu Brezianu. Entiché de sciences naturelles, tout autant que d’alchimie et d’occultisme à l’époque de son adolescence, il se découvre une passion pour la littérature, à travers la découverte de l’œuvre monumentale d’Honoré de Balzac, auquel il voue un véritable culte, puis d’un contemporain, Giovanni Papini. Etudiant en Lettres et en Philosophie, Mircea Eliade soutient sa thèse, à l’Université de Bucarest, sur Tommaso Campanella, poète et philosophe utopiste italien.

Polyglotte sans complexes, Eliade deviendra l’un des historiens des religions les plus influents de son temps. Il signera plus de 30 ouvrages, traduits en 18 langues, portant notamment sur la persistance de la pensée mythique dans les sociétés modernes, sur la relation entre le sacré et le profane, sur le mythe des origines ou encore sur la pensée de type cyclique de l’homme traditionnel. Mais Eliade s’avère également un littéraire prolifique, auteur de 12 romans, dont « La nuit bengali » et « La forêt interdite » demeurent les plus connus. Enfin, Mircea Eliade est un mémorialiste passionné, témoin d’une génération culturelle d’exception, confrontée aux vicissitudes de l’époque mouvementée qu’elle est obligée de traverser. Eliade a par ailleurs été l’un des premiers orientalistes roumains. En effet, très jeune, il tombe amoureux de l’Inde, où il débarque de 1928, et qu’il ne quittera qu’en 1933. C’est là qu’il apprend le sanscrit et qu’il devient familier d’une spiritualité orientale foisonnante, au milieu d’une société imprégnée de sens religieux. C’est de son expérience indienne qu’il trouve l’inspiration de son premier roman, « La nuit bengali », dont le personnage principal, Maitreyi, n’est autre que la fille de son hôte et maître spirituel.

A son retour d’Inde, Eliade soutiendra sa thèse de doctorat sur les techniques du yoga. L’archive d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine recèle un document exceptionnel : l’interview de Mircea Eliade, réalisée en 1970 par Monica Lovinescu, célèbre critique littéraire et dissidente anticommuniste, chroniqueuse littéraire à la radio Free Europe. Dans son interview, Mircea Eliade parle de sa période indienne comme d’une période charnière, qui l’aidera à comprendre le sens de l’histoire, soit le dialogue des cultures. Son voyage passionnant à travers le monde des mythes et des croyances religieuses avait commencé là-bas, en Inde : « Depuis mon retour d’Inde, j’avais compris les limites du provincialisme culturel occidental. J’ai compris qu’il fallait nouer, surtout après la Deuxième guerre mondiale, des ponts entre les diverses cultures- occidentale, orientale, cultures archaïques. Qu’il n’existe pas de meilleure introduction à une autre culture que de comprendre ses traditions, la structure religieuse de cette culture. L’histoire des religions me semblait dès lors une première étape pour comprendre l’altérité, les autres cultures, dans une démarche respectueuse de l’autre, d’égal à égal, dans une démarche de dialogue. Et j’ai eu alors la certitude que mes recherches, mes ouvrages, allaient trouver un public réceptif, intéressé et attentif, parce que la réalité historique me donnait raison. »

Mircea Eliade s’est voulu un savant total, dans l’acception ancienne du terme, avant le cloisonnement de la science, de la philosophie et des lettres, dans leurs prés carrés respectifs. Certes, mieux connu pour ses recherches en l’histoire des religions, pour sa carrière universitaire aux Etats-Unis où il fonda, avec l’Allemand Joachim Wach, la Divinity School, Eliade garda le contact avec sa langue natale pendant ses longues décennies d’exil grâce à l’œuvre de fiction qu’il s’attacha à écrire. C’est par la littérature qu’il retournait régulièrement à ses origines roumaines, selon ses propres termes : « En faisant de la littérature, je retourne à mes origines, ce qui est normal au fond. J’utilise, pour écrire ma littérature, ma langue maternelle. J’ai besoin, pour ma santé mentale, d’écrire en roumain, de rêver en roumain. Je pourrais me traduire moi-même en français ou en anglais. Je pourrais probablement écrire directement mon œuvre de fiction dans ces langues, mais il est plus important pour moi ce désir intime que j’ai de garder le contact avec cette langue, avec ma propre histoire, soit l’histoire d’un Roumain qui a vécu et travaillé autant en Roumanie qu’à l’étranger. »

Quant au monde d’aujourd’hui, à la désacralisation rampante, et considéré par d’aucuns comme un monde vidé de sa substance religieuse, Mircea Eliade y décelait le sacré enfoui dans notre quotidien, un sacré qui restera omniprésent aussi longtemps que les hommes en auraient besoin :« Le besoin d’entendre une histoire, l’histoire mythique des origines, celle qui raconte le commencement du monde et de l’homme, les débuts de l’organisation sociale et ainsi de suite, cela fait partie de nos besoins fondamentaux. Ce besoin relève d’une structure de notre inconscient collectif. Je ne pense pas que l’homme puisse exister en tant que tel s’il était dépourvu de cette capacité d’écoute, de ce besoin de connaitre l’histoire, la sienne et celle du monde, au milieu duquel il est apparu. » Avec l’avènement du régime communiste en Roumanie, Mircea Eliade est forcé à l’exil en 1945. Il vivra d’abord à Paris et, après 1957, à Chicago, où il mourra le 22 avril 1986, laissant derrière lui une œuvre monumentale. Après la chute du communisme en Roumanie, il sera reçu post mortem à l’Académie roumaine, en 1990. (Trad. Ionuţ Jugureanu)

L’officiel du parti communiste roumain, le journal Scânteia /L’étincelle
Pro Memoria lundi, 04 novembre 2024

L’officiel du parti communiste roumain, le journal Scânteia /L’étincelle

La presse à l’époque communiste   Si la liberté de la presse était garantie depuis 1789 par l’article 11 de la Déclaration des...

L’officiel du parti communiste roumain, le journal Scânteia /L’étincelle
La Sécuritate et le KGB en divorce
Pro Memoria lundi, 28 octobre 2024

La Sécuritate et le KGB en divorce

  Le général Neagu Cosma, ancien chef de la direction de contrespionnage de la Securitate, racontait dans une interview de 2002, conservé par...

La Sécuritate et le KGB en divorce
Le destin du responsable communiste Vasile Luca
Pro Memoria lundi, 21 octobre 2024

Le destin du responsable communiste Vasile Luca

Occupés vers la fin de la Seconde Guerre mondiale par l’Armée rouge, les Etats d’Europe centrale et de l’Est se sont progressivement vus mis...

Le destin du responsable communiste Vasile Luca
Le parti communiste et la réforme agraire en Roumanie
Pro Memoria lundi, 14 octobre 2024

Le parti communiste et la réforme agraire en Roumanie

La propriété privée, démonisée par les communistes   Selon les thèses de Marx, il fallait bien que dans un Etat communiste la propriété...

Le parti communiste et la réforme agraire en Roumanie
Pro Memoria lundi, 07 octobre 2024

La flotte militaire roumaine durant la Seconde Guerre mondiale

L’histoire de la flotte militaire roumaine démarre au milieu du 19e siècle   L’histoire de la flotte militaire roumaine démarre au milieu...

La flotte militaire roumaine durant la Seconde Guerre mondiale
Pro Memoria lundi, 30 septembre 2024

Ana Pauker

Il fut un temps où le simple fait d’évoquer le nom de Ana Pauker faisait frissonner l’interlocuteur. Dans l’histoire du régime communiste...

Ana Pauker
Pro Memoria lundi, 23 septembre 2024

Nicolae Titulescu et la diplomatie roumaine dans l’Europe des années ’30

Les enjeux de la diplomatie   Il vaut mieux que les diplomates, et surtout les diplomates qui représentent les intérêts de petits Etats,...

Nicolae Titulescu et la diplomatie roumaine dans l’Europe des années ’30
Pro Memoria lundi, 16 septembre 2024

Le début des émissions de la BBC diffusées en langue roumaine

La section roumaine de la BBC voit le jour en 1939   Dans l’univers de la radio, BBC demeure un repère, synonyme d’intégrité et de...

Le début des émissions de la BBC diffusées en langue roumaine

Partenaire

Muzeul Național al Țăranului Român Muzeul Național al Țăranului Român
Liga Studentilor Romani din Strainatate - LSRS Liga Studentilor Romani din Strainatate - LSRS
Modernism | The Leading Romanian Art Magazine Online Modernism | The Leading Romanian Art Magazine Online
Institului European din România Institului European din România
Institutul Francez din România – Bucureşti Institutul Francez din România – Bucureşti
Muzeul Național de Artă al României Muzeul Național de Artă al României
Le petit Journal Le petit Journal
Radio Prague International Radio Prague International
Muzeul Național de Istorie a României Muzeul Național de Istorie a României
ARCUB ARCUB
Radio Canada International Radio Canada International
Muzeul Național al Satului „Dimitrie Gusti” Muzeul Național al Satului „Dimitrie Gusti”
SWI swissinfo.ch SWI swissinfo.ch
UBB Radio ONLINE UBB Radio ONLINE
Strona główna - English Section - polskieradio.pl Strona główna - English Section - polskieradio.pl
creart - Centrul de Creație Artă și Tradiție al Municipiului Bucuresti creart - Centrul de Creație Artă și Tradiție al Municipiului Bucuresti
italradio italradio
Institutul Confucius Institutul Confucius
BUCPRESS - știri din Cernăuți BUCPRESS - știri din Cernăuți

Affiliations

Euranet Plus Euranet Plus
AIB | the trade association for international broadcasters AIB | the trade association for international broadcasters
Digital Radio Mondiale Digital Radio Mondiale
News and current affairs from Germany and around the world News and current affairs from Germany and around the world
Comunità radiotelevisiva italofona Comunità radiotelevisiva italofona

Diffuseurs

RADIOCOM RADIOCOM
Zeno Media - The Everything Audio Company Zeno Media - The Everything Audio Company