L’industrie aéronautique roumaine à la fin de la Seconde guerre mondiale
Dans
la période de l’entre-deux guerres, la Roumanie était parvenue à bâtir sa
propre industrie aéronautique. En effet, dès le 1er novembre 1925, c’est
à Brașov qu’était fondée la société IAR, Industrie aéronautique roumaine, qui
demeure pendant des décennies le leader national de l’industrie aéronautique. Les
fondateurs étaient les Français de l’avionneur Blériot-Spad, du producteur
automobile Lorraine-Dietrich, de l’entreprise de matériel roulant Astra Arad,
mais aussi l’Etat roumain. Le 1er septembre 1938, l’Etat roumain avait
acheté la totalité des actions de l’entreprise, devenant unique propriétaire. IAR
allait alors être réorganisée, comptant dès lors deux unités destinées l’une à
la production des moteurs, l’autre à la production des avions. Avant la
nationalisation de l’entreprise survenue en 1948, pendant ses 23 années d’existence,
l’avionneur roumain parvint à étoffer une gamme variée de modèles d’appareils,
civiles ou militaires, y compris des avions de chasse, des bombardiers et des appareils
de reconnaissance, mais aussi des appareils d’agrément ou des avions-écoles.
Steliu Lambru, 02.01.2023, 10:43
Dans
la période de l’entre-deux guerres, la Roumanie était parvenue à bâtir sa
propre industrie aéronautique. En effet, dès le 1er novembre 1925, c’est
à Brașov qu’était fondée la société IAR, Industrie aéronautique roumaine, qui
demeure pendant des décennies le leader national de l’industrie aéronautique. Les
fondateurs étaient les Français de l’avionneur Blériot-Spad, du producteur
automobile Lorraine-Dietrich, de l’entreprise de matériel roulant Astra Arad,
mais aussi l’Etat roumain. Le 1er septembre 1938, l’Etat roumain avait
acheté la totalité des actions de l’entreprise, devenant unique propriétaire. IAR
allait alors être réorganisée, comptant dès lors deux unités destinées l’une à
la production des moteurs, l’autre à la production des avions. Avant la
nationalisation de l’entreprise survenue en 1948, pendant ses 23 années d’existence,
l’avionneur roumain parvint à étoffer une gamme variée de modèles d’appareils,
civiles ou militaires, y compris des avions de chasse, des bombardiers et des appareils
de reconnaissance, mais aussi des appareils d’agrément ou des avions-écoles.
La
production des moteurs, démarrée grâce à l’acquisition des licences françaises,
se développa avec de nouveaux modèles originaux. Les modèles les mieux connus
qui sortirent des mains des ingénieurs roumains de l’entreprise ont été l’avion
de chasse IAR 80 et le bombardier IAR 81, qui se sont distingués pendant la
Deuxième Guerre mondiale, aussi bien sur le front de l’Est, contre l’Union
soviétique, que sur le front de l’Ouest, après le mois d’août 1944, contre l’Allemagne
nazie. Mais le sort de l’entreprise IAR allait changer radicalement après l’occupation
de la Roumanie par l’Armée rouge fin 1944. Les Soviétiques mirent brutalement un
terme à la production d’appareils de vol de l’entreprise roumaine, reléguant
cette dernière au statut de simple atelier de maintenance. En 1948, dernier
coup dur pour l’IAR : l’entreprise, devenue entreprise mixte,
roumano-soviétique, allait devenir un fabricant de machines agricoles, abandonnant
du coup la production d’avions. Ce n’est qu’en 1968 que IAR renoue timidement
avec sa tradition et reprend la production d’avions. Après 1989, l’entreprise
reprendra son ancien nom et sa vocation initiale.
Les années
noires du producteur roumain d’aéronautique, celles marquées par l’immixtion de
la puissance occupante dans les affaires de l’entreprise, ont été remémorées en
1995 par l’ingénieur Teodor Gârnet, lors d’une interview conservée dans les
archives du Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine.
« Vous
savez, l’armée roumaine avait pris possession de 6 machines à Odessa, lorsque
nous avions occupé la ville. On les avait déplacées ici, mais elles n’ont
jamais été mises en fonction. Elles avaient besoin d’être réparées d’abord.
Donc, elles étaient conservées dans une remise jusqu’à ce que les Russes occupent
le pays. Il a fallu bien évidemment céder les machines. Une commission
militaire russe avait débarqué dans le bureau du directeur. Il y avait au sein
de cette commission un colonel, un capitaine, et puis, pour se montrer plus
convaincants, l’un avait sorti son révolver et avait commencé à taper avec la
crosse sur le bureau du directeur, lui enjoignant de faire marcher ces machines
au plus vite. On s’est démené et on l’a fait. Puis, il fallait qu’un délégué de
notre entreprise accompagne le convoi censé les retourner jusqu’à Odessa.
Personne n’en voulait. Moi, qui venais d’arriver à l’improviste d’une mission à
Câmpulung et qui n’étais pas dans la confidence, c’est moi qu’on a chargé d’accompagner
le convoi. Et ce fut une aventure cette mission, vous l’imaginez, dans les
conditions d’alors. J’avais tenté de graisser la patte au capitaine soviétique
qui nous accompagnait pour en être déchargé, mais cela n’a pas été possible. Mais
nous n’avons accompagné le convoi que jusqu’à Iasi. A partir de là, elles ont
été montées dans un train soviétique à destination d’Odessa. Seulement, les
Soviétiques n’avaient pas pris que leurs machines, celles qu’on leur avait
volées. Ils nous ont pris surtout nos machines à nous, celles qui étaient en
état de marche, les meilleures, y compris une machine importée. Ils ont pris
tout ce qu’ils avaient désiré, prétextant qu’on leur avait cassé leurs machines
à eux ».
La production
des moteurs d’avions de conception propre, comprenant des éléments novateurs, a
été l’une de grandes fiertés de l’entreprise roumaine. Tel fut le cas du moteur
IAR 7M, à la conception duquel l’ingénieur Teodor Gârneț a été directement
impliqué :
« Il
s’agissait d’un moteur qui développait une puissance de 350 chevaux. Il était
destiné aux appareils légers, de l’aviation utilitaire et sportive. Il s’agissait
surtout d’entraîner les pilotes. Aux premiers essais, le moteur avait développé
370 chevaux, bien mieux que ce que l’on avait prévu. Il ronronnait, pas de
vibrations, rien. Mais le bâtiment qui abritait le banc d’essai venait d’être
endommagé par un bombardement. Nous ne pouvions pas lui faire passer l’ensemble
des batteries de tests prévus. On se contentait de ce qu’on avait. Et de ce
modèle de moteur, l’on n’avait fabriqué que deux exemplaires, c’est tout. Un
seul a été monté sur un châssis d’avion, l’autre a été utilisé lors des tests.
Mais sachez que cette usine, ainsi qu’elle était outillée à l’époque, avec les
compétences dont l’on disposait, pouvait faire de la performance ».
Après sa refondation de 1971, IAR Brașov a
commencé à diversifier progressivement sa production, débutant par exemple la
production d’hélicoptères sous licence française sur son site de Ghimbav. La production
s’est ensuite étoffée, l’usine fabriquant des avions utilitaires, des planeurs
et des motoplaneurs. Enfin, après 1989, l’entreprise est entrée dans une phase
de modernisation. (Trad. Ionut Jugureanu)