Les pièces de monnaie des Daces
Avec l'arrivée des Romans au sud du Danube au 2e siècle avant notre ère, les Gètes se trouvent en contact direct avec leur civilisation et..leurs monnaies. Aussi apparaissent les premiers kosons.
Steliu Lambru, 18.12.2023, 10:12
Sur ce qu’était la population qui occupait
le territoire de la Roumanie actuelle avant l’arrivée des légions romaines de
Trajan en 105 de notre ère, les sources historiographiques demeurent assez
pauvres. Appelés Thraces, Daces ou Gètes, en fonction des auteurs et des
sources, ce peuple, ou cette multitude de populations apparentées, laisse
toutefois une trace certaine, qui survit plus de deux millénaires et jusqu’à nos
jours. Il s’agit d’une pièce de monnaie en or : le koson.
Se
trouvant encore à l’extérieur du monde gréco-romain, ce dernier déjà caractérisé
par une économie monétarisée, où les biens et les services trouvaient leur
équivalent en argent, le monde des barbares, tel que les Romans appelaient les
populations qui ne faisaient pas partie de la civilisation gréco-romaine agencée
autour de la Méditerranée, essaye de reprendre à son compte le fonctionnement monétaire
des leurs voisins Gréco-Romains. La première pièce de monnaie ainsi reprise par
les Gètes est la drachme ancienne du roi Philippe II, au 4e siècle
avant l’ère chrétienne. Ils s’en suivent d’autres pièces de monnaie, battues au
temps d’Alexandre le Grand et du roi Philippe III. Avec l’arrivée des Romans au
sud du Danube au 2e siècle avant notre ère, les Gètes se trouvent en
contact direct avec leur civilisation et..leurs monnaies. Aussi apparaissent
les premiers kosons.
L’historien et
numismate Mihai Dima, auteur et spécialiste des kosons, détaille l’origine de l’appellation
de cette pièce de monnaie, du nom du leader dac homonyme, qui avait participé en
l’an 44 avant notre ère au complot contre le roi dac Burebista, auquel il
succéda. Mihai Dima :
« Koson
est à l’origine un nom propre, le nom d’un souverain originaire de Dacie ou de
Thrace, repris ensuite par une pièce de monnaie en or. Plus tard apparaît une pièce
en argent frappé du même nom : Koson. La pièce en or, d’un diamètre compris
entre 18 et 22 millimètres, pèse environ 8,5 grammes. Sur l’avers l’on remarque
un aigle s’appuyant avec sa griffe gauche sur un sceptre, tenant dans l’autre la
couronne. Sur le revers de la pièce, l’on peut apercevoir trois personnages, un
consul et deux licteurs, un monogramme et le nom de la pièce de monnaie, koson,
en alphabète grec. »
Les pièces qui sont
parvenues jusqu’à nous ont souvent eu une histoire mouvementée. Mihai Dima :
« La
première mention que l’on fait de ces pièces appartient à Erasme de Rotterdam,
où il en parle dans une lettre datée de 1520 et adressée à l’évêque de Breslau.
Vu la date du courrier, la pièce de monnaie décrite par Erasme ne pouvait pas
être originaire du célèbre trésor découvert dans la rivière Streï en 1543, donc
à une date postérieure. Toujours avant cette découverte, l’on fait mention de
quelques pièces de koson d’or qui ornait un vase à usage liturgique qui se
trouvait jusqu’en 1557 dans l’église d’Alba Iulia avant d’arriver en Slovaquie,
à Nitra. Ces pièces auraient pu provenir d’un trésor découvert en 1491, qui soit
probablement la plus ancienne découverte de ce type, ces pièces étant les
seules qui aient survécu de cette découverte. »
Tracer l’histoire des
découvertes, souvent accidentelles, des trésors recelant des kosons d’or n’est
pas chose aisée. Mihai Dima :
« La
première découverte attestée officiellement d’un trésor comprenant des kosons d’or
a été réalisée au début du 19e siècle, en 1803, dans les monts
Godeanu, en Transylvanie par quelques habitants du village Vâlcelele Bune. Aussi,
le trésor découvert à l’occasion comprenait 400 pièces de 3 types différents, un
seul étant exempte de monogramme. Une année auparavant, en 1802, l’on avait
fait la découverte d’un autre trésor dans la même région, ce trésor ne comprenant
toutefois que de pièces d’or de typeLysimaque.
Or, c’est bien cette première découverte qui a sans doute mené à la seconde, mettant
la puce à l’oreille des habitants du coin, qui tentent leur chance en démarrant
des fouilles à la sauvette. Il se puisse toutefois qu’il y ait eu d’autres
découvertes qui n’aient pas été enregistrées, car les autorités autrichiennes
avaient été interpellées par l’accroissement inexpliqué du commerce d’or dans
la région, et elles avaient commencé à s’y intéresser de près ».
Les
découvertes ultérieures ont pris le chemin des musées, même s’il existe encore
un certain nombre d’exemplaires de koson qui font la joie des maisons de ventes
et des collections numismatiques privées. Quoi qu’il en soit, le koson demeure
le témoin doré d’une société ancienne vivant en marge de la civilisation
gréco-romaine mais qui tentait par mimétisme d’intégrer le fonctionnement de
cette dernière. Il constitue aussi une parabole sur la complexité de la
relation qui relie le centre à la périphérie.