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Le sous-marin « Le Requin » pendant la Seconde Guerre Mondiale.

Durant la Seconde Guerre Mondiale, les principales missions de combat de la marine militaire roumaine ont visé l’Union soviétique. Elles ont impliqué aussi les trois sous-marins roumains « Le Dauphin », « Le Marsouin » et « Le Requin ». Le plus grand d’entre eux, le Dauphin, a été l’unique à avoir coulé un navire russe, le cargo « Oural ». L’équipage du sous-marin « Le Requin » a rejoint les efforts de guerre de la marine roumaine et même si les hommes n’avaient pas réussi à s’engager dans des affrontements avec l’ennemi, ils ont participé à des missions d’espionnage et de dissuasion des opérations soviétiques en mer Noire.

Le sous-marin « Le Requin » pendant la Seconde Guerre Mondiale.
Le sous-marin « Le Requin » pendant la Seconde Guerre Mondiale.

, 08.08.2016, 14:22

Bâti aux Chantiers navals de Galati, entre 1938 et 1941, « Le Requin » avait une longueur de près de 70 mètres, et une largeur de 6 mètres et demi. Propulsé par deux moteurs Diesel de 800 chevaux chacun, auxquels s’ajoutaient les deux moteurs électriques de 600 chevaux chacun, le sous-marin était armé d’un canon naval de 88 mm, d’un canon anti-aérien de 20 mm et de six torpilles. Son équipage comptait 45 hommes. Alexandru Greceanu a été officier de la Marine royale roumaine et membre de l’équipage du « Requin ». Interviewé en 1995 par le Centre d’Histoire Orale de la Radiodiffusion roumaine, M Greceanu racontait ses missions à bord du sous-marin.

Vu les caractéristiques de la mer Noire, une mer fermée, le rôle des sous-marins a été limité à la protection des navires amis et au renforcement d’un blocus des ports ennemis. Ecoutons Alexandru Greceanu : « La première mission du sous-marin « Le Requin » a été un mélange entre une mission de guerre et une mission d’entraînement de l’équipage. C’était une patrouille au large des côtes de l’Anatolie pour dépister les routes commerciales en mer Noire, entre les ports russes et ceux de Turquie. Dans le cadre de cette mission, les 21 et 22 avril 1944, période durant laquelle les Nations Unies exerçaient une pression militaire, psychologique et politique sur Ankara pour qu’elle rejoigne le camp des Alliés, la Roumanie, alliée de l’Allemagne nazie, voulait s’assurer que la Turquie n’allait pas entrer en guerre du côté des Alliés. Nous avons reçu un radiogramme qui nous demandait de prospecter, c’est-à-dire de faire une visite de tous les ports turcs, mais bien entendu de ne pas y entrer. L’objectif était de voir quel était le port le mieux doté en termes d’équipement de chargement et de déchargement. Notre mission était de nous placer à l’entrée de ce port et si la Turquie entrait en guerre du côté des Nations Unies, nous devions lancer des torpilles dans les navires amarrés et bloquer ainsi les installations portuaires. Au bout de trois jours, on a identifié le port en question. C’était Sungula, port par le biais duquel la Turquie réalisait à l’époque 80%, même 90% de son trafic maritime et de ses exportations de charbon. C’était le principal port d’une région riche en charbon. Nous avons identifié 5 ou 6 navires, nous nous sommes placés à l’entrée du port, en passant par un barrage de mines et nous y sommes restés pendant 24 heures. Puis on a appris le refus de la Turquie de rejoindre le camp des Nations Unies en raison du fait que les Alliés n’avaient pas assuré la sécurité de ses frontières. C’est pour cette raison que notre mission a été changée et nous nous sommes dirigés vers le port de Batumi, pour le bloquer. »

Hormis les missions de patrouille, « Le Requin » devait être prêt à attaquer et à riposter au cas où il était repéré. Malgré l’importance stratégique relativement limitée de la mer Noire, son bassin était la scène d’une guerre des nerfs. Alexandru Greceanu : « La deuxième partie de la première mission, sur la côte du Caucase, n’a pas été une simple surveillance. Ce fut une période d’harcèlement parce que vu que les gros navires de la flotte soviétique étaient confinés dans leurs ports, les contre-torpilleurs ennemis partaient souvent en patrouille appuyés par l’aviation afin de dépister les sous-marins de la région. C’est pourquoi nous étions obligés de changer de position tous les deux ou trois jours, de changer de port pour que les chasseurs de sous-marins perdent notre trace. Ce qui plus est, vu que c’était le mois de juin, la nuit était courte, donc on ne disposait que de 3 – 4, voire 5 heures tout au plus par nuit pour refaire nos réserves en air frais. C’est uniquement durant cette brève période de temps que l’équipage pouvait faire toutes les opérations relatives à l’environnement à bord du sous-marin ».

Les missions du «Requin » sont devenues de plus en plus difficiles, à mesure de la montée en puissance de l’ennemi. Alexandru Greceanu évoque sa deuxième mission à bord du « Requin » près des côtes de l’URSS. :

« La deuxième mission s’est déroulée un mois plus tard. Le retour de la première mission a eu lieu le 15 mai et la mission suivante, démarrée le 15 juin, s’est achevée le 29 juillet. Elle a cherché pratiquement à bloquer les transports en provenant du Caucase à destination du port de Sébastopol, qui entre temps avait été repris par les Soviétiques. Il fallait perturber dans la mesure du possible les transports d’armement et de soldats vers la Crimée. Ce fut une période très difficile pour la simple raison que l’aviation anti-sous-marine et la flotte soviétique sortie du Caucase naviguait effectivement à une longueur d’un mille marin des côtes. Cette navigation côtière leur offrait une protection si efficace qu’il était carrément impossible de s’approcher des navires soviétiques. Tous les trois jours, nous étions dépistés, bombardés et obligés de dépasser en submersion la limite de profondeur maximale admise. A cause des bombardements, le revêtement en ciment des réservoirs d’eau potable a été endommagé et c’est pourquoi durant les deux dernières semaines de la mission, nos rations d’eau ont été limitées à une tasse par jour »

A la fin de la guerre, tant « Le Requin » que les deux autres sous-marins roumains ont été confisqués par l’URSS comme butin de guerre et utilisés en tant que source de pièces de rechange pour les navires de la flotte soviétique.

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