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Le rail et l’heure exacte

Les gens d’aujourd’hui prennent le concept d’heure exacte comme allant de soi. Notre temps est régi par des rendez-vous pris et par des tâches qui doivent être exécutées à des heures précises. Entourés de tant de montres et d’horloges, numériques ou mécaniques, nous savons à tout moment l’heure qu’il fait. Pourtant, ce savoir, cette maîtrise de l’heure n’est pas moins une donne de date récente, intimement liée à l’apparition et au développement du rail. Mesurer le temps avec précision, connaître l’heure à tout moment, respecter l’horaire établi, tout cela n’est pas sans lien avec le développement du chemin de fer, peut-être le premier et le plus important résultat de la révolution industrielle.

Le rail et l’heure exacte
Le rail et l’heure exacte

, 21.06.2021, 15:53

Les gens d’aujourd’hui prennent le concept d’heure exacte comme allant de soi. Notre temps est régi par des rendez-vous pris et par des tâches qui doivent être exécutées à des heures précises. Entourés de tant de montres et d’horloges, numériques ou mécaniques, nous savons à tout moment l’heure qu’il fait. Pourtant, ce savoir, cette maîtrise de l’heure n’est pas moins une donne de date récente, intimement liée à l’apparition et au développement du rail. Mesurer le temps avec précision, connaître l’heure à tout moment, respecter l’horaire établi, tout cela n’est pas sans lien avec le développement du chemin de fer, peut-être le premier et le plus important résultat de la révolution industrielle.

L’historien Dorin Stănescu nous aidera à détailler les aléas de cette relation construite entre le concept d’heure précise et la grande invention du 19e siècle. Car le rail, apparu en Angleterre en 1830, fera dire aux Britanniques : « Ce fut le cadeau que les Anglais ont fait à l’humanité ». Dorin Stănescu : « Dès le départ, les Anglais ont été confrontés à la question du timing, de la synchronisation de l’heure. Vous savez, au début, le trafic était modeste. Le déplacement se faisait sur une seule voie. Mais l’engouement rapide pour ce nouveau moyen de locomotion avait très vite soulevé le problème de la synchronisation horaire. Parce que les montres mal synchronisées des conducteurs de train ont provoqué des accidents terribles, avec des victimes et des dégâts conséquents, enfin, vous imaginez ce que cela pouvait être. »

Qui plus est, chaque ville vivait alors à son temps solaire. Qu’à cela ne tienne ! Les Anglais ont vite fait de trouver la parade. Dorin Stănescu : « Dès 1840, le capitaine Basil Hall avait proposé à ce que tous les offices de poste du royaume adoptent l’heure de Londres. La Poste a pourtant opposé une fin de non-recevoir à la proposition, osée en effet pour l’époque. Mais l’administration des chemins de fer avait tout de suite compris la part qu’elle pouvait en tirer de la proposition du capitaine Hall. Et très vite, une première compagnie, la Great Western Railway, introduit la même heure le long de ses rails. Ce fut l’heure de Londres, fournie par l’Observatoire astronomique de Greenwich. Ce sera dorénavant l’heure du chemin de fer britannique. »

Pour ce qui est de l’espace roumain, à la fin du 19e siècle, il se trouvait dans une course effrénée à la modernité, pour rattraper son retard technologique par rapport à l’Occident européen. La Roumanie ne tardera donc pas à embrasser, avec enthousiasme, la trouvaille anglaise. Dorin Stănescu nous le confirme : « Le chemin de fer fait son entrée en 1869. C’est lui qui favorisera, comme partout, l’utilisation du même fuseau horaire. Et l’on adopte rapidement le modèle anglais, où le fuseau qui a cours dans la capitale, à Bucarest, devient l’heure du pays. Certes, avant 1890, il n’y avait qu’un nombre assez modeste de trains, et le risque d’accidents était minime. Puis, en 1893, la France, l’Allemagne et l’empire d’Autriche-Hongrie adoptent le même fuseau. Et l’idée fait doucement son chemin en Roumanie aussi. L’heure de Bucarest sera établie, toujours en relation avec l’heure indiquée par l’Observatoire de Greenwich, grâce à la coopération entre deux institutions relativement nouvelles : les Chemins de fer et l’Institut météorologique roumains. Stefan Hepites, le premier directeur de ce dernier, fut la cheville ouvrière du projet. »

Standardiser et synchroniser l’heure nous a depuis évité bien de tragédies. Ce n’est que par la suite que l’on avait compris tout l’intérêt que l’on pouvait en tirer, dans le fonctionnement des entreprises et des institutions, ou encore dans notre quotidien. Dorin Stănescu : « Pour mesurer le temps, Stefan Hepites avait fait construire une salle méridienne, comme cela se faisait partout pour mesurer le temps. A la demande du gouvernement, il s’était déplacé en Allemagne, pour étudier le système utilisé là-bas. Une fois rentré à Bucarest, il proposa que l’heure exacte soit marquée tous les midis par des coups de canon. De la sorte, tout le monde pouvait régler sa montre. Cela se passait en 1895. Seulement, l’essai échoua. En effet, les coups de canon tirés depuis l’Observatoire de Bucarest ne pouvaient être entendus dans toute la ville. La solution finalement adoptée fut celle du télégraphe. Une connexion fut établie entre l’Institut météorologique et la gare la plus proche, la gare Filaret. Alors, tous les midis, l’heure exacte était envoyée par télégraphe à toutes les gares du pays. Très vite, la solution fut également embrassée par les PTT et par les autres institutions publiques. Vers l’an 1900, l’heure de Bucarest était adoptée à travers tout le pays. Un proverbe y était né à l’époque, qui voulait dire, en gros : « c’est la gare qui donne l’heure du pays ». Par ce proverbe, les gens reconnaissaient au fond le rôle du rail dans le processus de synchronisation du temps national. »

Mais ce changement somme toute technique a aussi bouleversé le quotidien des gens. Dorin Stănescu : « Concernant l’impact que cette standardisation horaire a eu dans un premier temps, l’on trouve trace dans la littérature de l’époque. Prenez, par exemple, les premiers romans de Bolintineanu, intitulés « Emanoil » et « Elena ». Prenez « Ciocoii vechi și noi », soit, en français, « Les boyards de l’ancien temps et les nouveaux riches », le roman de Nicolae Filimon, voire les nouvelles de Ion Luca Caragiale, notamment celle parue en 1899 et intitulée, à juste titre, « Le rail », où l’heure exacte devenait une véritable obsession. »

Dotées d’horloges performantes, les gares et le rail sont devenus le symbole de la rigueur et de la précision. Dès 1950, la radio publique avait repris le flambeau et ravi, du coup, la vedette au rail, et ce sera sur les ondes hertziennes que l’heure exacte sera dorénavant partagée avec tout un chacun. (Trad. Ionuţ Jugureanu)

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