La Valachie pendant le règne de Vlad l’Empaleur.
Surnommé Dracula, le prince Vlad l’Empaleur a régné en Valachie à trois reprises. Après un règne de quelques mois seulement, en 1448, il s’est réinstallé sur le trône de la principauté de 1456 à 1462 avant de reprendre une troisième fois les rênes du pouvoir en 1476. Au bout de deux mois seulement, Tepes allait tomber victime d’une conspiration et mourir à l’âge de 45 ans. Véritable personnalité de son temps, Tepes avait 25 ans quand il a repris, pour la deuxième fois, la couronne valaque, suite à l’intervention du prince transylvain Iancu de Hunyadi désireux d’entraver la percée ottomane vers l’Europe centrale.
Steliu Lambru, 23.05.2016, 14:42
Surnommé Dracula, le prince Vlad l’Empaleur a régné en Valachie à trois reprises. Après un règne de quelques mois seulement, en 1448, il s’est réinstallé sur le trône de la principauté de 1456 à 1462 avant de reprendre une troisième fois les rênes du pouvoir en 1476. Au bout de deux mois seulement, Tepes allait tomber victime d’une conspiration et mourir à l’âge de 45 ans. Véritable personnalité de son temps, Tepes avait 25 ans quand il a repris, pour la deuxième fois, la couronne valaque, suite à l’intervention du prince transylvain Iancu de Hunyadi désireux d’entraver la percée ottomane vers l’Europe centrale.
L’historien Stefan Andreescu explique les circonstances historiques qui ont conduit à l’installation de Vlad l’Empaleur sur le trône de la Valachie: «En 1456, Europe chrétienne se préparait à affronter de nouveau l’Empire ottoman lors du siège de Belgrade qui déboucha sur une véritable bataille. Dans un premier temps, la ville a résisté et n’a été conquise que plus de 50 ans après. Mais à l’époque, face aux intentions ottomanes, le prince Iancu de Hunyadi a pris la décision de renforcer la frontière danubienne. Du coup, il lui fallait sur le trône valaque un allié digne de confiance. Bien que venu de Transylvanie, Vlad l’Empaleur menait une politique intérieure solide et bénéficiait d’un groupe de boyards prêts à le reconnaître».
Ennemi déclaré des Ottomans après plusieurs années de jeunesse passées comme otage à la cour du sultan, Vlad l’Empaleur s’est proposé de combattre l’anarchie qui régnait en Valachie, en décidant de ranger la principauté du côté des alliances des croisés.
Stefan Andreescu: « L’arrivée de Vlad l’Empaleur sur le trône valaque a mis fin à plusieurs décennies de confrontations et de désordre. A l’époque, la province était au bord de l’anarchie. Le nouveau leader a donc cherché à renforcer sa position en démantelant les différents groupuscules qui ébranlaient son trône. Il y a différents récits consacrés à Dracula aussi bien en slavon qu’en allemand qui parlent des mesures drastiques adoptées par le voïvode contre ses ennemis. A titre d’exemple, rappelons la fureur du prince contre le boyard Albu responsable d’une révolte censée le conduire sur le trône. Sa tentative a échoué au moment où un groupe de boyards l’a trahi, en l’accusant d’avoir cessé de verser un tribut à la Sublime Porte afin de rejoindre une alliance chrétienne sous le patronage du pape Pie II ».
Pour sa part, Vlad l’Empaleur s’est entouré de quelques alliés: Iancu de Hunyadi, son protecteur, le roi hongrois Matthias Corvin et le prince moldave Etienne le Grand. Pourtant, il convient de mentionner qu’avec ces deux derniers, Vlad l’Empaleur a également eu quelques disputes.
Stefan Andreescu: « Etienne le Grand était en fait le cousin de Vlad l’Empaleur. Il s’est installé sur le trône de la Moldavie au printemps 1457, à l’aide de Vlad. En échange, celui-ci doit son troisième règne en Valachie à son cousin de Moldavie. Pourtant, à part ces deux moments majeurs de soutien réciproque, les deux princes ont été souvent en conflit. En 1462, Etienne le Grand tente de conquérir sans succès la cité de Chilia. Celle-ci représentait à l’époque la porte de la Valachie vers la mer. De l’avis du grand historien, Nicolae Iorga, c’était à Etienne le Grand de faire en sorte que Chilia ne tombe pas entre les mains des Ottomans. Le conflit a eu donc un enjeu stratégique. Heureusement, les liens de sang ont fini par s’avérer plus importants».
Dans ses batailles contre les Turcs, menées à chaque reprise en infériorité numérique, Tepes a évité les affrontements directs. Son plus important succès a été plutôt psychologique : ce fut la célèbre attaque nocturne de 1461.
Stefan Andreescu : « Il a eu recours à des tactiques à succès : la politique de la terre brûlée, l’empoisonnement des fontaines et des manifestations visuelles telles les champs recouverts de soldats turcs et de malfaiteurs dressés sur des pals, près de Târgoviste. Un des exploits les plus connus censés épouvanter les Ottomans a été une attaque nocturne, une action assez inouïe à l’époque. Plusieurs sources décrivent cette attaque, y compris une chronique ottomane qui raconte la panique que cette attaque a créée. Elle visait précisément la tente du sultan, Vlad voulait liquider Mehmet 2. Un envoyé pontifical, Nicolo de Modrusa, a parlé à Tepes, lorsque celui-ci était emprisonné à Buda et il a décrit cette attaque. L’autre commandant qui aurait dû attaquer le camp ottoman depuis le côté opposé a eu peur et n’a plus donné le coup d’envoi du raid. Ce fut uniquement le corps d’armée de Tepes qui, à la lumière des torches, a avancé jusqu’au beau milieu du bivouac. Pourtant, celui-ci a raté la tente du sultan et vu que les gardes formés de janissaires s’étaient organisées, Tepes s’est vu contraint de se retirer. »
Le même chroniqueur, Nicolo de Modrusa a également dressé un portrait de Vlad l’Empaleur, qui est assez fidèle à la célèbre toile qui représente le prince valaque au château Ambras du Tyrol : « Vlad l’Empaleur n’était pas un homme grand, mais il était robuste et fort, avec un visage cruel et effrayant. Son nez était grand et aquilin, ses narines étaient gonflées, son visage un peu rougeâtre, des cils longs entouraient de grands yeux verts alors que les gros sourcils noirs les rendaient encore plus menaçants. Son visage était rasé, à l’exception des moustaches. Les tempes gonflées ne faisaient qu’augmenter le volume de sa tête. Un cou comme celui d’un taureau la liait à ses larges épaules sur lesquelles tombaient des boucles de cheveux noirs. » (Trad. Alex Diaconescu, Ioana Stancescu)