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La présence des statères dans la province de Dobroudja

L’usage des statères s’est répandu dans la Dobroudja d’aujourd’hui grâce aux colonies grecques établies tout au long du pourtour de la mer Noire, partie prenante du monde grec

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, 11.11.2024, 11:16

Des monnaies de l’Antiquité

 

Le statère est un terme générique qui désigne en numismatique diverses monnaies en or ou en argent frappées dans l’Antiquité, et qui ont été utilisées dans toute l’Europe à partir du 4e siècle avant J-C. Leur usage sera attesté dans la région du bas Danube et de la Dobroudja d’aujourd’hui, cette région de Roumanie située entre le Danube et la mer Noire. Les numismates distinguent généralement les statères classiques, frappés à l’époque de la Grèce antique et qui ont circulé dans l’Europe de sud-est, des statères frappés par Alexandre le Grand ou Lysimaque.

 

Mais l’usage des statères s’est répandu dans la Dobroudja d’aujourd’hui grâce aux colonies grecques établies tout au long du pourtour de la mer Noire, partie prenante du monde grec. Le royaume du Pont, royaume antique situé sur la côte méridionale de la mer Noire, arrive au faîte de sa puissance au 2e siècle av J-C sous le règne de Mithridate VI du Pont, adversaire implacable de l’empire roman. Et ce sont bien les statères frappés par ce roi qui auront cours dans la région de Dobroudja.

 

Des monnaies frappées par Alexandre le Grand 

 

Emanuel Petac, numismate et chercheur à la Bibliothèque de l’Académie roumaine, explique :

« Vers le milieu du 3e siècle avant J-C, la région de la mer Noire se voit carrément inondée par une quantité immense d’or. Il s’agit des statères frappés par Alexandre le Grand, que l’on retrouvera à Histria, à Callatis, à Odessos (la ville de Varna, dans la Bulgarie actuelle), à Mesembria. L’on retrouve aussi les statères frappés par Lysimaque à Istros, Tomis, Byzantion, Odessos, Mesembria, mais aussi à Tyras. Tout cela à cause d’un certain contexte géopolitique, qui est celui de la guerre déclenchée entre la cité de Byzantion d’une part et les cités d’Istros et de Callatis de l’autre. » 

 

La circulation monétaire diminue fortement dans la région après la mort du roi Lysimaque, survenue en 281 av J-C. Emanuel Petac :

« Autour de l’an 200 l’on constate la disparition des pièces d’or, des pièces d’argent. Ces statères frappés au milieu du 3e siècle avaient circulé de manière intensive jusqu’aux années 220-218, pendant cette époque où les colonies grecques payaient un lourd tribut au Royaume celtique de Tylis. Ce dernier s’écroule à la suite d’une attaque des Thraces, ce qui fait qu’après l’an 200 des nouvelles émissions de statères se font rares, très rares. »  

 

Les statères de type Lysimaque

 

Les statères de type Lysimaque frappés à la cour du roi Mithridates et découverts à Istros pèsent en moyenne 8,18 grammes et datent du temps de la première guerre déroulée entre le Royaume du Pont et l’empire roman, soit entre 88 et 86 av J-C. Mais les archéologues découvriront non seulement des statères, mais aussi des inscriptions qui nous renseignent sur le type de commerce dont les statères constituaient la monnaie d’échange.

 

Emanuel Petac :   « La cité d’Histria avait contracté un prêt financier de 100 statères auprès d’un créditeur de Byzantion, un prêt qu’elle s’est avérée incapable de rembourser. Le créditeur meurt entre-temps et la créance tombe aux mains de son fils. A la veille des guerres de Mithridate, le royaume du Pont avait caressé l’espoir de nouer une alliance avec d’autres cités. La cité d’Histria envoie alors une délégation, à la tête de laquelle se trouvait un nommé Meniskos, et qui doit passer forcément par Byzantion. Cette délégation de négociateurs arrive à Byzantion, où elle se voit arrêter et emprisonner en vertu de la créance impayée, arrivée à échéance. La délégation entière, y compris Meniskos, sera emprisonnée, selon les sources, pendant une longue période à Byzantion. L’on peut supposer qu’il s’agit de plusieurs années. Finalement, Diogène, le stratège du roi Mithridates intervient et paye la dette de la cité d’Histria. Aussi, ce n’est qu’à la suite du remboursement par un tiers de la dette contractée que Byzantion libère la délégation retenue en otage. Cela prouve donc que la cité d’Histria était en cette période-là incapable de récolter une telle somme par ses propres moyens, alors que cent ans auparavant elle disposait de telles quantités d’or qu’elle pouvait frapper sans peine des milliers de statères. »   

 

Les statères grecs découverts tout au long du pourtour de la mer Noire témoignent à n’en pas douter du dynamisme de l’espace économique des colonies grecques de la région pendant les deux derniers siècles avant J-C.  (Trad. Ionut Jugureanu)

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