La guerre d’indépendance à travers les tableaux
Autour de lattaque de Smârdan. Peintres de la Guerre dindépendance présents dans la collection du Musée national dHistoire
Ion Puican, 13.11.2023, 13:09
Le Musée national d’histoire de la Roumanie abrite
depuis septembre passé et jusqu’à fin mars 2024 l’exposition thématique
intitulée Autour de l’attaque de Smardan. Peintres de la Guerre d’indépendance présents
dans la collection du Musée national d’Histoire ». Ecoutons la
muséographe Erica Ioja :
« Cette collection entend réunir l’ensemble
des toiles des peintres qui ont immortalisée dans leurs œuvres la Guerre
russo-turque de 1877-1878, qui se sont penchés sur la participation de la
Roumanie à cette guerre, à l’issue de laquelle cette dernière va proclamer son indépendance.
Les grands moments de l’histoire ont depuis toujours inspiré les peintres. Mais
dans ce cas il s’agit de l’histoire en marche, de l’histoire au présent,
immortalisée par des artistes qui vivaient au milieu des troupes, qui ont vécu
dans leur chair cette guerre ».
Mais pourquoi avoir intitulé l’exposition Autour de l’attaque de Smardan, titre repris à
la célèbre toile homonyme du peintre national Nicolae Grigorescu ?
« Le noyau de cette exposition est constitué
par ces toiles qui se trouvent dans les collections du Musée national d’histoire
de la Roumanie, peintes par des artistes qui ont pris part à la guerre, qui ont
accompagné les troupes au front, qui ont partagé le quotidien des soldats. Et
parmi ces artistes le plus connu est sans doute Nicolae Grigorescu, avec son tableau monumental « Autour de l’attaque
de Smârdan », portrait grandeur nature d’un dorobanț, membre de ce corps de
tirailleurs d’élite de l’armée roumaine de l’époque. D’ailleurs Grigorescu est
également l’auteur d’une aquarelle mettant en scène un rosior, ce corps de
cavalerie de l’armée roumaine. A part Nicolae Grigorescu, l’exposition réunit
des toiles signées par Sava Henția, ami et protégé du docteur Carol Davila, qui
dirige le corps militaire médical pendant la Guerre d’indépendance. Henția s’éclate
sur le front et on le sent. Il peint des scènes dramatiques, mais surtout des
scènes reproduisant le quotidien des soldats, des scènes parfois cocasses,
empreintes d’humour et de tendresse. Ses portraits émouvants des prisonniers
turcs, du personnel médical roumain ne laissent personne indifférent. Ensuite,
l’exposition s’est attelée de mettre en évidence la manière dont la Guerre d’indépendance
a été perçue et s’était transmise dans la conscience collective à travers le
temps. C’est surtout l’œuvre Autour de l’attaque de Smardan de Nicolae Grigorescu qui avait été décortiquée par les contemporains
et les critiques d’art. Grigorescu avait pris part à cette guerre, il était
présent en première ligne. Mais il n’était pas présent lors de la bataille de Smârdan.
Il avait en revanche pris part aux batailles de Plevna et de Rahova. Alors, lorsque
la mairie de Bucarest lui avait commandé cette toile, il s’était inspiré des
croquis réalisés à Plevna et à Rahova. Et nous reprenons au sein de l’exposition
l’histoire de cette commande et l’histoire de la réalisation du tableau, qui
lui avait pris 7 années. Selon certains historiens d’art, Grigorescu aurait
subi des pressions politiques dans le choix du sujet, dans ses choix artistiques,
ce qui l’avait déterminé de reporter l’achèvement de son œuvre. Pourtant, une
fois achevée, son œuvre a été plébiscité par le public, et « Autour de
l’attaque de Smârdan » a depuis lors représenté pour tous les Roumains une
image iconique, la quintessence de la Guerre d’indépendance. »
Mais quel impact a eu la guerre sur l’homme et sur le
peintre Nicolae Grigorescu ? Eugenia Ioja :
« Prendre part à une guerre constitue une
expérience qui marque à vie tout homme, à plus forte raison un artiste.Son
expression artistique s’en trouve modifiée. Il délaisse les couleurs à la
faveur du crayon. Les scènes qu’il immortalise sont des scènes de mouvement.
Mais il ne va pas se borner à faire ressortir juste le dramatisme, le
spectaculaire des batailles, il se penche aussi, avec énormément de sensibilité,
sur le vécu des militaires, sur leurs sentiments, sur la manière dont ils vivent
l’indicible violence que constitue la guerre ».
(Trad Ionut Jugureanu)