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La condition ouvrière dans la Roumanie de l’entre-deux-guerres

Coup d'oeil sur le quotidien de l'ouvrier roumain de la première moitié du 20e siècle et sur la relation patron-ouvrier.

La condition ouvrière dans la Roumanie de l’entre-deux-guerres
La condition ouvrière dans la Roumanie de l’entre-deux-guerres

, 29.01.2024, 11:58

Lorsque
l’on commence à se renseigner en puisant dans la presse du temps et dans les
documents d’archive sur la condition ouvrière dans la Roumanie de l’entre-deux-guerres,
on est tout d’abord frappé par la condition misère à laquelle il est relégué,
tout comme par la persécution qu’il subit de la part du régime bourgeois. Une
clé de lecture qui sera forcément embrassée à corps perdu par l’historiographie
officielle du régime communiste instauré en Roumanie à la suite de la Seconde
Guerre mondiale. Face à cela, l’historien contemporain multiplie ses sources,
intégrant des sources d’histoire orale, ce qui ne manque pas de former pour
finir sur une image plus nuancée de ce qu’était le quotidien de l’ouvrier roumain
de la première moitié du 20e siècle.

Des témoignage conservés par le Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine


Le
centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine, fondé le 1er
février 1993 à l’initiative du PDG d’alors de la Radiodiffusion roumaine, Eugen
Preda, s’était dès le départ employé de dénicher des témoins privilégiés ou de
simples anonymes de l’histoire récente pour consigner leur vécu, leurs
témoignages.

Un tel témoin de son temps a été Manole Filitti, ancien directeur
du fabricant d’huile « Phoenix », nationalisé après l’arrivée des
communistes au pouvoir. Dans son interview de 1996, il rappelle les conditions
de vie que son entreprise offrait à ses employés :

« Vous
savez, tous les dimanches matin, je rendais visite à quelques-uns de mes
ouvriers. Surtout à ceux qui rencontraient des difficultés à nouer les deux
bouts, ceux qui avaient des familles nombreuses. Et je n’allais jamais les
mains vides. J’apportais dans le coffre de ma voiture des victuailles, du
savon, divers produits de première nécessité. Ils me racontaient leur vie,
leurs difficultés, les besoins des enfants en matière vestimentaire par
exemple, et puis nous, l’employeur, tentions de subvenir à leurs besoins ».

Les patrons, préoccupés pour leurs employés

L’avocat
Ionel Mociornița, fils de l’industriel Dumitru Mociornița, parlait des
préoccupations de son père pour améliorer le bien-être de ses ouvriers dans l’interview
qu’il donna en 1997 au même Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion
roumaine :


« Les
syndicats avaient un rôle plutôt modeste dans l’amélioration de la condition de
la vie ouvrière. Les patrons prenaient souvent les devants et tentaient de
constituer un système d’assistance sociale et médicale à l’intérieur de leur
entreprise. Mon père, par exemple, avait érigé place Asan la Maison de la Prévoyance
sociale. C’est toujours grâce à ses actions de mécénat qu’ont été érigés le
lycée Reine Marie, une partie du lycée Gheorghe Sincai, tout comme la maternité
Bucur. Il finançait par ailleurs des camps d’été pour des élèves de plusieurs
lycées de la capitale. Il n’y avait pas de contrat collectif de travail à l’époque,
il n’y avait que le système de contrats individuels. Mais il existait déjà une
législation en matière du droit de travail et des juges spécialisés. Je me
souviens des juges de deux sections spécialisées du Tribunal sis rue
Calomfirescu et qui donnaient rarement gain de cause aux patrons lorsqu’une
affaire portant sur un conflit de travail se présentait devant eux ».


Une préoccupation doublée par les actions caritatives


L’approche
paternaliste du patron revient souvent dans les souvenirs de Ionel Mociornita :



« Mon
père avait pour credo le développement de l’industrie et les œuvres de charité.
Il a mené une vie sobre, n’a jamais fumé, ne buvait jamais et ignorait l’usage
des cartes de jeu. Tout comme moi d’ailleurs. C’était un homme sobre, fiable,
un esprit inventif et créateur. Je suis certain que si la parenthèse historique
que fut le régime communiste n’avait pas existé, il aurait fallu encore trois
ou quatre générations pour que la Roumanie puisse compter sur une colonne
vertébrale d’entrepreneurs aussi solide que les Etats développés de l’Ouest de
l’Europe. »

Une relation étroite patron-employé


Teofil
Totezan, apprenti cordonnier, diplômé d’une école professionnelle, est embauché en 1929 par la société Dermata de Cluj. Mais l’essentiel du métier il l’avait
appris auprès d’un maître cordonnier.



« Je
partageais à l’époque la vie du patron. Je nourrissais ses cochons, bêchais le
jardin. Mon patron était beau gosse, il avait épousé la fille d’un cordonnier
célèbre. Ce dernier avait trois filles et à chacune il leur avait donné en dot une
maison. Alors mon patron occupait cette maison, mais c’était vraiment un brave
type. A l’époque j’étais un révolté. Mais aujourd’hui je me rends bien compte
que c’est grâce à lui que j’avais appris le métier, que c’est grâce à lui que
je sois devenu un homme. Il me défendait de fumer. Et nous, les apprentis, on
le craignait. Mais on le respectait aussi. C’est grâce à lui que je n’ai jamais
fumé. Puis, lorsque j’ai été finalement embauché à l’usine, il n’y avait pas à
se plaindre des conditions de travail. Un ouvrier comme moi gagnait à l’époque
600 lei par semaine. C’était le salaire de base d’un débutant. Plus tard, je
suis parvenu à gagner jusqu’à 1.500 lei par semaine, alors que l’un de mes copains,
maître d’école, en gagnait 1.800. »



Les conditions de vie des ouvriers roumains de l’entre-deux-guerres
sont faites des zones d’ombre et de lumière. Il s’agissait d’une société en
voie de développement en plein essor, traversée régulièrement par de terribles crises,
mais toujours mue par un grand désir de progrès. (Trad Ionut Jugureanu)

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