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Déstalinisation et contestation dans la Roumanie de Gheorghe Gheorghiu Dej

Les effets de ces propos se sont fait sentir dans tous les pays socialistes, y compris en Roumanie, où Gheorghe Gheorghiu-Dej était un des leaders staliniens les plus durs. Selon le modèle construit par Khrouchtchev, les communistes roumains ont essayé d’opérer certains changements. Miron Constantinescu était l’intellectuel idéaliste qui s’était inscrit au Parti communiste roumain par conviction. Profitant du régime de Gheorghe Gheorghiu-Dej, il a réussi à progresser dans la hiérarchie supérieure du PCR. Membre de la délégation des communistes roumains au 20e congrès du PCUS, il a estimé que le moment était venu de confronter l’autorité indiscutable du leader Gheorghe Gheorghiu-Dej.

Déstalinisation et contestation dans la Roumanie de Gheorghe Gheorghiu Dej
Déstalinisation et contestation dans la Roumanie de Gheorghe Gheorghiu Dej

, 05.09.2016, 13:36

L’historien Gheorghe Onisoru, de l’Institut national d’étude du totalitarisme, affirme que le changement produit à Moscou a surpris les leaders communistes des pays satellites, donc les Roumains aussi. « Le rapport de Khrouchtchev n’a pas été bien reçu par Gheorghe Gheorghiu-Dej. C’était un moment lorsqu’il estimait très bien contrôler la situation en Roumanie. En 1952, il avait liquidé le groupe accusé de déviation de droite, formé par Ana Pauker, Vasile Luca et Teohari Georgescu. En 1954 il a même fait exécuter Lucretiu Patrascanu, un autre poids lourd du parti. Dej a su comment manœuvrer les réunions du bureau politique en 1952 et transformer son infériorité face aux trois et énoncer la théorie du groupe qui minait l’autorité du parti. On pourrait considérer Dej comme un stalinien authentique. Dès le retour de la délégation roumaine participante au Congrès du PCUS, tant le rapport secret de Khrouchtchev que le rapport de la délégation roumaine ont été publiés plus tard que d’habitude. Ce ne fut que les 23 au 25 mars 1956 que la présentation du rapport de la délégation roumaine au Congrès du PCUS a figuré en troisième position de l’ordre du jour d’une réunion plénière du Comité central du Parti des Travailleurs de Roumanie. Dej lui-même en était le rapporteur. Miron Constantinescu a lu le Rapport secret relatif au culte de la personnalité et à ses conséquences. Constantinescu affirmait dans le cadre du plénum qu’il était entièrement d’accord avec le rapport de Dej, donc aucune rupture entre les deux n’était à envisager. Elle allait se produire durant la première grande réunion du Bureau politique du début du mois d’avril 1956. »

Le lendemain, Miron Constantinescu a lancé l’attaque contre Gheorghe Gheorghi-Dej, raconte l’historien Gheorghe Onisoru : « A l’ordre du jour de la réunion du Bureau politique du parti d’avril figuraient les tribunaux spéciaux du ministère de l’Intérieur, l’exécution de criminels de droit commun, les arrestations abusives, la filature par les organes du renseignement du ministère de l’Intérieur de personnes membres du Comité d’Etat de la planification, dirigé par Miron Constantinescu et de Constantinescu lui-même. Des sources non officielles évoquaient même le fait que les membres du Bureau Politique avaient peur à s’exprimer. Les gens déploraient aussi le fait que la délégation participante au congrès du PCUS n’arrivait toujours pas à présenter son rapport. Lors de la première journée de réunion plénière, Constantinescu a été dans l’offensive et il a parlé de la question du culte de la personnalité, soulignant qu’en Roumanie aussi le culte de la personnalité avait joué un rôle négatif. Constantinescu a également affirmé qu’après 1952, soit après la liquidation du groupe Pauker, le parti avait subi un assainissement, mais que de nouvelles inquiétudes visant l’activité du ministère de l’Intérieur étaient apparues. En effet, les organes de la Securitate pouvaient facilement s’adonner à des abus. Constantinescu a même affirmé qu’après 1953, la Securitate n’avait plus respecté les consignes du Parti et raconté qu’en tant que chef du Comité d’Etat de la planification, nombre de ses subordonnés avaient été recrutés par la Securitate. Puis il a poursuivi son offensive et traité du problème du culte de la personnalité. Le rapport de la délégation roumaine au 20e congrès du PCUS est né difficilement, a martelé Constantinescu. Et lui d’ajouter : « le camarade Dej est un des dirigeants de proue du parti, mais il n’est pas le seul. »

Mais Dej était beaucoup trop fort et sa position n’avait pas été affaiblie par les attaques de Miron Constantinescu. Dej a très attentivement modifié son discours afin de préserver sa position au sein du parti et se conformer en même temps à la nouvelle ligne idéologique venue de Moscou. Gheorghe Onisoru. « Ceux qui étaient majoritaires au Bureau politique sont intervenus et ils ont appuyé leur ami Dej, en critiquant Constantinescu. Le lendemain ce dernier s’est excusé pour la manière dont il s’était exprimé devant le Bureau politique et a affirmé qu’il était prêt à se soumettre à toute décision. La déclaration de Constantinescu doit être analysée tenant compte du fait que quatre ans plus tôt, le numéro 3 du parti, Vasile Luca, avait été destitué de ses fonctions et arrêté. La réunion s’est achevée par un discours de Dej. Finalement, les choses avaient été réglées et la petite tentative de rébellion de Constantinescu s’était achevée. »

Gheorghe Gheorghiu Dej a continué à diriger la Roumanie d’une main de fer et dit qu’il était hors de propos de déstaliniser la Roumanie, puisque ce fut lui qui l’avait fait avant la mort de Staline. L’animal politique Dej a survécu à nouveau pour commencer en 1958 une nouvelle phase de son règne, la phase national-communiste. (trad. Alex Diaconescu)

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