Centenaire de l’héroïne Ecaterina Teodoroiu
Femme-soldat et magnifique exemple de sacrifice personnel, Ecaterina Teodoroiu a été l’héroïne roumaine symbole de la première guerre mondiale. Ne se contentant pas de rester derrière les lignes de front, elle s’est aventurée là où le combat était le plus dur et où la mort frappait aveuglément. Âgée de 23 ans à peine, elle est tombée au combat à Mărăşeşti, en août 1917.
Steliu Lambru, 18.09.2017, 15:34
Née en 1894 dans le comté de Gorj, dans une famille de paysans, Ecaterina Teodoroiu a eu 5 frères et 2 sœurs. Elève appliquée, elle a suivi les cours de l’école allemande de Târgu Jiu, pour aller ensuite à Bucarest faire des études pour devenir institutrice. Elle a également suivi une école d’infirmières et a fait partie du mouvement roumain des scouts.
L’entrée de la Roumanie en guerre en août 1916 a été accueillie avec enthousiasme par la population et de nombreux jeunes se sont engagés comme volontaires dans l’armée, entrant dans la spirale de la mort, animés par les nobles idéaux de leur génération. Ecaterina Teodoroiu a compté parmi ces jeunes et elle a choisi l’expérience difficile de la guerre, s’enrôlant dans l’armée et allant sur le front. On dit que c’est la mort d’un de ses frères, tombé au combat pendant l’automne 1916 qui l’a déterminée à prendre une telle décision. Son enthousiasme et sa décision étaient néanmoins exceptionnels pour une femme de son époque.
Selon l’historien Ioan Scurtu, son éducation et la situation du le pays l’ont également poussée à partir au combat: « Elle s’est affirmé à un moment je dirais symbolique de la guerre, à savoir celui où la population de Târgu Jiu a défendu la ville, empêchant les troupes allemandes d’y pénétrer. Ecaterina Teodoroiu a compté parmi les initiateurs et héros de cette action populaire qui a déterminé l’armée allemande à faire demi-tour. Encouragée par ce succès, elle est allée sur le front et elle a prié le général Dragalina, qui défendait la Vallée du Jiu, de l’accepter, comme soldat, dans les rangs de l’armée. Le général dit « oui » et dès octobre 1916, elle participe aux combats. Blessée à deux reprises – dont une fois grièvement – elle fut hospitalisée à Craiova, ensuite à Bucarest et à Iaşi. A Iaşi, la reine Marie vint lui rendre visite et à partir de ce moment-là, son nom acquit une véritable notoriété. Ce fut la Reine Marie qui lui remit, sur son lit d’hôpital, la décoration offerte par le roi Ferdinand pour sa participation aux combats et ses actes de prouesse durant l’automne et l’hiver 1916 – 1917.
Une femme dans l’armée et surtout une qui aille sur le front était à l’époque quelques chose de tout à fait exceptionnel. Comment les soldats l’ont-ils accueillie ? Ioan Scurtu: « Selon les livres que j’ai lus – et j’ai d’ailleurs écrit moi-même un livre sur les héros de la première guerre mondiale, dont Ecaterina Teodoroiu – elle a été accueillie avec beaucoup de respect et de considération pour son geste unique. Le fait qu’elle participait à toutes les activités militaires, n’évitant aucune corvée ou obligation, apprenant à manier l’armement fraîchement reçu, début 1917, de la part des alliés, lui a valu le respect de ses camarades, qui appréciaient et admiraient cette jeune femme si courageuse et si ferme dans sa décision de lutter pour son pays. »
Pour sa participation aux combats, Ecaterina Teodoroiu allait être décorée et promue au grade de sous-lieutenant. Le 22 août, à 21 h 15, son régiment fut attaqué par l’armée allemande et les Roumains furent obligés de battre en retraite. Durant cette manœuvre défensive, Ecaterina Teodoroiu fut touchée par deux balles meurtrières en pleine tête sur le Colline Secului-Muncel. Nous avons demandé à l’historien Ioan Scurtu si le grade de sous-lieutenant d’Ecaterina Teodoroiu avait été symbolique et censé remonter le moral des troupes ou bien si elle l’avait bien mérité. L’historien Ioan Scurtu explique : Dès 1917-1918 Ecaterina Teodoroiu est devenue une légende et ceux aux côtés desquels elle a lutté ont parlé de son courage et de son héroïsme. Par son acte de s’engager dans le combat, cette femme est devenue un symbole. Sortie de l’hôpital, on la pria avec insistance de rester travailler pour la Croix Rouge, avec d’autres femmes remarquables, dont la Reine Marie. Elle a pourtant refusé, affirmant que sa place était sur le front, l’arme à la main. En 1921, à l’occasion du centenaire de la révolution de Tudor Vladimirescu, la dépouille d’Ecaterina Teodoroiu, enterré à Mărăşeşti, fut transportée à Târgu Jiu, et déposée dans un sarcophage réalisée par la femme sculpteur Miliţa Pătraşcu. Le roi Ferdinand et la reine Marie, l’historien Nicolae Iorga et le maréchal Alexandru Averescu, ainsi que toutes les personnalités de premier rang de la vie politique roumaine qui ont maintenu vivante la mémoire des 500 mille soldats roumains tombés dans cette guerre ont accordé une attention à part à Ecaterina Teodoroiu. »
La postérité de la jeune institutrice a été à la mesure de son sacrifice. L’ « Héroïne de Jiu » – comme elle fut surnommée – est devenue le symbole féminin par excellence de la première guerre mondiale en terre roumaine.(Aut. : Steliu Lambru ; Trad. : Dominique)