Nicolae Iorga, un siècle et demi depuis sa naissance
Le nom de Nicolae Iorga est très présent dans l’espace public, attaché à des rues, des places publiques, des institutions d’enseignement et de recherche. Il est un des plus importants historiens roumains du XXe siècle, voire le plus important, selon certaines opinions. Nicolae Iorga s’est attiré les éloges de ses contemporains grâce à une œuvre impressionnante, d’environ 20 000 livres, conférences et articles, mais aussi par son ambition d’être une autorité incontestable dans le domaine de l’histoire. Spécialiste du Moyen Âge et de l’Empire byzantin, il a aussi été romaniste, slaviste, historien de l’art et philosophe de l’histoire, professeur des universités et membre de l’Académie roumaine. Outre son domaine de prédilection, Iorga s’est également essayé à la critique littéraire, à la dramaturgie, à la poésie, il s’est voulu encyclopédiste et mémorialiste. Ses mandats parlementaires et ministériels l’on placé au centre de la vie politique. D’autre part, son immense popularité est liée à sa mort tragique, qui est arrivée dans la nuit du 27 novembre 1940, lorsqu’il fut assassiné par des membres de la Garde de fer, le parti fasciste de la Roumanie de l’entre-deux-guerres.
Steliu Lambru, 23.01.2022, 01:40
Nicolae Iorga est né dans la ville de Botoșani (nord-est de la Roumanie), en 1871. Très doué, il impressionnait par sa mémoire prodigieuse. Polyglotte, il a choisi de faire des études d’histoire à la Faculté de Lettres de l’Université de Iași (est de la Roumanie). En 1890, il part continuer ses études en Italie et puis en France. En 1892, Iorga se rend en Angleterre, pour retourner ensuite en Italie. En 1893, il s’arrête en Allemagne et s’inscrit au doctorat à l’Université de Berlin, mais il finit par soutenir sa thèse à l’Université de Leipzig, où le célèbre historien allemand Karl Lamprecht fait partie de la commission doctorale. Nicolae Iorga rentre en Roumanie en 1894, réussissant à faire son entrée dans le milieu universitaire à l’âge de 23 ans. En parallèle, cette même année, il entame l’activité journalistique et politique et se noue d’amitié avec l’avocat et professeur de droit A. C. Cuza, homme politique nationaliste et antisémite qui partage avec Iorga une carrière politique agitée. Nicolae Iorga a été une figure de proue du conservatisme, du nationalisme et de l’agrarisme, ainsi que le fondateur de la revue populiste « Sămănătorul ». En même temps, Iorga a été le modèle de l’intellectuel qui s’est frotté à l’extrémisme, en en étant aussi bien l’inspirateur que la victime. Il a cultivé le nationalisme dont il est tombé victime en 1940.
Pour marquer le cent-cinquantième anniversaire de la naissance de Nicolae Iorga, le Musée national d’histoire de la Roumanie a organisé une exposition, la deuxième dédiée à l’historien au cours de la dernière année, après celle de l’Académie roumaine. Selon le directeur du musée, Ernest Oberlander-Târnoveanu, l’exposition est une occasion, pour le grand public, de prendre la mesure du personnage.
« Cette exposition est consacrée à « une vie d’homme telle qu’elle fut », pour citer Iorga lui-même. C’est une sélection, parce que nous n’avons pas souhaité exposer davantage d’objets. D’une part, l’espace est limité, d’autre part, l’activité de Iorga et les traces qu’il a laissées dans l’histoire contemporaine sont immenses. Nous ne pouvons qu’espérer de pouvoir créer un jour, dans l’espace virtuel, des archives documentaires Nicolae Iorga. Le Musée national d’histoire de la Roumanie est en mesure de présenter au public, pour la première fois, des documents essentiels ayant appartenu à Iorga, depuis son extrait de naissance jusqu’à sa fiche de fonction à l’Université de Bucarest, ainsi que de nombreux diplômes remis par des académies et sociétés scientifiques. Nous avons aussi exposé de la correspondance, des documents de famille, des photos, des objets et une impressionnante série de distinctions. Nicolae Iorga a été la personne civile la plus décorée de tous les temps en Roumanie. »
L’historien, professeur et académicien Andrei Pippidi, petit-fils de Nicolae Iorga, est le propriétaire de la plupart des objets présentés dans l’exposition accueillie par le Musée national d’histoire de la Roumanie. Andrei Pippidi, tout comme d’autres personnes, a fait don de plusieurs objets ayant appartenu à Nicolae Iorga, qui seront présentés dans le cadre de l’exposition permanente ainsi que dans des expositions thématiques futures.
» Ce sont des manuscrits, éparpillés partout, des livres d’histoire, des articles de presse quasi quotidiens ou des pièces de théâtre, des poèmes qui ont exprimé sa sensibilité, des lettres gribouillées sur un petit morceau de papier. Ils témoignent, tous, de sa dimension intellectuelle. Ses admirateurs ont du mal à prendre la mesure de ce qui a été imprimé, il existe même des monologues enregistrés. Ses conférences, nous les devons à des sténographes diligents. De son vivant, il avait pu écouter ses mots dits sur scène par les personnages historiques dans lesquels il s’était retrouvé. »
La personnalité de l’historien Nicolae Iorga est un repère important de la culture roumaine des XIXe et XXe siècles. Les expositions thématiques ont pour but de montrer aussi le côté familier, humain, de ceux que nous considérons comme importants à un moment donné. (Trad. Ileana Ţăroi)