L’exploitation de l’or dans l’espace roumain
Aux côtés d’autres ressources dont la valeur a été comparée à celle du métal précieux, l’or blanc, soit le sel, et l’or noir, soit le pétrole, l’or proprement dit a non seulement constitué une source de richesse pour la population autochtone, mais il a également attiré l’attention des conquérants.
Christine Leșcu, 23.03.2018, 14:01
Aux côtés d’autres ressources dont la valeur a été comparée à celle du métal précieux, l’or blanc, soit le sel, et l’or noir, soit le pétrole, l’or proprement dit a non seulement constitué une source de richesse pour la population autochtone, mais il a également attiré l’attention des conquérants.
Les premiers ont été les Romains, qui après avoir conquis la Dacie en 106 av. J.C., ont commencé à organiser plus rigoureusement l’exploitation de l’or dans la région qu’est aujourd’hui la Transylvanie. Cette exploitation se faisait jusque-là d’une manière rudimentaire, car les Daces récoltaient uniquement les sables aurifères et l’or se trouvant dans les alluvions des rivières de montagne des Carpates.
Radu Lungu, auteur du livre « L’or chez les Roumains », paru à la maison d’édition Paideia, explique ce qui a changé après la conquête romaine : « L’empereur a ordonné la réorganisation de la province Dacia Felix et notamment de la région des Monts Apuseni, là où se trouvaient les richesses aurifères. La XIIe Légion Gemina a été déployée à Apulum, soit la ville d’Alba Iulia d’aujourd’hui, pour assurer le contrôle militaire de la région. Un procurateur spécialisé a été nommé à Ampelum, la ville de Zlatna d’aujourd’hui. Ce procurateur des artisans qui transformaient l’or s’occupait de la surveillance des mines d’or. Les Romains ont commencé à extraire non seulement l’or se trouvant à la surface du sol, mais aussi celui des profondeurs de la terre et procédé à des forages allant jusqu’à 300 mètres de profondeur. Dans le cas des exploitations de surface, ils ont creusé des puits ronds de quelques mètres de diamètre. »
Les mines aurifères les plus importantes que les Romains ont ouvertes étaient situées dans le soi-disant quadrilatère des Monts Apuseni, bordé par les rivières Aries, Cris Blanc et Mures. Les mines les plus importantes de l’époque romaine se trouvaient à Rosia Montana, Zlatna et Bucium. Par la suite, le centre d’intérêt des Romains s’est déplacé vers le sud-ouest, notamment vers l’actuel comté de Caras-Severin, dans les régions de Banat et d’Olténie. La plupart de l’or et de l’argent extraits des Monts Apuseni était envoyé à Rome.
Après le retrait de l’administration romaine décidée en 271, les mines d’or ouvertes par les Romains tombent à l’oubli et commencent à se dégrader, explique Radu Lungu : « Au cours des grandes migrations, soit le long d’un millénaire, l’unique moyen d’extraire l’or était le traitement des alluvions portées par les rapides vers les vallées. Sous le Royaume hongrois, les exploitations de l’or connaissent un certain développement, mais leur véritable essor commence après 1700, suite à l’intégration de la Transylvanie au nouvel Empire des Habsbourg. De nouvelles mines sont ouvertes, alors que certaines de celles qui existaient déjà sont ressuscitées. Mais l’intérêt est déplacé de la région d’Abrud et des localités d’Abrud, Zlatna, Roşia Montană, vers une région qui englobait plusieurs vallées : la vallée de l’Ampoi, la Vallée du Cris et la Vallée du Mures. »
Au cours de la période durant laquelle la Transylvanie a fait partie de l’Empire d’Autriche-Hongrie, une sorte d’industrialisation a également eu lieu puisque les technologies d’extraction et d’exploitation de l’or ont été mises à jour. La main d’œuvre était aussi assez abondante.
Radu Lungu : « Un grand nombre de mineurs étaient allemands, originaires de Silésie, mais aussi de Slovaquie. Mais les gens des parages étaient aussi assez nombreux. Des mines fiscales, c’est-à-dire des exploitations privées de taille petite et moyenne existaient à l’époque des Habsbourg ainsi que des petites entreprises, dont certaines étaient détenues par des paysans libres et serfs. Ces derniers pouvaient seulement exploiter ces mines, ils bénéficiaient uniquement de l’usufruit des exploitations. »
Quelle est la quantité d’or que ces mineurs ont extraite au cours des siècles jusqu’à nos jours, durant les grandes périodes d’extraction de l’or : romaine, autrichienne et communiste ? Radu Lungu : « On estime que depuis le début de l’extraction de l’or, la quantité totale d’or s’élèverait à 2200 tonnes, dont 700 kilos durant l’époque romaine. Du IVe siècle au XVIe siècle, la quantité est estimée à 500 mille kilos, et au cours de l’époque du règne des Habsbourg elle a augmenté à 750 mille kilos. Enfin, à l’époque communiste, quelque 200 mille kilos d’or y ont été extraits. Donc la quantité d’or extraite durant la dernière période a considérablement baissé par rapport à l’époque des Habsbourg. Et pourtant elle a toujours été assez importante. »
A présent, la localité de Rosia Montana, là où l’ancienne mine de l’époque romaine Alburnus Maior fonctionnait toujours, a été déclarée site historique d’importance nationale par le ministère de la Culture. Par conséquent, l’extraction de l’or est à l’heure actuelle complètement interdite. Cette décision a été adoptée pour protéger cette région contre une éventuelle exploitation intensive de l’or par le biais d’une immense mine à ciel ouvert, conformément à un projet qui avait reçu dans un premier temps l’autorisation des autorités. Les controverses reposant sur des arguments d’ordre environnemental, culturels et économiques se poursuivent. (Trad. Alex Diaconescu)