Les cadeaux reçus par le couple Ceauşescu
Le Musée national d’histoire de Roumanie détient une collection spéciale, composée d’objets reçus en cadeau par l’ancien président de la Roumanie communiste de 1965 à 1989, Nicolae Ceaușescu, et par son épouse, Elena Ceaușescu. Le couple Ceaușescu a fait l’objet du culte de la personnalité le plus dévergondé jamais voué à un chef dans l’histoire de la Roumanie, pratiqué, de surcroît, à une époque où le niveau de vie des Roumains était à son plus bas historique. Les objets scintillants, qui rendent hommage au couple dictatorial, contrastent manifestement avec l’atmosphère sombre des années d’avant 1989. Leur nombre et leur diversité ont justifié la création d’une exposition à part entière, qui leur a été dédiée avant la chute du régime communiste.
Steliu Lambru, 05.07.2020, 00:59
Le Musée national d’histoire de Roumanie détient une collection spéciale, composée d’objets reçus en cadeau par l’ancien président de la Roumanie communiste de 1965 à 1989, Nicolae Ceaușescu, et par son épouse, Elena Ceaușescu. Le couple Ceaușescu a fait l’objet du culte de la personnalité le plus dévergondé jamais voué à un chef dans l’histoire de la Roumanie, pratiqué, de surcroît, à une époque où le niveau de vie des Roumains était à son plus bas historique. Les objets scintillants, qui rendent hommage au couple dictatorial, contrastent manifestement avec l’atmosphère sombre des années d’avant 1989. Leur nombre et leur diversité ont justifié la création d’une exposition à part entière, qui leur a été dédiée avant la chute du régime communiste.
Cristina Păiușan-Nuică, chercheure au Musée national d’histoire de Roumanie, présente cette collection impressionnante d’objets hérités par la Roumanie, après la chute du dictateur : « Ce sont plus de 10.000 objets, juste les cadeaux, sans les portraits de Ceaușescu, réunis dans l’expo « Omagială/Hommage », qui constituent une collection séparée. Elle a même été présentée dans un album, mis en page par Cornel Ilie et intitulé « Un tableau pour le camarade ». « La collection spéciale » est le nom de cette collection qui rassemble les plus de 10.000 cadeaux, autres que des toiles, reçus par Ceaușescu et divisés en deux catégories. La première est faite des cadeaux de l’étranger, reçus pendant ses visites dans d’autres pays ou de la part des délégations étrangères venues en Roumanie. La seconde catégorie inclut les cadeaux reçus à l’occasion des visites dans les différentes régions de Roumanie ou lors des congrès et de ses anniversaires. »
Nicolae Ceaușescu avait reçu une multitude de cadeaux très divers : un tas de maquettes (plusieurs tracteurs, la première voiture Dacia, la première auto de la marque Oltcit, le premier hélicoptère, des rames de train et des locomotives). Assiettes, verres, serviettes traditionnelles, mouchoirs, taies d’oreiller complètent cette collection inédite. Avant 1989, la plupart de ces objets étaient présentés dans le cadre de l’exposition intitulée « Omagială/Hommage » à laquelle le Musée national d’histoire avait alloué dix salles de plusieurs milliers de mètres carrés. Il y en avait plusieurs sections, en fonction de la provenance des objets, par exemple des défenses d’éléphant, des peaux de tigre, des sandales, des tissus coréens ou chinois, des sacs à main, des chapeaux texans reçus lors de la visite aux Etats-Unis et au Texas. Dans les années 1980, des cadeaux reçus par Elena Ceauşescu commencent à faire leur apparition.
Cristina Păiușan-Nuică a expliqué cela par l’importance croissante acquise par Elena Ceaușescu au cours de la dernière décennie communiste. « Lors des visites ou de l’accueil de différentes délégations, Elena Ceaușescu se voyait offrir des sandales, des sacs à main, des rubans, des écharpes, des boucles d’oreille, des portefeuilles et beaucoup d’autres objets du même genre. Et puis, il y avait aussi les cadeaux qu’elle recevait à l’occasion de ses anniversaires. Plus le régime communiste et l’époque Ceaușescu s’imbibaient du culte de la personnalité, plus le culte de la personnalité d’Elena Ceaușescu s’exacerbait, pour égaler, à partir de 1986-1987, celui voué à Nicolae Ceaușescu. Nous avons un morceau de l’écorce d’un arbre sur lequel est gravé « la camarade académicienne docteure ingénieure », des portraits réalisés par des peintres plus ou moins connus, où elle ressemble plutôt à Blanche-Neige qu’à soi-même. »
Tous ces cadeaux étaient personnalisés, raconte Cristina Păiușan-Nuică : «Ils étaient personnalisés et leur étaient dédiés. De petites dédicaces brodées sur une serviette, sur une taie d’oreiller ou imprimées sur une tablette attachée à un objet ou à un autre, par exemple une maquette, une sculpture. On y trouve des références à l’événement, la date et l’origine du cadeau. Malheureusement, tous les objets ne sont pas marqués ainsi, pour alléger la tâche du chercheur qui tente de les identifier. C’est un vrai travail de détective. »Une collection comme celle qui rassemble les cadeaux reçus par le couple Ceaușescu est impossible à évaluer financièrement, en raison de sa valeur historique, croit Cristina Păiușan-Nuică. « Vu le nombre et la diversité de ces objets, il est impossible de préciser un montant. Ils font partie de l’histoire de la Roumanie et ils valent beaucoup, j’imagine. Ce sont des objets uniques, impossibles à refaire, en cas de destruction. Une copie pourrait être réalisée, bien sûr, mais ce serait tout à fait différent. En plus de la valeur de l’objet en soi, il faut prendre en compte la valeur historique et le fait que ceux à qui ils étaient offerts les avaient vus, du moins une fois. »
La réorganisation de l’espace muséal a balayé la grande exposition réalisée avant 1989. Le Musée national d’histoire présente à nouveau les cadeaux au public dans le cadre d’une autre expo, « 1989, 30 ans après », ainsi qu’en ligne, dans le projet virtuel « Le communisme en Roumanie ». ( trad. Ileana Taroi)