Le prince Nicolae de Roumanie
Il a été le deuxième fils et le quatrième enfant du couple des futurs monarques de Roumanie, Ferdinand et Marie.
Christine Leșcu, 22.10.2023, 10:30
Il y a 120 ans, le 5 août 1903,
voyait le jour à Sinaia le prince Nicolae, le seul frère parmi les trois sœurs
du roi Carol II de Roumanie. La fin du destin des deux frères royaux a été
distincte, mais ils se sont aussi beaucoup ressemblé par leur comportement et
par leurs vies privées, dû en partie à la façon dont ils ont été élevés. Leur
mère, la reine Marie, écrivait d’ailleurs dans ses mémoires qu’elle avait
permis à ses enfants de grandir librement, sans aucune obligation de respecter
le protocole royal.
Ștefania Dinu, directrice du Musée national Cotroceni, continue
à raconter l’histoire du prince Nicolae: Son baptême a eu lieu le 3 octobre
1903 ; son nom, Nicolae, rappelle celui du tsar Nicolas II de Russie, cousin
germain de sa mère, la princesse qui allait devenir la reine Marie. Il a été le
deuxième fils et le quatrième enfant du couple des futurs monarques de
Roumanie, Ferdinand et Marie. Il était donc plus éloigné du trône, car il
n’occupait pas une position principale dans l’ordre de succession. Cela a
permis au prince Nicolae de jouir d’une enfance parfaitement heureuse à la Cour
royale. Comme il était un enfant facétieux, il a mis à mal toute tentative
éducatrice. Mais tout le monde a fini par aimer bien le petit prince.
Appelé tendrement Nicky
par ses proches, le prince Nicolae, petit-neveu préféré du roi Carol I, a été
envoyé au Royaume Uni pour étudier à Eton. La passion du prince pour le sport
et l’automobilisme s’est déjà manifestée quand il était à peine adolescent et ensuite
très jeune adulte. Durant la Grande Guerre, après le retrait de la Cour royale
à Iași en 1916, il avait l’habitude se promener en compagnie de sa mère dans
une petite automobile appelée Bambino, histoire de se détendre un peu soit-il
pendant cette époque tellement difficile. Ștefania Dinu raconte le parcours du
prince Nicolae après la guerre et la Grande Union de 1918: Il a continuait ses
études à Eton, avec des résultats pas brillants, mais bons quand même. Le
prince était de nature rêveuse, préférant plutôt les lettres et les humanités,
mais à Eton il a évidemment suivi une formation militaire, car la reine Marie
voulait absolument pour son fils une carrière d’officier de marine, avec des
études à l’Ecole navale de guerre du Royaume Uni. Mais cela n’a pas pu se faire
car le roi Ferdinand décéda prématurément en juillet 1927 et le prince Nicolae
rentra en Roumanie pour assumer les fonctions de haut régent. Puisque le prince
héritier Carol avait renoncé pour la deuxième fois au trône en 1925 et s’était
exilé en France en compagnie d’Elena Lupescu, le roi Ferdinand s’était vu obliger
à instituer une régence pour le roi-enfant Mihai. Cette régence entra en
fonction lors du décès du roi Ferdinand, avec le prince Nicolae, âgé alors de
24 ans, comme haut régent. Le roi Mihai n’avait que six ans à l’époque. Cette
régence a donc dû assumer la direction des affaires de l’État, tandis que le
prince Nicolae était en même temps le tuteur légal de son petit neveu.
Durant la régence, le prince
Nicolae a bien rempli ses fonctions jusqu’en 1930, lorsque le roi Carol II a
revendiqué son trône et repris les rênes de l’Etat. Les deux frères, élevés dans
le même esprit sans restrictions, se ressemblaient aussi par leur vie
sentimentale tumultueuse. Tout comme son frère le roi, le prince se lance dans
une idylle avec une femme mariée, Ioana Doletti, qu’il a fini par épouser après
le divorce de celle-ci, ce qui était contraire aux coutumes royales. Le roi n’a
pourtant pas accepté la situation, malgré une suite d’événements quasi
identiques dont il avait été le protagoniste. Ștefania Dinu ajoute plusieurs
détails sur la vie privée du prince Nicolae: Entre temps, il
a continué à se passionner pour l’automobile, pour l’aviation, pour le sport en
général. Il préférait Le ski était, mais il participait aussi aux courses
automobiles, telles le Paris-Nice, en 1933, et Le Mans. Il a accompagné la
reine Marie dans sa visite en Amérique en 1926, et il y a rencontré plusieurs
fabricants d’automobiles des Etats-Unis, dont Henry Ford. De retour en
Roumanie, le prince Nicolae a d’ailleurs acheté plusieurs voitures de marques
américaines qu’il a conduites dans ces courses. Le 28 octobre 1931, il a épousé
Ioana Doletti sans l’autorisation du roi Carol II, qui ne l’a pas compris
malgré sa propre relation avec Elena Lupescu. Le roi a fait preuve d’une
certaine hypocrisie quand il a demandé à son frère de renoncer à Ioana Doletti
et au mariage contracté secrètement dans la commune de Tohani. Le résultat en a
été l’exclusion du prince, qui a d’abord été envoyé à l’étranger pour six mois,
devenus six années. Pendant tout ce temps, le prince Nicolae revenait
régulièrement en Roumanie, pour participer tout de même à une série
d’événements aux côtés du roi Carol II.
Ce n’est
qu’en 1937 que le prince renonça définitivement à son titre royal, s’exilant
définitivement sous le nom de Nicolae Brana, aux côtés d’Ioana Doletti. En
1942, le roi Mihai lui a réaccordé le titre de prince de Hohenzollern et il a
reconnu le mariage de son oncle, sans pour autant lui réattribué aussi le titre
de « prince de Roumanie ». Pendant son exile, le prince Nicolae s’est
installé en Italie et en Suisse, étant surveillé de près par les services
secrets de l’entre-deux-guerres et de l’après-guerre, la Sureté et
respectivement la Securitate. Après l’installation du communisme en Roumanie,
le prince Nicolae a été un des plus dynamiques représentants de l’exile
roumain. Il a essayé de rassembler la diaspora roumaine autour de plusieurs
projets, comme par exemple la création de bibliothèques roumaines, comme celle
de Freiburg, et de centres culturels, comme ceux de Madrid et de Rome. Le
prince Nicolae est décédé à Madrid en 1978 et il a été enterré à Lausanne, en
Suisse. (Trad. Ileana Ţăroi)