Le magnétophone à Radio Roumanie
La radiodiffusion doit au magnétophone une partie importante de son fonctionnement à travers le temps.

Steliu Lambru, 16.03.2025, 10:24
De nos jours encore, un grand nombre des archives du monde utilisent un support analogique, le magnétophone étant donc l’équipement auquel l’on doit cet immense héritage inestimable. Inventé au cours des premières décennies du XXème siècle, le magnétophone à bobine et fil d’acier est le premier à enregistrer la voix humaine dans l’histoire de la radiodiffusion. Cependant, c’est l’apparition du magnétophone à bande magnétique, fabriqué par la compagnie allemande AEG et utilisé pour la première fois en 1935, qui marquera le lancement d’une longue génération d’équipements techniques à bande magnétique, qui domineront le marché audio durant la seconde moitié du siècle dernier.
Le passé des équipements techniques à Radio Roumanie
Radio Roumanie a toujours saisi l’air du temps, cherchant prioritairement à munir ses techniciens et ses journalistes de magnétos qui les aident à bien faire leur métier. Une histoire technique de la Radio roumaine retient dans ses chapitres des magnétophones de pointe, cet outil étant aussi le héros de nombreuses anecdotes qui attendent d’être écrites. En l’an 2000, l’ingénieur et ancien directeur technique de la Radio publique, Ilie Drăgan, a répondu aux questions du Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine. C’est en 1958 qu’il avait été embauché à Radio Roumanie, où il avait dirigé le département « Transmissions » chargé de l’exploitation des équipements techniques : « Je me souviens des transmissions avec des équipements à tubes électroniques, que nous appelions CN ; pour une réserve d’alimentation en électricité, nous avions aussi des batteries 110 Volts, connues sous le nom de <briques / cărămizi.> Une seule avait les dimensions de deux briques superposées. Quand nous partions en mission, nous les mettions (elles en étaient deux) dans une sacoche, car la Radio n’était pas dotée de véhicules de transport comme elle l’est aujourd’hui. Nous emportions aussi un magnéto qui pesait souvent plus de 35 kilos et qui fonctionnait avec de la bande en papier. Ainsi équipés, nous prenions le train pour aller enregistrer des choses dans les régions. Pour faire des enregistrements dans des fermes agricoles, les journalistes et les techniciens devaient aller dans les champs, où il n’y avait pas d’électricité ; il fallait donc recourir aux deux ou trois groupes électrogènes du département « Transmissions » transportés en voitures. Une fois sur notre lieu de travail, nous y mettions de l’essence et on les mettait en fonction pour alimenter les magnétos. C’est ainsi qu’on réalisait nos enregistrements à cette époque-là. »
Evolution des équipements pour l’enregistrement du son
L’histoire de la radio publique roumaine indique quatre périodes concernant les magnétophones. La première a été celle de la deuxième guerre mondiale et des années 1950, quand on utilisait toujours des magnétos à fil d’acier. Dès le début des années 1950, les magnétos à bande magnétique commencent à prendre de plus en plus de place. La deuxième période est celle des années 1960 et de la première moitié des années 1970, quand il fallait acheter les magnétos à travers le CAEM, le Conseil d’aide économique mutuelle, l’association économique des Etats socialistes. Cette convention désignait la Hongrie comme productrice de tels équipements. La troisième période a été celle de l’ouverture vers l’Occident, comprise entre 1975 et 1985. Les appareils occidentaux étant nettement supérieurs en termes de qualité et de prix, Radio Roumanie a acheté de la technologie occidentale. La quatrième période est marquée par le retour aux achats chez les fabricants du bloc socialiste, après1985. Ilie Drăgan se souvient : « Les traités CAEM désignait la Hongrie pour fabriquer ces équipements, des magnétos et des consoles. Plus tard, les Allemands de l’est ont proposé eux-aussi leur version de magnétophone, tandis que la Tchécoslovaquie fabriquait des cars de reportage. Nous en avions d’ailleurs acheté, installés dans des bus Škoda, mais en réalité les consoles et les magnétos étaient de fabrication hongroise. Ensuite, les Tchécoslovaques ont réussi à remplacer les consoles hongroises par d’autres de la marque Tesla Bratislava. Donc, en 1989, quand Radio Roumanie a acheté un car de reportage, qui est utilisé encore aujourd’hui, les consoles étaient tchécoslovaques et les magnétophones hongrois. »
Souvenirs de technicien
Ilie Drăgan se souvient de l’évolution des magnétophones à Radio Roumanie durant sa longue carrière d’ingénieur électronique, une carrière étendue sur quarante-deux ans: depuis les magnétos à bande de papier jusqu’aux enregistreurs portables, accrochés à l’épaule. Track 3: « Les magnétophones étaient très lourds. Avec un poids autour de 35 kilos, il fallait deux personnes pour transporter un seul magnéto à un enregistrement extérieur. Un calvaire. Aujourd’hui un journaliste à un super enregistreur aussi grand que la paume de sa main et qui réalise des super enregistrements. Plus tard, on il y a eu les Philips Junior, aussi grands qu’une mallette porte-documents, mais qui pesait tout de même environ 16 kilos. En tout cas, il n’était pas comparable à celui de 35 kilos. En plus, pour réaliser tous les enregistrements, les journalistes ne pouvait pas y aller seuls, il avait besoin d’être accompagné par un technicien. Les magnétophones portables de la marque Uher sont apparus après. »
Les magnétophones sont actuellement des objets exposés dans un musée, ils éveillent la curiosité et l’intérêt des passionnés d’histoire de la science et de la technologie. A Radio Roumanie, le magnétophone est toujours présent et il coexiste avec les nouvelles générations d’équipements numériques. (Trad. Ileana Ţăroi)