Le lac Morii (du Moulin)
Le quartier de Crângași, sis dans l’ouest de Bucarest, est aussi le
périmètre à l’intérieur duquel l’on retrouve le plus grand lac artificiel de la
capitale roumaine, aménagé en 1986. C’est le lac Morii (du Moulin), mais il est
aussi connu sous le nom de Ciurel et même de Dâmbovița, comme la rivière qui
traverse la ville du nord-ouest à l’est. L’impressionnante étendue d’eau a fait
partie du vaste projet d’aménagement de la rivière qui coupe Bucarest en deux.
Steliu Lambru, 10.07.2022, 06:41
Le quartier de Crângași, sis dans l’ouest de Bucarest, est aussi le
périmètre à l’intérieur duquel l’on retrouve le plus grand lac artificiel de la
capitale roumaine, aménagé en 1986. C’est le lac Morii (du Moulin), mais il est
aussi connu sous le nom de Ciurel et même de Dâmbovița, comme la rivière qui
traverse la ville du nord-ouest à l’est. L’impressionnante étendue d’eau a fait
partie du vaste projet d’aménagement de la rivière qui coupe Bucarest en deux.
L’historien Cezar Buiumaci,
du musée de la ville de Bucarest, nous raconte l’histoire du lac le plus récent
et le plus grand de la capitale.:
« Le lac Morii est une
composante de l’aménagement de la rivière Dâmbovița. L’idée de le créer
apparait dès le démarrage des travaux de systématisation de Bucarest, au début
de la neuvième décennie du XXe siècle. C’était le grand projet de
transformation radicale de la ville, nourri par Nicolae Ceaușescu. Le leader de
Bucarest reprenait une idée lancée bien avant cela, celle de la construction
d’un canal qui relie la capitale au Danube, via les rivières Dâmbovița et
Argeș. L’analyse du débit de la Dâmbovița a montré que l’ancien lit de la
rivière ne supporterait pas un transport fluvial. Or, pour augmenter ce débit,
deux grands lacs de retenue ont été construits : le lac Ciurel, connu
aussi sous les noms de Morii et Dâmbovița, et le lac Văcărești. »
Cet ample projet, qui
redessinait la rivière Dâmbovița vers le milieu des années 1980, avait une
composante politique, mais aussi une autre, d’urbanisme, rappelle Cezar
Buiumaci. « Le 5 juillet 1985, le Comité
politique exécutif du Comité central du Parti communiste roumaine se réunit pour
mettre en exergue la nécessité d’aménager la Dâmbovița, dans le cadre du projet
du nouveau Centre civique de la capitale. Le projet comprenait un grand lac de
retenue à l’ouest de la ville, pour stocker un grand volume d’eau propre,
destiné à alimenter la rivière. Le lac était en même temps un système de
protection contre les inondations et une zone de loisir. L’aménagement du lit
de la Dâmbovița avait pour but d’améliorer le climat, de créer des conditions
pour la rendre navigable et d’effectuer les travaux pour le canal Bucarest – Danube,
approuvés par le Décret 201 du 12 juillet 1985. »
L’idée de rendre la Dâmbovița
navigable a finalement été abandonnée, suite à l’avis des experts. L’inauguration
festive du chantier a lieu le 28 septembre 1985, et la porte du barrage de Ciurel
se refermait une année plus tard, en août 1986, raconte l’historien Cezar Buiumaci. « Le grand ouvrage du lac de retenue Ciurel fut achevé le 21 août
1986. C’était le plus grand lac artificiel de Bucarest, un plan d’eau de 240
hectares et un volume total de 20 millions de mètres cubes, destiné à
l’alimentation en eau de la ville, du système d’irrigation et des entreprises
industrielles. Le lac était aussi censé collecter les crues. L’ouvrage incluait
également l’aménagement de la Dâmbovița en amont du lac, jusqu’à Dragomirești-Deal,
sur une longueur d’environ 5 km, pour protéger plus de 1100 hectares de terrain
agricole ainsi que d’autres investissements réalisés à proximité du lit de la
rivière. Pour évacuer l’eau du lac, un barrage fluvial en béton armé, prévu de
trois vannes, chacune ayant une ouverture de 6 mètres, a été construit près du
pont Ciurel. « La mer » du quartier Crângași a entre 5 et 10 mètres
de profondeur et elle est endiguée par un barrage en argile compacte, provenant
de l’excavation du réservoir de ce lac. »
La mise en œuvre de cet
ample projet a également impliqué le démantèlement de plusieurs communautés
humaines et d’un cimetière de la zone. Des légendes urbaines parlaient de
restes humains que l’on pouvait apercevoir, des fois, à la surface du lac
surnommé « de la Mort ». Cezar Buiumaci ajoute : « Dans ce coin de la ville, en plus d’autres objectifs, il y avait
le cimetière paroissial de l’église Crângași. Les autorités de l’époque ont
décidé de le fermer et de faire réinhumer les restes humains dans le cimetière
Giulești-Sârbi. Les exhumations ont commencé au début de l’année 1985. Puisqu’il
fallait le faire vite, les membres du personnel ne pouvaient pas achever cette
tâche dans les délais alloués et les fossoyeurs des autres cimetières avaient
refusé de les aider. Alors, l’on y a fait venir des travailleurs du service de
propreté de la ville. La construction du lac sur l’emplacement de l’ancien
cimetière est un sujet de légendes urbaines. »
Un autre objectif de la
construction du lac Morii a été celui d’aménager une zone de loisir et de
sport, raconte l’historien Cezar Buiumaci.: « Construit dans une zone
très peuplée de la capitale, le lac Dâmbovița devait avoir aussi une composante
culturelle et sportive. Accessible, depuis les autres quartiers, en métro et
par le transport de surface, cette zone était dotée de facilitées pour des
activités sportives terrestres et nautiques: des débarcadères pour la pêche
sportive et une île d’environ 5 hectares, construite en grande partie par le
travail dit patriotique, c’est-à-dire non rémunéré, des travailleurs de
plusieurs entreprises, qui ont effectué plus de 70 000 heures de travail
jusqu’au 2 septembre 1987. »
Le lac Morii, sis au nord-ouest
de Bucarest, est devenu un repère important de la ville. Son évolution durant
les trois dernières décennies, les événements accueillis et le climat naturel,
qui y est né, le rendent toujours plus attrayant.