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Le graveur de la Maison royale de Roumanie, Anton Kaindl

Un artiste étranger moins connu par le grand public fait désormais l’objet d’une exposition de gravures d’une grande valeur historique et documentaire. L’artiste en question s’appelle Anton Kaindl et ses 44 gravures exposées au Palais Suţu, qui accueille le siège central du Musée de la ville de Bucarest, font partie d’un album plus ample qui contient 218 œuvres. Elles illustrent dans les moindres détails la Roumanie de l’entre-deux-guerres. Plus précisément, il s’agit des églises, ermitages et monastères des régions d’Olténie, de Moldavie, du Maramureş, de Valachie et de Bistrita, des croix d’Olténie ainsi que des maisons fortifiées de la même région, appelées « cule ». S’y ajoutent des maisons traditionnelles et des moulins de l’espace rural d’une Roumanie soumise à l’entre-deux-guerres à d’importantes transformations.

Le graveur de la Maison royale de Roumanie, Anton Kaindl
Le graveur de la Maison royale de Roumanie, Anton Kaindl

, 27.06.2021, 10:59

Un artiste étranger moins connu par le grand public fait désormais l’objet d’une exposition de gravures d’une grande valeur historique et documentaire. L’artiste en question s’appelle Anton Kaindl et ses 44 gravures exposées au Palais Suţu, qui accueille le siège central du Musée de la ville de Bucarest, font partie d’un album plus ample qui contient 218 œuvres. Elles illustrent dans les moindres détails la Roumanie de l’entre-deux-guerres. Plus précisément, il s’agit des églises, ermitages et monastères des régions d’Olténie, de Moldavie, du Maramureş, de Valachie et de Bistrita, des croix d’Olténie ainsi que des maisons fortifiées de la même région, appelées « cule ». S’y ajoutent des maisons traditionnelles et des moulins de l’espace rural d’une Roumanie soumise à l’entre-deux-guerres à d’importantes transformations.

Tout comme la Roumanie présentée par Anton Kaindl, sa biographie est également inédite, puisqu’il fut un des étrangers venus en Roumanie pour des raisons professionnelles et il est devenu par la suite un habitant permanent de la Roumanie. Artiste allemand né en 1872, Anton Kaindl est mort en Roumanie en 1951, après avoir vécu dans ce pays une trentaine d’années. Avant d’arriver à Bucarest, Kaindl aurait vécu à Genève, Zurich et Munich, pour travailler ensuite en tant qu’enseignant dans la capitale roumaine, aux écoles « Saint Joseph » et « Saint André ».

C’est la muséographe Nicoleta Bădilă qui nous parle de l’histoire personnelle d’Anton Kaindl : « Nous savons qu’en 1921, il est venu en Roumanie à l’invitation de la reine Marie qui semble avoir vu quelques-unes de ses gravures dans une expo à Munich. Ce fut elle qui a invité l’artiste à venir en Roumanie et à se faire embaucher à la Cour royale. Parallèlement, il est devenu le formateur de plusieurs professeurs de beaux-arts qui ont enseigné à différentes écoles de Bucarest. En tant que graveur, il sillonne la Roumanie pour réaliser une œuvre impressionnante, qui présente toutes les régions visitées par l’artiste. Cela signifie que la majorité de ses gravures ont pour sujet les monuments d’architecture des endroits qu’il a vus. En même temps, il a réussi à représenter aussi certains aspects intéressants des espaces ruraux. Par exemple, notre exposition contient une maison et un moulin paysans qui ont particulièrement suscité son intérêt. Mais ces incursions dans le monde paysan n’ont pas compté dans l’ensemble de son œuvre. Hormis celles-ci, Kaindl a également abordé d’autres thématiques telles les cartes de visite, les cartes postales, les gravures jubilaires liées à des événements de sa vie. Et là je parle des 10 ans écoulés depuis son arrivée en Roumanie et ensuite du 15e anniversaire de son arrivée et ainsi de suite. Il a également créé des « ex-libris », un cycle spécial appelé la danse macabre, qui s’inscrit dans un courant relativement spécial symboliste-religieux, auquel s’ajoutent les autoportraits, beaucoup d’autoportraits illustrant tous les âges de l’artiste. L’exposition contient aussi un autoportrait de l’artiste lorsque celui-ci était jeune, un autre à l’âge adulte et enfin un autre alors qu’il était déjà assez âgé. Nous avons par exemple un autoportrait réalisé dans les années 1940. »

Pour ce qui est de ses paysages, leur valeur artistique est doublée par une valeur documentaire, puisqu’ils présentent une Roumanie rurale de l’époque de l’entre-deux-guerres, disparue de nos jours. Nicoleta Bădilă : «Dans ses incursions, Anton Kaindl a rencontré assez souvent des croix hissées aux carrefours qu’il a présentées telles quelles. Certaines ne sont pas droites, d’autres sont incomplètes ou même endommagées etc. Mais l’artiste les a dépeintes comme il les a vues, ignorant ainsi le formalisme qu’il utilisait dans les autres travaux. Les croix dessinées sont assez variées et illustrent la diversité des artistes traditionnels qui les ont créées et qui ont évidemment combiné foi et tradition pour créer ces petits lieux de prière que Kaindl a illustrés dans des conditions extraordinaires. Les gravures d’origine d’Anton Kaindl indiquent son intérêt pour l’illustration des églises, châteaux et maisons paysannes de perspectives inédites. Dans certains cas, il montre le monument depuis sa façade, dans d’autres cas les bâtiments sont illustrés depuis des angles inédits pour l’époque, qui nous semblent contemporains de nos jours. Parfois le point de départ est très bas, alimentant la souplesse de l’architecture ou augmentant la sensation de hauteur. Mais souvent la perspective est très élevée, l’église se situant dans le centre de l’image, comme c’est le cas dans le centre des communautés. Les châteaux sont illustrés avec minutie, le regard du graveur étant concentré sur la végétation ou sur les rochers avoisinants, artifice qui donne un air mystérieux à ces constructions et souligne leur rôle de forteresses. »

Dans ses gravures, Kaindl n’a pas illustré exclusivement le monde paysan des provinces roumaines, il s’est également penché sur la ville de Bucarest des années 20 et 30, partiellement disparue aujourd’hui. Niocoleta Bădilă : « L’exposition est composée de 14 œuvres qui reproduisent différents endroits de Bucarest : la cathédrale et le palais du Patriarcat orthodoxe, une perspective sur l’église Bucur, le clocher de l’église d’Udricani, une gravure de l’église Saint Antoine, mais aussi une perspective intéressante sur le monastère de Văcăreşti, faite en 1921 depuis la rue Văcăreşti et illustrant le profil du monastère. Hormis les églises disparues de nos jours, les gravures représentent aussi des repères de la ville moderne, tels le monastère Radu Vodă et celui de Plumbuita, tout comme les immeubles de la nonciature apostolique et de l’ambassade de France. »

Nous ne savons pas clairement ce qui s’est passé avec Anton Kaindl après l’instauration du communisme, mais il est clair qu’il est décédé à Bucarest, où il fut soigné par une famille à laquelle il a légué son album de gravures, dont le propriétaire est actuellement le Musée de la ville de Bucarest. (Trad. Alex Diaconescu)

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