La collection et le musée « Dr George Severeanu »
Un des vieux quartiers chics du centre-ville de
Bucarest abrite la maison du médecin George Severeanu, transformée en musée et
en filiale du Musée de la ville. Ce qui n’est pas étonnant, puisque le médecin
radiologue Severeanu avait été le premier directeur du musée d’histoire de la
capitale roumaine et aussi l’un des plus connus collectionneurs d’artefacts archéologiques
de son temps.
Christine Leșcu, 04.06.2023, 10:00
Un des vieux quartiers chics du centre-ville de
Bucarest abrite la maison du médecin George Severeanu, transformée en musée et
en filiale du Musée de la ville. Ce qui n’est pas étonnant, puisque le médecin
radiologue Severeanu avait été le premier directeur du musée d’histoire de la
capitale roumaine et aussi l’un des plus connus collectionneurs d’artefacts archéologiques
de son temps.
Né en 1879 dans une famille de médecins, George Severeanu a
hérité certaines de ses passions – dont la médecine et les voyages – de son
père, le chirurgien Constantin Dimitrescu Severeanu, lui-même médecin célèbre à
l’époque, raconte Dan Pârvulescu, muséographe à la Maison-musée George
Severeanu: Il avait réussi à voyager assez souvent à
l’étranger, inoculant ainsi à son fils, le médecin George Severeanu, cette
passion des voyages à l’étranger, des visites de musées. C’était d’ailleurs une
activité à la mode à cette époque-là. Il a parachevé ses études à Berlin et Vienne.
Il a rencontré de nombreux autres collectionneurs passionnés. C’était la mode
en Europe et chez nous aussi, c’est donc ainsi qu’il a commencé à ramasser
petit à petit différents objets, menant en parallèle une carrière médicale
d’exception. Il a enseigné à la Faculté de médecine et il a pratiqué la
médecine à l’Hôpital Brâncovenesc, de Bucarest. Il a également écrit un très
grand nombre d’articles de médecine et des livres, alors que sa passion était
de collectionner des artefacts archéologiques.
Une grande partie de ces
artefacts sont d’origine gréco-romaine, ayant été découverts dans l’espace
roumain, en Dobroudja, et dans le bassin méditerranéen. Mais la collection du
docteur Severeanu contient aussi des surprises archéologiques, telles des
objets préhistoriques découverts dans la région de Bucarest, qui ont aidé à
compléter l’histoire de la capitale roumaine. Pourtant, le radiologue George Severeanu avait surtout apprécié la
numismatique, affirme Dan Pârvulescu: La numismatique a été sa plus grande
passion, sa collection comprenant près de 9.000 monnaies grecques, romaines et
médiévales, dont il a d’ailleurs fait don au musée. C’est ce qu’il a fait aussi
avec l’ensemble de la collection, entrée graduellement au patrimoine du Musée
de la Ville. Là aussi, il y a eu quelques surprises, notamment concernant
l’époque médiévale. Par exemple, des monnaies frappées durant le règne du
prince valaque Radu I, un personnage historique qui ne nous a pas laissé beaucoup
de traces, mais cette importante collection de monnaies a permis de mieux
documenter des aspects liés à l’économie, au commerce et à la circulation
monétaire de son époque.
Compte tenu de l’importance de
la collection du docteur Severeanu, ce n’est pas étonnant qu’il fût nommé
directeur du musée d’histoire de la Capitale lors de la création de cette
institution à l’entre-deux-guerres, explique Dan Pârvulescu: Ce fut le souhait de la municipalité de créer ce musée, qui est devenu
une réalité une bonne dizaine d’années après la décision prise en 1921. Le
noyau de la collection du musée s’est coagulé d’une part autour de la
collection du docteur Severeanu. D’autre part, des fouilles archéologiques
étaient en cours dans la région de Bucarest, les objets découverts venant
compléter le patrimoine du nouveau musée. A cela sont venues s’ajouter des dons
faits par la population, car de nombreux gens ont suivi l’exemple du docteur
George Severeanu.
Malheureusement, le sort de la
maison du docteur – elle aussi un objet du patrimoine architectural de la ville
– n’a pas été heureux, surtout au début du régime communiste, quand elle a été
nationalisée et occupée par des apparatchiks communistes, comme le raconte Dan
Pârvulescu: Différentes personnes y ont habité. Le docteur George Severeanu était
décédé en 1939, mais son épouse lui avait survécu près de 18 ans. La maison a
été nationalisée et des personnes envoyées par le parti communiste y ont habité
par la suite. Pendant ce temps, la collection a été envoyée à l’étranger. Une
bonne partie en est arrivée à Paris, une autre en Belgique. Des documents
manquent toujours des archives du musée, de celles de la maison et même des
Archives nationales. Nous sommes en train de mettre en page une monographie de
cette famille, qu’elle mérite fortement. Il y a une période vide, sur laquelle nous
n’avons aucune information. Ce que l’on sait c’est qu’en 1956, la maison a été
ouverte sous la forme d’un musée à caractère principalement numismatique,
jusqu’au moment où elle a été refermée au début des années 1990 à cause de son état
de dégradation avancée. Certes, la composante archéologique était présente,
notamment grâce aux vases grecs. La structure de l’exposition permanente,
ouverte en 1956, était numismatique.
Heureusement,
en 2017, au bout de longs travaux de restauration et de réorganisation, le
Musée George Severeanu a été ouvert dans la maison du docteur, sa collection
étant mise en valeur de façon moderne et interactive. (Trad. Ileana Ţăroi)