Un service européen de renseignements, est-il nécessaire ?
L’écoute des téléphones privés de leaders de pays alliés, comme ce fut le cas de la chancelière allemande Angela Merkel, est inacceptable pour 56% des Américains, selon un sondage réalisé fin octobre. Selon ce baromètre de l’opinion publique, tant les démocrates que les républicains s’opposent à cette forme de surveillance et la qualifient d’inacceptable. Environ 22% des Américains affirment avoir suivi la publication des révélations de l’ancien consultant de l’Agence nationale de sécurité des Etats-Unis (NSA), Edward Snowden.
Corina Cristea, 15.11.2013, 13:11
Elles ont provoqué d’amples réactions en Europe et notamment en Allemagne, où les informations sur des conversations téléphoniques interceptées d’Angela Merkel ont provoqué un véritable choc. Inculpé pour espionnage par Washington, Snowden a trouvé refuge en Russie, qui n’a pas répondu favorablement aux demandes d’extradition formulées par les Etats-Unis.
Les révélations faites par Edward Snowden ont fait le bonheur du réseau terroriste al-Qaïda et elles ont également mis en danger les opérations menées par les services de renseignements britanniques, affirment les chefs de ces derniers, auditionnés dans une séance publique au Parlement de Londres.
Cette réunion a été convoquée dans le cadre d’un effort de reconquête de la crédibilité de ces institutions. Andrew Parker, directeur du MI 5, le service de renseignement britannique, responsable principalement de la sécurité intérieure du Royaume-Uni et du contre-espionnage, a précisé que l’écoute électronique a aidé à prévenir depuis 2005 pas moins de 34 attentats terroristes, dont certains auraient pu provoquer un nombre immense de victimes. Les chefs des services de renseignements britanniques affirment que les fuites d’informations dans le cas Snowden ont mis en danger plusieurs opérations.
Les renseignements britanniques ont intercepté presque chaque jour des conversations téléphoniques de membres de réseaux terroristes du Proche Orient, d’Afghanistan et d’Asie du Sud, qui évoquent les révélations de Snowden, ont affirmé les chefs des agences d’information du Royaume-Uni. Ils ont précisé que les terroristes envisageaient d’abandonner ces moyens de communication jugés vulnérables.
Selon le quotidien britannique « The Independent », qui a analysé les documents rendus publics par l’ancien consultant, ainsi que certaines photographies aériennes, le Royaume-Uni disposerait d’une station secrète d’écoute près du Parlement allemand et des bureaux de la chancelière allemande Angela Merkel, qui utilisent des équipements de dernière heure. Selon le même quotidien, une station d’écoute américaine similaire située sur le toit de l’ambassade américaine à Berlin, à moins de 150 mètres des missions diplomatiques britanniques, aurait été démontée récemment après les divulgations faites sur l’écoute des téléphones portables de la chancelière.
A Washington, le président Barack Obama avoue n’avoir jamais demandé aux services américains de renseignement comment ils obtenaient leurs informations sur les pays et gouvernements alliés alors qu’ils lui présentaient des rapports. Le locataire de la Maison Blanche demande des clarifications sur la source des informations recueillies uniquement au cas où elles visent des Etats hostiles et des terroristes.
Dans une interview pour la chaîne américaine de télévision NBC, le président américain a reconnu être profondément impliqué dans les opérations menées par les services de renseignements uniquement au cas où ceux-ci visent des menaces réelles à l’adresse des Etats-Unis. Ecoutons la correspondante de la radio publique roumaine à Washington, Ani Sandu: « Les autorités américaines insistent sur l’idée qu’il faut maintenir les programmes par le biais desquels l’Agence nationale de sécurité (la NSA) collecte les informations, malgré certains appels adressés au gouvernement pour qu’il renonce à ces pratiques. Lors d’une audition devant un organisme indépendant garantissant le respect de la confidentialité, des représentants de la NSA, du FBI et du Département de Justice ont souligné le fait que les efforts de Washington visent à défendre le pays et ses alliés contre d’éventuelles attaques terroristes. Ils ont assuré que même les programmes de suivi qui se déroulent en dehors des Etats-Unis sont strictement contrôlés et en accord avec la législation américaine. De nouveaux points d’interrogation sont apparus après que la presse américaine eut révélé des informations selon lesquelles l’Agence nationale de sécurité aurait secrètement accédé à des données des utilisateurs de Yahoo et de Google stockées dans des serveurs étrangers. Des documents fournis aux journalistes américains par Edward Snowden montrent que les citoyens américains ne seraient pas épargnés eux non plus par ces programmes de collecte d’informations, ce que la législation nationale interdit en l’absence d’un mandat délivré par la justice. Durant l’audition mentionnée, le conseiller général de la NSA avait qualifié d’incorrectes les informations de presse sans fournir d’autres détails. Entre temps, Google a une nouvelle fois exprimé son indignation contre l’interception par la NSA des communications électroniques de ses utilisateurs. »
L’Agence nationale de sécurité des Etats-Unis a besoin d’un contrepoint, a affirmé Viviane Reding, commissaire européenne à la Justice. Elle a proposé la création d’un service européen de renseignement, en guise de réponse aux activités d’espionnage supposées être menées par les Etats-Unis contre les institutions communautaires et les ressortissants européens. (trad. : Mariana Tudose, Alex Diaconescu)