L’Europe, à l’heure du réarmement
La Commission européenne à récemment mis sur la table ReArm Europe le nouveau plan de réarmement européen en mesure de mobiliser des fonds s’élevant jusqu’à 800 de milliards d’euros dans les 4 prochaines années. Les Etats membres pourront par ailleurs prendre davantage de libertés dans le respect des règles en matière de déficit budgétaire dans le domaine de la défense et pourront réorienter des fonds initialement voués au développement régional aux investissements militaires.

Corina Cristea, 21.03.2025, 10:34
ReArm Europe
La Commission européenne à récemment mis sur la table ReArm Europe le nouveau plan de réarmement européen en mesure de mobiliser des fonds s’élevant jusqu’à 800 de milliards d’euros dans les 4 prochaines années. Les Etats membres pourront par ailleurs prendre davantage de libertés dans le respect des règles en matière de déficit budgétaire dans le domaine de la défense et pourront réorienter des fonds initialement voués au développement régional aux investissements militaires.
La présidente de la CE, Ursula von der Leyen :
« L’on vit des temps difficiles. Il serait superflu de détailler davantage la gravité des menaces qui pointent à l’horizon et les conséquences désastreuses qui risquent de survenir si ces menaces venaient à se matérialiser. Parce que la question n’est plus de savoir si notre sécurité est réellement menacée. Ou si l’Europe devrait prendre un rôle croissant pour assurer sa défense par ses propres moyens. En effet, nous connaissons depuis longtemps la réponse appropriée à ces questions. La vraie question est si l’Europe est prête à faire face à ces défis. Et si l’Europe est prête à agir à la mesure de ses ambitions ».
Lors des rencontres des dernières semaines, la réponse de différentes capitales européennes a été claire et limpide, a ajouté Mme von der Leyen : « Nous sommes revenus à l’ère du réarmement, et l’Europe est prête à augmenter massivement ses dépenses militaires, aussi bien à court terme, pour épauler l’Ukraine, qu’à long terme, pour assurer sa propre sécurité. » Des idées portées également par le sommet extraordinaire de Bruxelles, lors d’une réunion d’urgence.
Les causes de ce changement de paradigme
Adrian Cioroianu, professeur des universités et ancien ministre des Affaires étrangères aborde les causes de ce changement de paradigme en matière de défense européenne.
Adrian Cioroianu: « Il ne s’agit pas du seul effet Donald Trump. D’autres présidents américains avant lui avaient abordé la question de la quote-part de la participation européenne dans l’OTAN. Il y a eu George Bush junior, le président Obama, Donald Trump lors de son premier mandat, et même Joe Biden. Mais c’étaient des vœux pieux venus en temps de paix ou ce que le monde percevait ainsi. Car le monde, notre monde ne s’est pas réssaisi ni en 2008, lors de l’invasion russe de la Géorgie, ni en 2014 lors de l’invasion de la Crimée, ni même en 2022, lors de l’invasion de l’Ukraine. Nous étions inquiets pour l’Ukraine, mais l’on ne se sentait pas directement menacé ».
Un sentiment d’état d’urgence en matière de défense
Le sentiment de l’état d’urgence en matière de défense, ajoute Adrian Cioroianu, dérive du fait « qu’après les deux premiers mois du mandat de Donald Trump a la Maison Blanche nous nous sommes rendus compte que son administration l’encourage sur sa lancée plutôt que de le modérer. D’où ce sentiment d’urgence. Mais la cerise sur le gateau est arrivée en constatant la connivence qui régnait entre Moscou et Washington sur pas mal de sujets. Cela est sans précédant et n’est jamais arrivé, même durant le premier mandat de Donald Trump à la Maison Blanche sans parler de la politique des autres présidents américains. » L’une des conséquences positives cependant de cet état de fait pourrait être le réveil de l’Europe, estime Adrian Cioroianu.
Adrian Cioroianu : « L’Europe représente une puissance économique, démographique, intellectuelle qui n’a cependant pas d’équivalent dans ses capacités militaires. La politique de défense n’a pas représenté une priorité en Europe. Même après la chute du Mur de Berlin et l’intégration des pays de l’Europe centrale et de l’Est, la politique commune de sécurité esquissée à un certain moment ne s’est pas concrétisée dans les faits. »
Un plan sur 5 mécanismes de financement
Le plan de la Commission européenne comprend 5 mécanismes de financement de cette nouvelle politique de défense européenne. Le premier comprend l’accroissement des budgets nationaux de défense d’1,5% du PIB national, ce qui devrait mobiliser quelques 650 de milliards d’euros dans les 4 prochaines années, financés en grande partie par la hausse des déficits. Le 2e instrument financera des projets communs de défense européenne, dont notamment des systèmes de missiles, de défense aérienne, de système de cyber-défense, à hauteur de 150 milliards d’euros. Un instrument qui pourrait servir au besoin aussi à la défense de l’Ukraine. Le 3e mécanisme vise la possibilité des Etats membres de diriger les fonds de cohésion pour des projets de défense. Enfin, les deux derniers mécanismes de financement impliqueront des capitaux privés et des prêts consentis par la Banque européenne d’Investissements. « Car c’est bien le moment où l’Europe doit se montrer à la hauteur de ses ambitions », a souligné la cheffe de l’Exécutif européen Ursula von der Leyen. (Trad Ionut Jugureanu)