Les Roumains, toujours moins nombreux
Selon les statistiques, l’année 2013 a apporté aux Roumains un record peu réjouissant: le nombre le plus bas de naissances depuis que l’Etat moderne existe. Parallèlement, un habitant du pays meurt toutes les 2 minutes et quart. Si les choses continuent de la même façon, d’ici 2030, la Roumanie comptera moins de 16 millions d’habitants — niveau comparable à celui enregistré après la seconde guerre mondiale.
Corina Cristea, 24.01.2014, 12:42
Selon les statistiques, l’année 2013 a apporté aux Roumains un record peu réjouissant: le nombre le plus bas de naissances depuis que l’Etat moderne existe. Parallèlement, un habitant du pays meurt toutes les 2 minutes et quart. Si les choses continuent de la même façon, d’ici 2030, la Roumanie comptera moins de 16 millions d’habitants — niveau comparable à celui enregistré après la seconde guerre mondiale.
Prévisible après la révolution anticommuniste de 1989, suite l’abandon de la politique démographique pratiquée par le régime de Nicolae Ceauşescu, cette baisse de la natalité s’est maintenue, pourtant, devenant un phénomène constant des 22 dernières années.
De l’avis des sociologues, cette tendance ne changera pas en 2014. Selon les prévisions, en juillet prochain, la Roumanie comptera 19.450.000 habitants, un quart de million de moins par rapport à l’année dernière.
Le professeur Vasile Gheţău, directeur du Centre de recherches démographiques de l’Académie roumaine, explique: « En Roumanie, la natalité a baissé sévèrement pendant les années qui ont suivi la chute du communisme ; depuis 1995, elle se maintient à un niveau constant : 10 naissances par millier d’habitants. A part le taux de natalité, il y a un autre indicateur, encore plus pertinent : c’est le nombre moyen d’enfants qu’une femme met au monde. Eh bien, depuis 1995, il s’est arrêté à 1,3. L’on a assisté à une baisse du nombre de nouveau-nés tout de suite après la chute du communisme, en ’89 — comme on pouvait s’y attendre, après l’annulation des restrictions touchant la contraception et l’interruption volontaire de grossesse. 370 mille bébés sont venus au monde en ’89. Or, depuis 10 ans, on enregistre environ 200 mille naissances par an. La baisse est donc importante. »
La stabilisation démographique à laquelle on pouvait également s’attendre, après un certain temps, ne s’est pas produite. Les mesures visant à stimuler la natalité sont restées sans effet. Les politiques touchant cet aspect sont d’ailleurs très timides ; actuellement, l’allocation familiale pour un enfant est de moins de 10 euros par mois — de beaucoup inférieure, par exemple, à celle prévue pour entretenir un détenu.
Pourtant, la Roumanie n’est pas le seul pays confronté à une baisse de sa population — précise le professeur Vasile Gheţău: « C’est, hélas, un fléau de la société européenne, dans son ensemble. Au fur et à mesure de la modernisation de la société, la natalité a eu une évolution descendante dans presque tous les Etats européens. Paradoxalement, l’amélioration de la qualité de la vie, de l’assistance médicale et de l’espérance de vie ont eu un effet contraire sur le nombre d’enfants qu’une famille européenne met au monde. »
Cette tendance à la baisse de la population peut-elle être influencée ? Vasile Gheţău: « Les mécanismes démographiques sont d’une précision mathématique et ils ne sont pas du tout flexibles. On devrait accroître le taux de natalité et, en même temps, diminuer celui de mortalité. Or, une évolution de ces deux paramètres n’est pas prévisible dans l’immédiat, il n’y a pas de facteurs qui puissent la déterminer. Une hausse de la natalité supposerait des programmes et des stratégies nationales à long et très long terme, bénéficiant d’un financement substantiel — ce dont la Roumanie ne dispose pas à l’heure actuelle. Une baisse de la mortalité nécessiterait, elle aussi, d’énormes investissements dans le domaine de la santé publique. »
Néanmoins — estime le professeur Gheţău — trouver des moyens financiers pour stimuler la natalité serait plutôt une erreur, en ce moment, car une hausse de la natalité en période de crise n’est pas saine du point de vue économique et ses effets toucheraient notamment les catégories défavorisées.
Se rapportant aux conséquences de la baisse de la natalité, le directeur du Centre de recherches démographiques de l’Académie roumaine précise : «Une baisse du nombre de nouveau-nés a déterminé, au niveau macro-économique, une baisse des dépenses. Aussi, la société a-t-elle payé moins d’indemnités et d’allocations. C’est l’effet — positif, disons — enregistré jusqu’ici. Les effets négatifs se traduisent par la diminution de la population scolaire. Il y a des écoles qui ferment, ce qui a aussi un impact sur les enseignants. Pourtant, tous les avantages à court terme que l’on pourrait énumérer deviennent négatifs sur le long et très long terme. »
En effet — dit Vasile Gheţău — après 2030 le pays sera peuplé de personnes nées après 1990. Or, cette population sera inférieure d’un tiers à la population actuelle. La baisse naturelle du nombre d’habitants au cours des dernières années en Roumanie est de 50.000.
Or, selon les données provenant aussi bien de nos propres recherches que de sources internationales, d’ici 2030 la baisse naturelle doublera. (Trad.: Dominique)