Les priorités de Bucarest (I)
Dans un monde qui devient de plus en plus complexe, la Roumanie devrait assurer une succession d’anniversaires et prendre une série de responsabilités au niveau européen et international. C’est ce que déclarait récemment le ministre roumain des Affaires étrangères, Teodor Meleşcanu, lors d’une ample interview accordée à la Radio Roumanie. Dans cette édition nous allons aborder quelques-unes des priorités de la politique étrangère de Bucarest, en insistant notamment sur la décennie depuis que la Roumanie a rejoint l’Union européenne. D’autres sujets, tels l’adhésion de la Roumanie à l’espace Schengen, les relations avec les Etats-Unis, la Fédération de Russie ou encore la République de Moldova, la position de Bucarest à l’égard de la crise migratoire, les attaques terroristes ou les objectifs économiques de la politique étrangère roumaine seront abordés lors d’une prochaine édition.
Corina Cristea, 22.12.2017, 16:17
Quelles sont donc les principales priorités de la politique externe roumaine pour les mois qui suivent ? Teodor Meleşcanu répond : « Cette année nous fêterons une décennie d’appartenance à l’Union européenne et près d’une décennie et demie depuis notre adhésion à l’OTAN. Nous nous sommes reconnectés à notre histoire, à nos alliances traditionnelles et, au sujet des célébrations à venir, nous mettons en avant justement notre appartenance et notre attachement à la famille occidentale, européenne et euroatlantique. Alors que nous traversons aujourd’hui une période de prospérité et de stabilité sans précédent dans notre histoire, il faudrait pouvoir demeurer stratégiquement rattachés au noyau dur de cette communauté. Vous connaissez nos objectifs prioritaires: le grand centenaire, la présidence du Conseil de l’Union européenne en 2019, la candidature pour une place de membre non permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU, toujours en 2019, et un objectif particulier – l’adhésion à l’OCDE. Je vais commencer par l’Europe, car il s’agit de notre continent. Et dans cette perspective, notre devoir est d’aiguiller notre développement dans la direction d’une convergence accrue et d’une intégration approfondie, solide et durable. Nous sommes très préoccupés par le respect des droits des citoyens roumains dans l’Union européenne, et ce y compris dans le contexte du Brexit, par l’adhésion à l’espace Schengen, la sécurité européenne à l’intérieur et à l’extérieur de nos frontières, la politique de cohésion, la politique agricole commune et l’approfondissement du marché unique. D’autres thèmes de préoccupation concernent le Mécanisme de Coopération et de Vérification, la gestion des flux migratoires, la lutte contre les changements climatiques, le pilier social et bien d’autres thèmes encore. »
Les intérêts européens de la Roumanie ne peuvent être séparés de ses priorités en matière de sécurité, et cela dans une perspective transatlantique, voire globale. La Roumanie n’est plus aujourd’hui un simple bénéficiaire de l’OTAN, elle participe de façon active et pertinente à la prise de décisions, dans la poursuite des objectifs communs, et cela que l’on considère son rôle de sécurité de la frontière Est de l’Alliance, son rôle de pays d’accueil de certaines composantes du système antimissile ou encore de sa contribution en Afghanistan, voire pour assurer la sécurité cybernétique de l’Ukraine, a encore précisé le ministre roumain des Affaires étrangères à Radio Roumanie.
En faisant le bilan de la décennie écoulée depuis le moment de l’adhésion de la Roumanie à l’UE, Teodor Melescanu a mis en évidence l’amplitude des transformations au niveau de la société roumaine : « Ces années ont permis un développement sans précédent de la Roumanie, de tous les points de vue: la consolidation de la démocratie, le développement des capacités institutionnelles et, par-dessus tout, la prospérité économique. Nos concitoyens jouissent de tous les droits et libertés rattachés à la citoyenneté européenne. Les échanges culturels, l’accès au réseau éducatif européen pour nos étudiants constituent quelques-uns des meilleurs exemples. Du point de vue économique, le PIB de la Roumanie a presque doublé ces dix dernières années, alors que l’Union a traversé une période de crise économique et financière assez profonde. La Roumanie a la volonté d’utiliser efficacement l’ensemble des instruments mis à sa disposition par l’Union européenne pour qu’elle réduise les écarts de développement entre les régions et pour assurer un niveau de vie plus élevé à tous ses citoyens ».
Du point de vue de la diplomatie bilatérale, la Roumanie a pour objectif d’agir dans trois directions: premièrement, coopérer d’une manière de plus en plus étroite avec les pays voisins, membres de l’UE, tels la Bulgarie et la Hongrie, mais également avec la République de Moldova et l’Ukraine. Deuxièmement, il nous faut consolider les relations bilatérales avec nos partenaires stratégiques, tels la France et l’Allemagne ou encore avec le Royaume Uni dans la perspective du Brexit, alors que dans une perspective sécuritaire, nous allons renforcer notre coopération avec la Pologne, l’Espagne et l’Italie. Enfin, la troisième direction vise à approfondir le dialogue bilatéral avec les autres Etats membres de l’UE : la Tchéquie et la Slovaquie, les pays du Benelux, les Etats baltes, l’Autriche qui nous précédera à la présidence tournante de l’UE, ainsi qu’avec la Finlande et la Croatie, Etats membres du trio assurant, avec la Roumanie, la présidence de l’Union ainsi qu’avec les pays candidats et partenaires de l’UE, a encore déclaré le chef de la diplomatie roumaine. (Trad. Ionut Jugureanu)