Les dimensions de l’accord scellé entre l’UE et le Royaume-Uni
Quelques jours à peine avant la sortie de facto de la Grande-Bretagne du giron communautaire, faisant suite au référendum britannique du 23 juin 2016, Londres et l’Union européenne sont finalement parvenues à un accord, censé régir leurs relations après le 31 décembre 2020. Il s’agit tout d’abord de la signature d’un accord de commerce et de coopération, entré en vigueur au 1er janvier courant, ensuite d’un nouveau partenariat pour la coopération policière et judiciaire en matière pénale et civile, et d’un accord de coopération dans le nucléaire civil, signé entre Londres et l’Agence européenne de l’énergie atomique.
Corina Cristea, 15.01.2021, 11:43
Quelques jours à peine avant la sortie de facto de la Grande-Bretagne du giron communautaire, faisant suite au référendum britannique du 23 juin 2016, Londres et l’Union européenne sont finalement parvenues à un accord, censé régir leurs relations après le 31 décembre 2020. Il s’agit tout d’abord de la signature d’un accord de commerce et de coopération, entré en vigueur au 1er janvier courant, ensuite d’un nouveau partenariat pour la coopération policière et judiciaire en matière pénale et civile, et d’un accord de coopération dans le nucléaire civil, signé entre Londres et l’Agence européenne de l’énergie atomique.
Le 31 décembre 2020, le Royaume-Uni quitte donc le marché commun et l’union douanière, près d’un demi-siècle après les avoir rejoints. Les négociations de la dernière ligne droite n’ont pas été exemptes d’embouches, faisant parfois craindre l’échec imminent. Les principaux points d’achoppement sur lesquels ont longuement buté les deux parties : les règles concurrentielles, exigées par l’Union européenne, qui voulait se prémunir de la sorte contre le risque d’une concurrence déloyale de la part des compagnies britanniques, ou encore l’accès des pécheurs européens aux eaux du Royaume Uni. Faute d’un tel accord, conclu à l’arraché, les risques induits par l’incertitude planaient lourdement tant sur l’espace communautaire que sur l’avenir des îles britanniques. Car, en effet, en l’absence d’un accord, les deux parties se voyaient obliger, à partir du 1er janvier, à suivre les règles de l’Organisation mondiale du commerce, soit à introduire des droits de douane, risquant de porter ainsi un coup fatal à des économies déjà fragilisées par la crise de la Covid 19.
La conclusion de l’accord est essentielle pour maintenir la cohésion du monde occidental, apprécie Iulian Fota, directeur général de l’Institut diplomatique roumain, sur les ondes de Radio Roumanie. Selon lui, une fois le Brexit acté, il a été évident que les deux parties ont tout fait pour sauvegarder leurs bonnes relations. L’issue montre que les liens qui nous unissent demeurent toujours plus forts que les considérations qui nous séparent, poursuit M. Fota. « Que ces deux acteurs, l’Union européenne et la Grande-Bretagne, soient parvenus à un accord, cela fait la preuve du degré de cohésion du monde occidental. Pourquoi est-ce si important ? Eh bien, parce que l’on se trouve déjà dans un monde globalisé, dans un monde où la concurrence ne se déroule plus entre des Etats, mais entre des espaces de civilisation. Et lorsque l’on parle de l’UE, des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de l’OTAN, tout cela rentre sous un même chapeau, celui de la civilisation occidentale. Les observateurs, les acteurs internationaux concurrents, guettent le faux pas, scrutent la manière dont l’Occident arrive à régler ses relations internes. D’où, cette formidable nouvelle, celle qui fait que le Royaume-Uni et l’Union européenne soient parvenus à sauver l’essentiel de leur relation bilatérale, en la plaçant dans un nouveau cadre, et tout cela en dépit de leurs différends et autres points d’achoppement, certains d’importance. La nouvelle formule de notre relation bilatérale doit faire encore ses preuves mais, globalement, les Européens et les Britanniques font passer ce message : le Brexit ne signifie pas la fin de notre histoire commune, et la Grande-Bretagne demeure une nation européenne. Car, l’UE est une chose, l’Europe en est une autre, et la Grande-Bretagne demeure rattachée à l’Europe par cet accord. Le message passé à cette occasion est limpide : il ne s’agit pas d’un accord censé nous séparer, mais d’un accord qui puisse sauvegarder la relation étroite qui existe entre les deux entités, une relation qui prendra, certes, une autre forme que celle de l’Union européenne, mais voilà, l’Occident s’avère de la sorte capable de maintenir sa solidarité, et de pouvoir surmonter ses différends, qui peuvent être issus des traditions différentes, des politiques intérieures divergentes, et ainsi de suite. ».
La Grande-Bretagne quitte en effet le marché unique européen et l’union douanière, en évitant toutefois l’application de droits de douane, de quelque côté de la Manche que ce soit. Mais le divorce fait malgré tout des victimes, tel le programme Erasmus, grâce auquel les étudiants européens pouvaient suivre leurs études au Royaume-Uni, alors que les étudiants britanniques pouvaient en faire autant dans les universités du continent. Quant au régime des visas, il est prévu que les Roumains, par exemple, puissent entrer sans visa et séjourner au Royaume jusqu’à six mois par an. Beaucoup d’observateurs s’interrogent toutefois sur l’avenir de la Grande-Bretagne. Car, ce n’est un secret pour personne que si le Brexit était perçu par ses partisans comme l’avènement d’une ère nouvelle, censée mener vers un Royaume-Uni global, qui venait de récupérer son indépendance, dans les faits, le Brexit n’avait fait qu’affaiblir les liens entre l’Angleterre, le Pays de Galles, l’Ecosse et l’Irlande du Nord, qui forment ensemble une économie dont le poids est estimé à 3 trillions de dollars, selon l’agence Reuters.
Les partisans et les pourfendeurs du Brexit continuent de camper sur leurs positions respectives. Les uns voient le Brexit comme une nouvelle chance d’arracher le Royaume-Uni à ce projet européen, dominé par l’Allemagne et voué selon eux à l’échec. Les autres en revanche perçoivent le même Brexit comme un coup de folie qui ne fera qu’affaiblir l’Occident et qui, rajoute Reuters, en jetant de l’huile sur le feu, mettra un terme à ce qu’il reste de l’influence globale du Royaume-Uni sur la scène internationale, portant préjudice à l’économie britannique et isolant à terme les îles britanniques du reste du monde. Mais, vu que nul n’est prophète dans son pays, si l’on croit l’adage, attendons plutôt voir. (Trad. Ionuţ Jugureanu)