Les conséquences d’un dollar plus fort
Le dollar américain s’est fortement apprécié et selon les experts, il continuera son ascension jusqu’à sa parité avec la monnaie européenne, le plus probablement vers la fin de l’été. Cette évolution intervient après que l’euro a été poussé vers le bas par la politique de relance adoptée par la Banque centrale européenne. Quelles conséquences a le renchérissement du billet vert sur le marché financier et économique roumain ?
Corina Cristea, 20.03.2015, 13:06
Le dollar américain s’est fortement apprécié et selon les experts, il continuera son ascension jusqu’à sa parité avec la monnaie européenne, le plus probablement vers la fin de l’été. Cette évolution intervient après que l’euro a été poussé vers le bas par la politique de relance adoptée par la Banque centrale européenne. Quelles conséquences a le renchérissement du billet vert sur le marché financier et économique roumain ?
Ionut Dumitru, vice-président de l’Association des Experts financiers- bancaires de Roumanie explique : « Le dollar ne peut pas à lui seul influencer le marché roumain de devises, mais il le fait par sa parité avec l’euro. La monnaie américaine a connu dernièrement un renforcement spectaculaire suite à la politique monétaire d’injection massive de liquidités adoptée par l’UE. Entre temps, les Etats-Unis s’attendent à une augmentation des intérêts. Nous avons donc l’Europe d’une part, où les taux d’intérêts baissent et les Etats-Unis de l’autre, où ces taux sont majorés. C’est ainsi que se présente le marché financier, d’où le renforcement du dollar américain. Le billet vert a connu une majoration importante par rapport aussi à la monnaie roumaine, le leu, mais cette parité a des conséquences limitées dans l’économie roumaine depuis l’adhésion du pays à l’UE. Si l’on parle commerce extérieur, les principaux produits dénominés en dollars sont ceux énergétiques ou encore les combustibles importés, dont les tarifs varient en fonction du prix du baril de pétrole exprimé en dollars. Pour conclure, les rapports entre l’économie roumaine et le dollar américain se sont affaiblis ces 10 ou 15 dernières années et se résument à présent au domaine énergétique et des carburants, d’où la récente majoration du prix à la pompe. »
Du coup, derrière la forte appréciation du billet vert se cache en fait une importante dépréciation de l’euro, ce qui témoigne d’un contexte économique européen très délicat, selon le professeur Radu Musetescu, chef de la chaire de Relations Economiques Internationales à l’Académie d’Etudes économiques de Bucarest : « On aurait cru, ces dernières années, que le dollar américain suivait une tendance descendante, en raisons des défis qui se posaient devant les Etats-Unis, depuis les guerres jusqu ’aux blocages politiques entre démocrates et républicains, en passant par les élections. Paradoxalement, il y en qui font des erreurs encore plus graves que les Américains, d’où cette nouvelle appréciation du billet vert et sa position relativement bonne. Il convient de mentionner également une chose fort intéressante dans cette économie globale, à savoir le rôle que joue la Chine. A mon avis, la croissance de cette économie et de toutes les exportations chinoises ne sont pas sans rapport avec le dollar. Autrement dit, le dollar américain est une devise beaucoup plus internationalisée que l’euro ou le yen. »
Quelles seraient les conséquences d’une égalité anticipée euro-dollar ? Dans une interview à Radio România, l’analyste Valentin Ionescu, ancien ministre vers la fin des années ’90, explique : « Lorsque les deux devises seront arrivées à la parité – niveau dont elles se rapprochent déjà — on pourra juger de la compétitivité des exportations européennes et américaines. La compétition en matière d’exportations de biens et de services est un indicateur particulièrement révélateur. Toutefois, ce qui est intéressant c’est que la plupart des entreprises américaines et occidentales gagnent de l’argent sur les marchés extérieurs, là où la principale devise est le dollar américain et non pas l’euro. Deux tiers du commerce mondial se déroulant donc en dollars et non pas en monnaie unique européenne, cela rapporte des profits en dollars. Par conséquent, le renforcement de la monnaie américaine profitera aux uns et nuira aux autres. En outre, au même chapitre exportations, il sera très difficile de miser sur les coûts, en termes de compétitivité, du moins dans la relation bilatérale UE — Etats-Unis. »
L’analyste économique Ionuţ Dumitru affirme pourtant qu’il est difficile de prévoir, à ce jour, que deviendra le taux de change euro-dollar : « Faire des pronostics n’est pas si simple que ça, surtout dans le contexte où l’on a eu du mal à anticiper les évolutions. Tout dépend des attentes du marché et de la manière dont la Réserve Fédérale Américaine gérera la hausse des taux d’intérêts. Certaines estimations font état d’une bien prochaine égalité euro-dollar, ce qui ce traduirait par un taux de change leu – dollar très proche de celui leu — euro, mais ce ne sont là que des estimations, lesquelles comportent un certain degré d’incertitude. Quel avenir pour ce taux de change ? Personne ne saurait le dire, mais il existe des prémisses pour un renforcement significatif du dollar face à l’euro. »
Les échanges dans les deux sens avec les pays de l’UE comptent pour 70% du commerce extérieur de la Roumanie, le poids des autres marchés étant donc limité à 30%, précise Ionuţ Dumitru. (Trad. Ioana Stancescu, Mariana Tudose)