Le supermarché, l’autre musée
Le risque de récession de la zone euro devient de plus en plus probable sur fond de crise énergétique et de baisse des activités, prévient l’agence américaine Bloomberg. Autant les ménages que les compagnies devront faire cet hiver face aux défis de la rationalisation de l’énergie, après la diminution des quantités de gaz livrées par la Russie à l’UE. A cette perspective angoissante, ajoutons encore l’inflation record et des blocages réguliers au long des chaînes d’approvisionnement. L’activité industrielle avait d’ailleurs commencé à battre de l’aile dès le mois de juillet dernier, alors que le taux d’inflation attendu risque d’atteindre 9,6% dans les trois derniers mois de l’année, soit 3 fois plus que l’objectif que c’était fixé la Banque centrale européenne.
Corina Cristea, 07.10.2022, 14:11
Le risque de récession de la zone euro devient de plus en plus probable sur fond de crise énergétique et de baisse des activités, prévient l’agence américaine Bloomberg. Autant les ménages que les compagnies devront faire cet hiver face aux défis de la rationalisation de l’énergie, après la diminution des quantités de gaz livrées par la Russie à l’UE. A cette perspective angoissante, ajoutons encore l’inflation record et des blocages réguliers au long des chaînes d’approvisionnement. L’activité industrielle avait d’ailleurs commencé à battre de l’aile dès le mois de juillet dernier, alors que le taux d’inflation attendu risque d’atteindre 9,6% dans les trois derniers mois de l’année, soit 3 fois plus que l’objectif que c’était fixé la Banque centrale européenne.
La Roumanie, qui n’a pas encore rejoint l’espace monétaire européen, se confronte malgré tout, à des défis plutôt similaires. La Banque nationale de Roumanie faisait ainsi état, dans un rapport issu le mois dernier, d’un taux d’inflation de 15% de la monnaie nationale, le leu, hausse provoquée par l’explosion des prix de l’énergie et des produits alimentaires. Et les choses ne vont pas s’améliorer, croit savoir l’économiste et professeur des universités Mircea Cosea, au micro de Radio Roumanie : « L’inflation poursuivra sur cette lancée. Ce ne sera pas une hausse spectaculaire, mais l’on va encore assister à la dévalorisation de la monnaie nationale. Parce que les causes qui sont à la base de cette hausse sont toujours là, notamment l’arrêt des livraisons du gaz russe. Maintenant, le taux d’inflation de 15% fait référence à la moyenne. Si l’on regarde en revanche la hausse des prix aux produits de base, aux produits alimentaires, l’on peut constater des hausses de 28 à 30%, voire davantage. Et ce qui fait mal c’est que l’on a peu de leviers face à cette hausse de prix, si ce n’est l’augmentation de l’offre des produits issus de l’industrie alimentaire roumaine ».
En effet, l’augmentation de l’offre des produits locaux aurait pour effet, selon Mircea Cosa, la baisse des importations, et la diminution de l’effet inflationniste induit par ces dernières. Néanmoins, l’économiste roumain pense qu’un infléchissement de la courbe inflationniste ne se produirait pas avant le milieu de l’année prochaine, lorsqu’il prévoit la reprise des exportations de gaz de la Russie vers l’Europe, et cela seulement dans la mesure où certaines conditions politiques soient remplies. Mircea Coșea: « Pour l’instant, la Russie est parvenue à dénicher certains débouchés alternatifs, tels les marchés chinois et indiens, mais les quantités exportées sont loin d’être comparables. A l’heure qu’il est, la Russie a l’air de remporter le bras de fer qui l’oppose à l’UE sur le plan des sanctions, mais il s’agit d’une victoire partielle et provisoire. Parce que la situation de l’économie russe se dégrade d’un jour à l’autre, et elle serait bientôt forcée de reprendre l’exportation de ses matières premières. Car si l’on regarde l’assiette des produits exportés par la Russie, l’on se rend compte combien elle est fragile du point de vue de son commerce externe. La Russie vit de l’exportation de l’énergie et de ses matières premières. Mais, vu la situation politique internationale, je ne prévois pas une grosse diminution des tensions dans les prochains mois, ce qui fait que l’inflation se poursuivra. »
Et, en effet, les prix s’envolent pendant ces temps dans les rayons des magasins, même si certains prétendent observer dernièrement une certaine décélération du rythme de la hausse des prix. Mais décélération ou pas, les Roumains ont de plus en plus de peine à nouer les deux bouts, d’autant que les revenus sont loin d’avoir suivi l’envolée des prix, loin de là. L’économiste Adrian Negrescu :« En fait, l’inflation nous affecte tous, en égale mesure. Pour bon nombre de Roumains, faire les courses c’est comme aller au musée. On y va, on admire, on s’étonne, puis on rentre. Les gens commencent à acheter moins de produits de base, car ils ne peuvent plus acheter autant qu’avant. Je constate par ailleurs une hausse inquiétante des prix de production. Je vois des prix de production qui ont augmenté de 50%, ce qui laisse présager du pire, une fois cette hausse répercutée sur le consommateur final. Il s’agit donc d’un processus inflationniste qui va se poursuivre, en s’aggravant. Et, malheureusement, nous n’avons rien fait pour essayer de contrer l’envolée des prix. Il fallait tout d’abord prendre les mesures appropriées pour essayer de contenir la spéculation des prix de l’énergie, en utilisant pour ce faire notamment le levier fiscal. Ensuite, essayer de diminuer les importations, car dans ce domaine aussi, certains en profitent de façon éhontée ».
Le revers de la médaille, avoue l’économiste Adrian Negrescu, est que les hausse des prix c’est un peu comme un élastique. Si l’on tire trop sur l’élastique, il risque de céder. Parce qu’en augmentant les prix à tout va, l’on peut assister à une diminution de la demande des biens et des services, ce qui peut mener au blocage de l’économie tout entière. (Trad. Ionut Jugureanu)